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Question écrite concernant les logements modulaires au regard du CoBAT.

de
Viviane Teitelbaum
à
Pascal Smet, Secrétaire d'État à la Région de Bruxelles-Capitale, chargé de l'Urbanisme et du Patrimoine, des Relations européennes et internationales, du Commerce extérieur et de la Lutte contre l'Incendie et l'Aide médicale urgente (question n°124)

 
Date de réception: 02/03/2020 Date de publication: 23/04/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 21/04/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
13/03/2020 Recevable Bureau élargi du Parlement
 
Question    Citydev.brussels, en tant que propriétaire foncier régional et conscient de la problématique de la vacance des immeubles dans la Capitale, a décidé de s’inscrire dans une approche d’«activation» temporaire de ses sites en mobilisant au maximum les espaces disponibles dans les bâtiments et terrains en cours de reconversion.

C’est dans ce cadre et dans le cadre de la lutte contre le sans-abrisme, qu’ en décembre 2018, cinq projets de logements modulaires initiés par le secteur associatif et destinés aux sans-abris ont été sélectionnés par la Région bruxelloise pour permettre le développement d’habitats légers. Il s’agit là d’une manière innovante de répondre aux situations d’urgence sociale tout en mobilisant des espaces urbains délaissés.

Si le secteur est satisfait et enthousiaste de cette nouvelle possibilité, il se retrouve toutefois face à quelques difficultés pratiques, dues au manque d’encadrement juridique au vu de la nature atypique de ces constructions.

En effet, pour pouvoir bénéficier de ces terrains vacants, les porteurs de projets doivent répondre aux différentes législations telles que les permis et contrats de rigueur et différents autres critères dont:

- Une durée d’occupation nécessairement temporaire ( à 2 ans maximum) ;
- Une valeur ajoutée pour le quartier et les habitant.e.s ;
- Une complémentarité des projets entre les dimensions sociale, culturelle et économique ;
- Une implication des autorités communales.

Les friches mises à leur disposition par la Région le sont pour des périodes limitées dans le temps. Il s’agit souvent de terrains à bâtir en attente d’autorisations ou d’ouverture de chantiers, disponibles que pour quelques mois, au mieux quelques années.

Il est donc impératif, pour que ces associations puissent mener à bien leurs projets, que ces terrains vagues puissent être investis rapidement et que les permis soient autorisables pour des périodes plus variables. Or les nombreuses obligations administratives mettent parfois le projet même en péril ( au vu du de la période de disponibilité du terrain) et font perdre un temps précieux et beaucoup d’énergie qui pourrait être, dans leur cas, mieux investi dans l’accompagnement des sans-abris.

Le non-respect des délais pour les permis d’urbanisme et donc les retards systématiques jusqu’à la délivrance dudit permis mettent aussi les projets en péril.


S’il existe, aux articles 52 à 53
ter du CoBAT, une dérogation aux délais habituels pour les logements temporaires dans le cadre des permis d’environnement, rien de similaire n’existe à ce jour pour les permis d’urbanisme.

Ce qui entraine un cout financier et humain non négligeable pour les associations mais a également pour conséquence que des logements demeurent inoccupés alors que des personnes sans domicile, dans les conditions pour pouvoir y habiter, restent dans la rue.

Ce même problème se pose pour les demandes d’avis à introduire auprès du SIAMU. En effet, toute construction nouvelle demande d’obtenir un avis SIAMU. Une dispense est cependant accordée aux constructions de moins de 100 m
2. C’est généralement le cas des logements modulaires. Toutefois, vu qu’il s’agit d’un ensemble de plusieurs modules groupés, le SIAMU estime qu’il y a un risque lié, et demande tout de même d’introduire une demande d’avis dont le temps d’obtention est théoriquement de 30 jours – et généralement bien plus. S’il existe un cadre qui permettrait d’accorder une dispense systématique pour ce genre de logements, au niveau régional cela coince car la Région demande un avis pour ces ensembles.

Ensuite, il peut s’avérer que la friche soit disponible plus longtemps qu’initialement prévu. Dans ce cas, le permis limité dans le temps (2 ans maximum), sera périmé et la procédure devra redémarrer, ce qui implique encore des mois d’attente et un risque d’expulsion.

Par ailleurs, certaines affectations du PRAS ne permettent pas la délivrance de permis autorisant l’occupation temporaire de friches pour y mettre des logements (par exemple l’affectation « zone parc »). Le même problème se pose pour l’occupation temporaire de bureaux pour y installer des logements. La législation sur les changements d’affectation ne prend pas le sans-abrisme en compte.

Enfin, se pose également la question des autorités délivrantes. Un terrain vague peut, en fonction du cas appartenir à la Région ou à une commune. Le CoBAT prescrit que c’est le Collège des Bourgmestre et échevins qui délivre (sauf
s cas contraires ) dans la délivrance du permis. Or c’est ici la Région qui s’est engagée dans ce projet. Ce qui entraine une complication supplémentaire pour ces associations qui se retrouvent fort dépourvues face à ce flou administratif.

Monsieur le Ministre, au vu de ce qui précède, mes questions sont les suivantes :

- Pouvez-vous me dire si, à l’instar de ce qui se fait pour les écoles, on pourrait prévoir un mécanisme permettant de raccourcir des délais dans la remise de permis pour des logements modulaires de type temporaire ? Dans le cas contraire, pourriez-vous nous dire les raisons pour lesquelles cela n’est pas ?


- A l’instar de ce qui avait été établi pour les installations de conteneurs aménagés, pour les écoles, le Gouvernement entend-il permettre qu’un accord en amont soit fait avec les pompiers sur un cahier de charges régional pour ce type d’occupation, permettant ainsi une dispense systématique de l’avis mais aussi un gain de temps et une plus grande clarté des exigences au niveau régional ?

- La législation prévoyant des permis temporaires à seulement deux ans, quelles dispositions pourraient être mises en place pour maintenir l’autorisation d’occuper le terrain dans le cas où celui-ci reste disponible plus longtemps ?

- De même, que pourrait proposer la Région pour une reconversion temporaire de bureaux en logements pour lutter contre le sans-abrisme ?

- Dans le cadre du projet initié par city.dev, pourrait-on envisager de dispenser les projets pour des logements modulaires temporaires des conditions d’affectation prévues par le PRAS? Cela, dans le but de réduire le sans-abrisme et permettre une mise en œuvre de votre DPG qui prévoit de quadrupler les moyens pour l’aide structurelle.

- La Région est-elle en discussion avec les communes pour les inciter à rejoindre ce projet ? Quelles communes sont parties prenantes ? Comment cela se traduit-il pour les associations en recherche d’un terrain ? Peuvent-elles introduire leur demande directement à city.dev ou doivent-elles l’introduire en amont auprès des services communaux ? Si la commune refuse, quelle est la procédure?
 
 
Réponse    A titre liminaire, il convient de préciser que, depuis l’entrée en vigueur au 1er septembre 2019 de l’ordonnance du 30 novembre 2017 réformant le CoBAT, la procédure de délivrance de permis d’urbanisme est soumise à des délais de rigueur, de sorte que les retards relatifs à la délivrance de tels permis ne sont plus possibles.

Les articles 52 à 53bis de l’ordonnance relative aux permis d’environnement prévoient effectivement une procédure spécifique de délivrance de permis d’environnement pour les installations temporaires et pour les installations de classe ID.

En matière d’urbanisme, il faut distinguer l’ 
« arrêté du Gouvernement du 29 janvier 2004 relatif aux permis d’urbanisme à durée limitée » (article 102 du CoBAT) et l’arrêté dit « de minime importance » du 13 novembre 2008 concernant les travaux dispensés de permis, d’avis ou de l’intervention d’un architecte peut prévoir, quant à lui, des dispenses d’actes de procédure ou de permis d’urbanisme relatives à certains actes et travaux, même temporaires.

A l’heure actuelle, ces arrêtés prévoient ce qui suit :

A l’heure actuelle, les logements modulaires font l’objet d’un permis à durée limitée dont la durée maximale est de 15 à 20 ans selon la durée de l’amortissement (annexe 1, 9°). La procédure de délivrance de ce permis bénéficie, à condition que les logements soient destinés à accueillir temporairement les occupants d’habitation faisant l’objet de travaux de rénovation pendant la durée des travaux (rénovation d’un bâtiment accueillant des personnes sans-abris), des dispenses procédurales suivantes : dispense d’enquête publique, de commission de concertation et de l’avis du Fonctionnaire délégué ou de la commune. (article 4/1 de l’arrêté dit de minime importance).

Dans la pratique, les permis à durée limitée délivrés pour les logements modulaires n’excèdent souvent pas les deux ans afin d’éviter l’application de la réglementation PEB (article 2.2.1. du CoBRACE). Un permis à durée limitée pourrait néanmoins être délivré pour plus de deux ans, mais le demandeur de permis devra, alors, respecter la réglementation applicable en matière de PEB.

Il convient, en outre, de préciser que l’arrêté Dispense et l’arrêté relatif aux permis à durée limitée font l’objet d’une réforme dont les projets respectifs ont tous deux été adoptés en première lecture le 16 mai 2019.

Dans le cadre de la réforme de l’arrêté de minime importance et de l’arrêté relatif aux permis à durée limitée, il est prévu que soient soumis à permis à durée limitée l’accueil des personnes sans-abris (5 ans maximum) et la création de logements modulaires (15 à 20 ans selon la durée de l’amortissement) - annexe 1, 11° et 12°de l’arrêté.

Ces deux types d’actes et travaux bénéficient en outre, moyennant le respect de certaines conditions, de dispenses de permis d’urbanisme (pour l’accueil des personnes sans-abri de moins de six mois - articles 5, 2°, 70, 2° et 74, 3° du projet d’arrêté Dispense) ou de dispenses procédurales (pour les logements modulaires - articles 7, 72 et 76 du projet d’arrêté Dispense).

En outre, le projet de RRU prévoit que les logements modulaires ne sont pas soumis à l’application du Titre II du RRU (normes d’habitabilité).

L’élaboration d’une procédure accélérée supplémentaire ne semble pas nécessaire puisque le logement modulaire pourra déjà bénéficier de l’application de l’arrêté relatif aux permis à durée limitée et de l’arrêté de minime importance.

L’article 2, 5°, b) et 7°, c) de l’arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 18 octobre 2018 déterminant les actes et travaux soumis à permis d'urbanisme dispensés de l'avis préalable, de la visite de contrôle et de l'attestation de conformité du Service Incendie et d'Aide médicale urgente prévoit que sont dispensés d’avis SIAMU les actes et travaux suivants :

« 
5° les transformations et modifications suivantes apportées à un immeuble autre que ceux visés au 4° ci-dessus :
b) la construction d'un bâtiment
accessoire, isolé du bâtiment principal ou de ses annexes, et construit sur un seul niveau dont la superficie de plancher totale est inférieure à 100 m2;
7° les changements de destination ou d'utilisation suivants :
c)
la modification de la destination ou de l'utilisation d'un local ou de plusieurs locaux totalisant une superficie de plancher inférieure à 100 m2 ; »

Ainsi, l’hypothèse de la
construction d’un ensemble de logements modulaires sur un terrain en friche n’est pas visé par l’arrêté précité qui, en ce qu’il octroie des dispenses d’avis SIAMU doit être interprété de manière restrictive.

Mais un avis SIAMU est donc bien requis pour la création des autres projets concerné par la présente interpellation. Il en va de la sécurité des personnes qui y seront accueillies.

Dans les cas visés ici, l’avis de prévention du SIAMU doit être envoyé à l'autorité délivrant des permis et certificats
dans les 30 jours de la réception de la demande d'avis. (article 2 de l’arrêté du Gouvernement déterminant les délais d'envoi d'avis de Prévention d'incendie du SIAMU sur les demandes de certificat et/ou de permis d'urbanisme et de permis de lotir).

Néanmoins, la réalisation d’une coordination entre le SIAMU et l’Administration en charge de l’urbanisme doit effectivement intervenir afin de faciliter l’implantation des projets d’occupation temporaire sur le territoire bruxellois. Différentes pistes, dont votre suggestion de cahier des charges, seront explorées.

Comme soulevé plus haut, à l’heure actuelle, la construction de logements modulaires peuvent être délivrés pour une durée maximale de 15 à 20 ans selon la durée de l’amortissement.

Dans la pratique, les permis à durée limitée délivrés pour les logements modulaires n’excèdent souvent pas les deux ans afin d’éviter l’application de la réglementation PEB.

En outre et en tout état de cause, il convient de préciser que

· « 
Les actes et travaux pour lesquels un permis à durée limitée a été obtenu peuvent faire l'objet d'un nouveau permis à durée limitée ». Il appartient donc à l’auteur dudit projet de veiller à réintroduire, dans les temps, une nouvelle demande de permis d’urbanisme afin de s’assurer que son activité puisse perdurer au-delà du terme du premier permis d’urbanisme à durée limitée délivré ;

·
« Le fait de ne pas avoir entamé sa réalisation n'entraîne pas la péremption du permis. L'interruption pendant plus d'un an des travaux ou des actes autorisés n'entraîne pas la péremption du permis. » Dès lors, le permis à durée limitée ne peut se périmer.

Il ne peut être dérogé aux affectations prévues par le PRAS. Néanmoins :

· Concernant la modification de bureaux : La prescription particulière 7.1. du PRAS prévoit que les zones administratives sont affectées aux bureaux et
aux logements et aux équipements d'intérêt collectif ou de service public; dans ce cadre, il n’y a donc pas de problème au niveau du PRAS à modifier du bureau en structure accueillant les sans-abris.

· Concernant les zones de Parc : Le projet d’implantation de logements modulaires temporaires visant à accueillir des personnes sans-abri pourrait être considéré comme de l’équipement (analyse au cas par cas). Ces équipements devraient en outre respecter les conditions prévues par la prescription générale 0.7 du PRAS qui permet les équipement dans toutes les zones du PRAS mais qui protège, en effet et à juste titre, les zones vertes, les zones vertes de haute valeur biologique, les zones forestières, les zones de parcs et les zones agricoles, où les équipements ne peuvent être que le complément usuel et l'accessoire de leurs affectations .

Le CoBAT est très clair sur la question des compétences des autorités délivrantes (article 123). C’est le collège des bourgmestre et échevins qui est compétent pour délivrer les permis d'urbanisme. Il y a cependant quelques exceptions pour lesquelles le Fonctionnaire Délégué est compétent, donc la Région. Notamment :

· lorsqu'il est sollicité en totalité ou en partie par une personne de droit public désignée par le Gouvernement et à condition que les actes et travaux soient directement liés à l'exercice de ses missions;

Les personnes de droit publics concernées sont visées dans A.G. du 24 juin 1993.

La Société de Développement pour la Région de Bruxelles-Capitale (alias « Citydev ») en fait partie. Toute demande de permis d’urbanisme demandée par Citidev est donc traitée par le Fonctionnaire Délégué.

· lorsqu'il concerne en totalité ou en partie des
actes et travaux d'utilité publique déterminés par le Gouvernement;

Les actes et travaux d’utilité publique concernés sont visés dans l’A.G. du 12 décembre 2002.

Sont repris :
des logements sociaux, modérés et moyens visés à l'article 2, § 2, de l'ordonnance du 19 juillet 2003 portant le Code bruxellois du Logement à l'exception des logements donnés en location par une agence immobilière sociale visés au 2° et des logements achetés à l'aide d'un crédit hypothécaire octroyé par le Fonds du logement visé au 5° .

Donc, l’ensemble de ces éléments explique les raisons pour lesquelles les demandes de permis relatifs à la création de logements modulaires sont traitées par le Fonctionnaire délégué et non par la commune.

De plus, si les logements projetés sont destinés à accueillir temporairement les occupants d’habitation faisant l’objet de travaux de rénovation pendant la durée des travaux, la commune n’a pas voix au chapitre en matière de construction de logements modulaires, dans la mesure où l’arrêté de minime importance prévoit, à son article 4/1, que la construction de logements modulaires est dispensée, entre autres, de l’avis de la commune dans le cadre de la délivrance de permis d’urbanisme y relative.