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Question écrite concernant les différents intervenants publics, mixtes et privés de la collecte et du traitement des déchets et la responsabilité de la Région.

de
Caroline De Bock
à
Alain Maron, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de la Transition climatique, de l'Environnement, de l'Énergie et de la Démocratie participative (question n°75)

 
Date de réception: 05/12/2019 Date de publication: 17/01/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 17/01/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
10/12/2019 Recevable p.m.
 
Question    Nous en avons encore récemment discuté en Commission, une enquête de “Question à la Une” de la RTBF a révélé que des déchets belges, censés être recyclés, sont envoyés dans des quantités considérables un peu partout dans le monde, dans des containers, le plus souvent par voie maritime. Ces déchets se retrouvent dans des décharges clandestines à des milliers de kilomètres de la Belgique : en Turquie et en Malaisie.

La Belgique serait le cinquième plus gros exportateur de déchets au monde selon un rapport de GreenPeace. Ainsi en 2018, 530 000 tonnes de déchets belges ont été exportées vers d’autres continents, dont 33 000 tonnes ont atterri en Malaisie.

Il y a une multitude d’intervenants dans le secteur de la gestion des déchets, publics et privés, et dans certains conseils d’Administration de sociétés, on retrouve des producteurs d’emballages plastiques comme Unilever, Procter and Gamble, …

Certains intervenants sont parfois des entreprises mixtes comme Bruxelles-Énergie (dont le capital est détenu pour 60% par Bruxelles-Propreté et pour 40% par Sita, groupe SUEZ Environnement) ou comme Bruxelles-Compost (dont le capital est détenu pour 60% par Bruxelles-Propreté et pour 40% par Indaver).

Il est évidemment impératif de s’attaquer à la source du problème en interdisant la profusion de production d’emballages plastiques et autres déchets à la source. En outre, il faut améliorer les filières de traitement des déchets.

Pour le PTB, la gestion des déchets doit rester aux mains de la collectivité, pour permettre une réelle lutte ambitieuse contre le réchauffement climatique et pour l’environnement, et répondre aux besoins de la population, et non pas aux intérêts d’actionnaires privés de multinationales. Nous devons sortir du système de concurrence pour revenir à un acteur unique pour la collecte et la gestion des déchets.


- Pouvez-vous fournir la liste des tous les intervenants en région bruxelloise dans la collecte, le traitement et le recyclage des déchets, qu’ils soient publics, mixtes ou privés? Quels sont leurs rôles? Quelles parts de marché occupent-ils chacun ?

- Par rapport aux déchets belges retrouvés à l’étranger, notamment en Malaisie et en Turquie, vous signaliez que des efforts particuliers sont à fournir.
- Avez-vous réalisé une enquête sérieuse sur les responsabilités des différents acteurs ? Y a-t-il des filières bruxelloises qui seraient concernées ?

- Qu’est-ce que le gouvernement a prévu à ce jour pour ne pas qu’un tel scandale se produise à nouveau ?
 
 
Réponse    Acteurs publics

En Région de Bruxelles-Capitale,
Bruxelles-Propreté assure la mission de service public de collecte et de traitement des déchets ménagers sur le territoire bruxellois. Cette compétence est dite « obligatoire », ce qui signifie que Bruxelles-Propreté doit assurer cette mission de service public mais d’autres acteurs peuvent également intervenir dans la collecte et le traitement de déchets ménagers.

Les compétences de Bruxelles-Propreté peuvent être résumées comme suit :

- Compétences obligatoires :

o Exercice des compétences d’Agglomération en matière d’enlèvement et de traitement des déchets municipaux tels que visés à l’article 4 §2, 1° de la loi d’Agglomération du 26/07/71 ;

o Participation à l’établissement par Bruxelles Environnement de la Planification et l’élimination des déchets bruxellois ;

o Exécution totale ou partielle à la demande de l’Exécutif de la politique des déchets telle que visée à l’article 6, §1er, II, 2° de la loi spéciale du 08/08/80 de réformes institutionnelles ;

o Exercice des attributions de l’Agglomération en matière de nettoyage de la voirie que le Conseil d’Agglomération accepte d’exercer, à la demande d’une ou plusieurs communes de la Région ;

o Organisation de collectes sélectives ;

o Développement d’initiatives visant à la préparation en vue du réemploi et au recyclage des déchets ;

o Gestion de parcs à containers au travers d’un réseau de parcs, dont les parcs communaux et la coordination de la gestion et de la collecte des encombrants.

- Compétences facultatives :

o Elimination des déchets provenant d’une entreprise sur demande et aux frais de celle-ci ;

o Prise en charge du nettoyage de la voirie publique et ses abords sur demande et aux frais des pouvoirs publics concernés ;

o Balayage et ramassage des immondices sur la voirie régionale et sur les sites propres de la STIB

Les communes jouent également un rôle :

- en octroyant certains types de permis d’environnement aux opérateurs de déchets ;

- en étant responsables de la propreté et la salubrité des rues, lieux et édifices publics ;


- dans le nettoiement, l’enlèvement des encombrements des voies publiques.

Bruxelles-Propreté peut également exercer des activités commerciales, qui se sont notamment matérialisées par la création de 4 filiales, à actionnariat mixte ou public :


- Bruxelles-Energie (actionnariat : 60% Bruxelles-Propreté ; 40% Suez) : en charge de l’incinérateur ;

- Bruxelles-Compost (actionnariat : 60% Bruxelles-Propreté, 40% Indaver): traitement des déchets verts ;

- Recyclis (actionnariat : 100% Bruxelles-Propreté) : trie les emballages PMC et les papiers-cartons  et revend à l’industrie les matières triées suivantes ;

- Bruxelles Démontage : (actionnariat : 100% Bruxelles-Propreté) en charge du projet Recy-K : plateforme d’expérimentation prenant la forme d’un écosystème ouvert qui intègre une multitude d’acteurs issus du monde associatif et institutionnel, de l’économie sociale et circulaire, de chercheurs, d’artistes, de publics faiblement qualifiés,... (plus d’infos :
https://environnement.brussels/fiche/bruxelles-proprete-recy-k)

Acteurs privés

Des opérateurs privés de gestion des déchets interviennent également :

- Les
transporteurs : transportent, chargent, déchargent et/ou déplacent des déchets vers une installation de collecte et/ou de traitement de déchets en Belgique ou vers l’étranger. A ce titre, les transporteurs doivent se faire enregistrer auprès de Bruxelles Environnement, sauf s’ils transportent leurs propres déchets et que la quantité de déchets transportée ne dépasse pas 500kg. Des enregistrements spécifiques seront nécessaires pour le transport de véhicules hors d’usage ou de déchets animaux. La liste des transporteurs de déchets se trouve sur le site de Bruxelles Environnement : https://app.bruxellesenvironnement.be/listes/?nr_list=CED0206

- Les
collecteurs, négociants et courtiers (CNC) : collectent, achètent, vendent des déchets, organisent la valorisation ou l’élimination de déchets pour un tiers, même sans prendre physiquement possession de ces déchets. Les CNC qui gèrent des déchets non dangereux doivent s’enregistrer (pour plus d’infos : https://environnement.brussels/thematiques/dechets-ressources/gestion-des-dechets/agrements-et-enregistrements/collecteur-negocia-0), et les CNC qui gèrent des déchets dangereux doivent obtenir un agrément (pour plus d’infos : https://environnement.brussels/thematiques/dechets-ressources/gestion-des-dechets/agrements-et-enregistrements/collecteur-negociant), auprès de Bruxelles Environnement.

- Les
installations de collecte et/ou traitement de déchets : collectent et/ ou préparent des déchets en vue du réemploi, valorisent, traitent, recyclent ou éliminent des déchets. Ces installations doivent obtenir un permis d’environnement, sauf dans certains cas (pour plus d’infos : https://environnement.brussels/thematiques/dechets-ressources/gestion-des-dechets/les-dechets-et-le-permis-denvironnement-7). Les différentes listes des installations autorisées en Région de Bruxelles-Capitale sont publiées sur le site de Bruxelles Environnement :

o Liste des installations de collecte et de traitement autorisées en RBC :
https://app.bruxellesenvironnement.be/listes/?nr_list=PE_COL_TRAIT_DECH_1

o Liste des installations de préparation en vue du réemploi autorisées en RBC : https://app.bruxellesenvironnement.be/listes/?nr_list=PE_COL_TRAIT_DECH_4


o Liste des installations ayant obtenu la fin de statut de déchet (il n’y en a qu’une à l’heure actuelle) : https://app.bruxellesenvironnement.be/listes/?nr_list=PE_COL_TRAIT_DECH_3
Ces opérateurs doivent rapporter à Bruxelles Environnement les quantités traitées et leurs modes de traitement mais ces informations ne peuvent être exploitées à des fins commerciales.

Bruxelles Environnement
et la Commission Interrégionale de l’Emballage (CIE) sont les acteurs publics chargés notamment et respectivement du contrôle de la gestion des déchets en général et des déchets d’emballages en particulier produits sur le territoire bruxellois.


Par rapport aux déchets belges retrouvés à l’étranger, notamment en Malaisie et en Turquie, vous signaliez que des efforts particuliers sont à fournir. Avez-vous réalisé une enquête sérieuse sur les responsabilités des différents acteurs ? Y-a-t-il des filières bruxelloises qui seraient concernées ?


Rappelons que ce qui semble être un problème lié aux déchets belges, n’est en réalité pas circonscrit à ceux-ci. Le port de sortie est le port d’Anvers mais ce dernier, comme le port de Rotterdam, est une plaque tournante pour les exportations de déchets en dehors de l’Europe. Beaucoup de conteneurs, d’origines diverses, transitent par ces ports.

Dans ce contexte, il est donc important de signaler que les déchets quittant le port d’Anvers ne sont pas tous des déchets d’origine belge. Ce constat ne résout cependant pas le problème des exportations de déchets en plastique en provenance des pays européens.

Les déchets principalement incriminés dans le reportage de “Question à la Une” de la RTBF pour exportation illégale sont des déchets de chutes de production, et non d’emballages, produits en dehors de la RBC.

De tels déchets plastiques sont cependant susceptibles d’être produits en RBC. Auquel cas, ils peuvent être traités en Belgique ou à l’étranger. Sur base des informations reprises dans la base de données relative aux déchets, nous pouvons confirmer que les déchets plastiques ne sont pas exportés directement de la RBC vers des pays hors Europe. Les déchets non dangereux (auxquels appartiennent les déchets plastiques) de la région sont collectés par des collecteurs/négociants/courtiers enregistrés et délivrés à des opérateurs dans notre région (afin d’être regroupés ou triés), ou à des opérateurs dans les autres régions belges ou dans les pays limitrophes (afin d’être regroupés, triés ou traités).

De plus, le Règlement CE n° 1013/2006 concernant les transferts de déchets exige une autorisation préalable pour le transfert transfrontalier vers d’autres pays (européen ou non) des déchets plastiques qui sont mélangés avec d’autres déchets (par exemple les déchets ménagers non triés). Aucune autorisation n’est délivrée pour un tel transfert par Bruxelles Environnement.


Si l’on s’intéresse spécifiquement aux déchets d’emballages en plastique, il faut rappeler que les déchets d’emballages ménagers belges sont recyclés à 100% en Europe et qu’il s’agit ici bel et bien de filières de recyclage et non pas d’autres formes de valorisation.

Pour ce qui est des déchets d’emballages industriels, une partie du flux quitte effectivement l’union européenne (munie des documents de transport nécessaires pour pouvoir quitter l’Europe), en vue de son recyclage et cette fraction fait l’objet d’un contrôle sévère. Par précaution, s’il y a le moindre doute quant au recyclage effectif de certaines de ces quantités, la Commission interrégionale de l’Emballage ne les acceptera pas dans les résultats belges.


L’agrément actuel de Valipac (entré en vigueur le 1er janvier 2017) a, qui plus est, instauré un régime particulier de vérification, aussi appelé « cartographie », pour les flux sortants, en provenance des contractants de Valipac. De cette façon, la vérification administrative de la destination des flux s’améliore systématiquement. Cela reste cependant un domaine pour lequel il faut veiller à préserver la confidentialité des informations. Ainsi, les contrôles ont lieu de façon aléatoire, par le biais d’analyses réalisées par Valipac et la CIE en concertation avec les sociétés exportatrices de déchets, à deux reprises durant la période de son agrément. Ces contrôles ont pour but de confronter les sociétés sur le terrain avec leur déclaration effectuée sur papier.

La CIE, quant à elle, a procédé jusqu’ici, une fois par agrément, à sa propre vérification sur le terrain.

Le Secrétariat permanent a récemment demandé à Valipac une avancée essentielle dans deux dossiers importants :

1. La cartographie de la seconde étape des filières de recyclage ;

2. Le rapportage confidentiel effectué par les traders.


Par ailleurs, la CIE étudie encore davantage aujourd’hui la possibilité de maintenir en Europe les déchets d’emballages et de développer une industrie de recyclage performante en Europe, voire en Belgique.

Pour encore mieux estimer et limiter les risques que les déchets bruxellois se retrouvent à l’exportation illégale, une collaboration interrégionale est indispensable.

Dans ce cadre, je peux vous annoncer qu’un accord de coopération entre l’Etat fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale portant coordination de la politique de transfert transfrontalier des déchets a été signé le 22 mai 2018. Le processus d’assentiment par loi, décrets et ordonnance est actuellement en cours.

Je compte cependant travailler sur l’aspect du contrôle de la législation environnementale dont les déchets font évidemment partie. Il s'agit d'améliorer le contrôle pour augmenter le degré de certitude que des déchets produits à partir de Bruxelles ne se retrouvent pas dans les exportations illégales. En toute honnêteté, on ne peut en avoir la garantie absolue aujourd'hui. Ce contrôle de la législation ne semble pas avoir été un point d’attention ces dernières années.


Qu’est-ce que le Gouvernement a prévu à ce jour pour ne pas qu’un tel scandale se produise à nouveau ?


Le sujet sera exploré avec les différentes parties prenantes.