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Question écrite concernant le rapport de l'auditeur du Conseil d'Etat au sujet de la zone de basses émissions.

de
Anne-Charlotte d'Ursel
à
Alain Maron, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de la Transition climatique, de l'Environnement, de l'Énergie et de la Démocratie participative (question n°254)

 
Date de réception: 16/03/2020 Date de publication: 03/06/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 03/06/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
18/03/2020 Recevable Bureau élargi du Parlement
 
Question    La presse faisait récemment état des conclusions apportées par le rapport de l’auditeur du Conseil d’État au sujet d’un recours déposé par une habitante de Genval à l’égard de la zone de basses émissions à Bruxelles. Dans les faits, celle-ci contestait que l’interdiction ne concerne que les voitures et non les camions et motos, ce qui constituait selon elle une discrimination injustifiée au regard des objectifs de lutte contre la pollution de l’air.

Le rapport de l’auditeur du Conseil d’État, qui ne constitue qu’un examen préliminaire et non une décision définitive, semble abonder en son sens et considère que l’interdiction de circulation des véhicules serait en effet bel et bien contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution qui prévoient l’égalité entre les citoyens et la non-discrimination. Ce rapport fait état de ces conclusions malgré l’annonce par le gouvernement, dans le plan ‘climat’ adopté en octobre 2019, d’inclure dès 2022 les deux-roues motorisés dans le champ d’application de la zone de basses émissions.

Si la lutte contre la pollution doit rester l’une des priorités des pouvoirs publics bruxellois, je m’interroge sur la discrimination qui est soulevée ici. Une moto est-elle aussi polluante qu’une voiture ? Les motos permettent de réduire la congestion automobile en occupant moins de place dans l’espace public ; elles favorisent donc une fluidification du trafic qui sert directement à une amélioration de la qualité de l’air. Disposez-vous des résultats de l’étude que vous avez initiée pour y répondre ? Quelle est la méthodologie que vous avez suivie ? Les camions étant déjà soumis à une taxe kilométrique, est-ce imaginable de les intégrer au dispositif de la zone de basses émissions sans leur imposer une double peine qui viendrait alors pénaliser injustement le monde de l’entreprise ?

Permettez-moi dès lors de vous poser les questions suivantes :

- Quelles sont les conséquences des conclusions du rapport à l’égard de la zone de basses émissions et de son avenir à Bruxelles ?

- Travaillez-vous à une adaptation du dispositif ? Dans quel sens ?

- Dans le cas d’une interdiction de circuler pour les camions de 3,5 tonnes, où en êtes-vous quant aux objectifs définis dans le plan ‘marchandises’ à l’égard des projets tels que LaMiLo, du développement de trams cargo ou de projets de livraison en triporteur électriques ?
 
 
Réponse    1)

Dans le cadre de ce recours en annulation devant le Conseil d’Etat, l’Auditeur a rendu son avis au début du mois de décembre 2019.

Nous avons analysé ce rapport attentivement et avons introduit un dernier mémoire en réponse le 2 janvier 2020.

Le rapport de l’Auditeur rejette l’ensemble des moyens invoqués par la requérrante, à l’exception de celui qui invoque une discrimination fondée sur l’exclusion des véhicules de marchandises de plus de 3,5 tonnes.

Ce moyen est jugé sérieux par l’Auditeur qui propose au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêté dans son ensemble.

Le problème réside dans le fait que la justification pour l’exclusion des + 3,5 t de la zone de basses émissions ne figure pas, selon l’Auditeur, de manière suffisamment claire dans le dossier administratif.

En effet, selon l’Auditeur, l’argument selon lequel le système Viapass applicable à ces véhicules justifierait cette exclusion n’apparaît pas suffisamment étayé (absence d’étude démontrant l’effet environnemental du Viapass), d’une part, et le rapport sur les incidences environnementales réalisé dans le cadre de l’adoption du PACE et la DPR n’excluraient pas un cumul des deux systèmes (LEZ et Viapass) pour les véhicules, d’autre part.

Eut égard au rapport de l’Auditeur, il existe un risque d’annulation de l’arrêté dans son ensemble par le Conseil d’Etat.

Afin de prévenir les effets d’une telle annulation, le Gouvernement a approuvé un projet d’arrêté modificatif qui clarifie la dérogation pour les + 3,5 t et inclut la motivation de cette dérogation dans le dossier administratif.

Ce projet est en cours d’adoption par le Gouvernement.


2)

Une extension de l’application de la LEZ aux poids lourds ou aux deux-roues ne peut pas s’improviser.

Cela doit se baser notamment sur une analyse de l’impact sur le volume de véhicules concernés, le profil socio-économique des propriétaires (afin de prévoir des mesures d’accompagnement), l’impact environnemental de la mesure, etc.

Pour les deux-roues, une série de questions opérationnelles doivent également être étudiées, portant par exemple sur la qualité des données environnementales dans la base de données de la DIV, ou la couverture du réseau de caméras ANPR et leur capacité à lire les plaques arrières des véhicules.

C’est pourquoi, dans l’immédiat et afin de veiller à la pérennité du dispositif de la LEZ actuelle, ce projet de modification de l’arrêté vise donc à maintenir la dérogation pour les véhicules de +3,5 t, dès lors que ces derniers sont soumis à une mesure (le prélèvement kilométrique) qui vise – entre autres – le même objectif que la LEZ, c’est-à-dire, l’amélioration de la qualité de l’air à travers la stimulation du renouvellement du parc et ce par le principe polleur-payeur.

Par ailleurs, après 4 ans d’existance, l’effet de VIAPASS sur le renouvellement du parc est bien démontré.

Toutefois, ce Gouvernement a des ambitions fortes en matière de lutte contre la pollution de l’air et le climat, notamment à travers la sortie du diesel et de l’essence et le projet de réforme de la tarification automobile.

C’est dans ce cadre que le Gouvernement envisagera les mesures à mettre en place ou à renforcer concernant les véhicules motorisés, y compris les poids lourds et les deux-roues motorisés.

Ainsi, une étude, commandée par Bruxelles Environnement, Bruxelles Mobilité et Bruxelles Economie et Emploi est en cours et vise à analyser l’impact d’une sortie du diesel/essence sur différents aspects (sur l’environnement, l’énergie, la mobilité, l’économie,…).

Cette étude vise à proposer une roadmap pour la mise en place de cette transition et à consolider la justification des nouveaux jalons à définir pour la LEZ pour la période 2025-2035 – y compris les perspectives pour les deux-roues et les poids lourds.

Les résultats de cette étude sont attendus à la fin de cette année.


3)

Dans le cadre du PNEC, qui fixe les ambitions de la Région en matière de décarbonation, il n’est pas prévu d’interdire les camions 3,5 tonnes.

Par contre, l’étude pré-citée analysera la transition de ce type de véhicules vers des technologies « zéro-émissions ».

Une des possibilités évoquées dans le PNEC est également l’instauration de zones « zéro-émissions » au cœur de la Région.

Dans ce contexte, qui n’est pas encore étudié pour le moment, une forte collaboration avec Bruxelles Mobilité serait nécessaire pour mettre en place les solutions pour les livraisons de proximité en véhicules zéro-émissions, tels que des vélos triporteurs.