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Question écrite concernant la lutte contre la prolifération des hébergements touristiques illégaux à Bruxelles dans le cadre de la crise du COVID-19.

de
Geoffroy Coomans de Brachène
à
Rudi Vervoort, Ministre-Président du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, chargé du Développement territorial et de la Rénovation urbaine, du Tourisme, de la Promotion de l'Image de Bruxelles et du Biculturel d'intérêt régional (question n°259)

 
Date de réception: 27/05/2020 Date de publication: 11/08/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 04/08/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
16/06/2020 Recevable p.m.
 
Question    Le nombre de nouveaux hébergements touristiques a été décuplé à Bruxelles, grâce au développement de nouvelles plateformes numériques, comme AirBnB notamment. Malheureusement, la plupart de ces hébergements restent à ce jour illégaux.

Une situation qui créée des problèmes à plusieurs égards.

Tout d’abord, ces nouveaux hébergements touristiques créent une nette distorsion de concurrence avec le secteur hôtelier traditionnel, qui lui est soumis à des contrôles, taxes spécifiques et lois sociales. Par ailleurs, nombre de ces locations touristiques ne sont que des transformations illicites de logements. Il en résulte une raréfaction de l’offre pour les Bruxellois qui ont plus de difficultés à trouver un logement à louer puisqu’une partie de ceux-ci sont purement et simplement retirés du marché locatif classique.

Ce qui entraine de nombreuses familles à devoir quitter notre Région pour parvenir à trouver un logement (ce qui allonge d’ailleurs les temps de parcours, et les embouteillages...). Les riverains de ces appartements transformés en hébergements touristiques se plaignent de nombreuses nuisances sonores liées à la présence de voisins parfois bien peu respectueux et peu soucieux du contrôle social.

Les autorités communales et régionales enfin sont victimes de ces changements d’affectation puisque ce type d’hébergements ne paient quasiment aucune taxe, de même que les propriétaires en infraction. A contrario les familles domiciliées paient des impôts et contribuent aux budgets communaux et régionaux.

Ainsi, en vertu des informations qui précèdent, je souhaiterais obtenir des précisions sur les éléments suivants :

1. Pouvez-vous me dire le nombre d’hébergements touristiques déjà fermés par les autorités régionales depuis la mise en application de l’arrêté de mars 2016 ?

2. Parmi ces fermetures, pouvez-vous me dire combien ont été fermés depuis le 1
er janvier 2020 ?

3. Quelles mesures avez-vous pris ces dernières semaines afin d’accélérer la fermeture de ces hébergements touristiques illégaux ?

4. De combien d’inspecteurs disposez-vous actuellement au sein de la cellule régionale de contrôle ?

5. Ces inspecteurs ont-ils été impactés par la crise pour le bon suivi de leurs contrôles?

6. Des contrôles sont-ils encore effectués depuis le début des mesures de confinement ?

7. Disposez-vous de chiffres détaillés sur les hébergements touristiques illégaux par quartier ? Et parmi l’ensemble, ceux qui ont déjà été fermés ou ont fait l’objet d’un contrôle ?

8. Dans le cadre de ces contrôles, avez-vous priorisé certaines zones ou certains types d’hébergements ?

9. Alors que l’Arrêté est rendu obligatoire depuis plus de 4 ans, comment se fait-il que tant d’hébergements touristiques illégaux restent encore disponibles à la location sur les plateformes de réservation ? (AirBnB, Booking, TripAdvisor,…)
 
 
Réponse    Depuis le début des contrôles sur le terrain, le 16/11/2016, jusqu’au 18/03/2020, Bruxelles Economie et Emploi (BEE) a :

- ouvert un total de 1.234 dossiers, ventilés comme suit :

o 26 dossiers d’inspection relatifs à des procédures d’enregistrement en cours et ayant pour but d’instruire les dossiers des demandes (p. ex. catégorie exacte dans laquelle enregistrer l’hébergement) ;
o 345 dossiers relatifs à des inspections postérieures à l’enregistrement. Pour rappel, l’ordonnance prévoit un contrôle obligatoire de chaque hébergement enregistré dans un délai de 12 mois suivant l’enregistrement ;
o 863 dossiers d’inspection relatifs à des hébergements touristiques non enregistrés et donc en infraction.

- réalisé 1.226 visites sur place dans le cadre de son action ;

- établi 386 procès-verbaux pour infraction à la réglementation en vue de l’infliction d’amendes administratives aux contrevenants.

BEE a finalement ordonné la cessation immédiate d’activités de 47 hébergements touristiques. Dans 8 cas, cet ordre n’a pas été respecté par l’exploitant de l’hébergement touristique visé et un nouveau procès-verbal a été dressé.

Néanmoins, à ce jour, aucune exécution forcée par l’apposition de scellés n’a dû être menée, les exploitants s’étant enregistrés ou ayant cessé d’eux-mêmes leurs activités.

Ce nombre peut certes paraître faible par rapport aux nombreux hébergements touristiques mis en location sur les plateformes de réservation auxquelles vous faites référence.

Toutefois, ordonner une cessation immédiate d’activités est une sanction lourde qui ne peut être utilisée que dans le respect du principe de proportionnalité. Dès lors, seuls les cas les plus sérieux font l’objet de cette procédure spécifique, à savoir les cas dans lesquels l’exploitant est dans l’incapacité de démontrer que son hébergement est conforme aux normes de sécurité en matière de protection contre l’incendie.

Dans le cas spécifique des biens mis en location via les plateformes de réservation, à savoir, pour utiliser les catégories définies dans l’ordonnance du 8 mai 2014, les résidences de tourisme et les hébergements chez l’habitant principalement, il faut bien constater qu’une part importante de ceux-ci ne nécessite que de simples attestations de conformité des installations de chauffage, de gaz et d’électricité dont le plus souvent, les exploitants disposent. Ces cas ne font donc pas l’objet d’une procédure de cessation immédiate d’activités mais d’une simple procédure d’imposition d’une amende administrative. Il convient toutefois de signaler que le défaut principal de ces hébergements relève le plus souvent d’une absence d’enregistrement.

Outre ces cessations immédiates d’activités, il me semble néanmoins qu’il faut tenir compte également des cessations
volontaires d’activités d’exploitants non enregistrés qui, suite à l’intervention des inspecteurs, ont de leur propre initiative mis fin à leur activité. A ce jour, 390 annonces relatives à des hébergements touristiques non enregistrés ont été retirées des sites de réservation en ligne et 224 déclarations d’activité en vue de l’enregistrement ont été introduites à la suite de l’action de contrôle.

Si l’on considère maintenant la seule période du 01/01/2020 au 18/03/2020, comme vous le demandez, Bruxelles Economie et Emploi a ordonné la cessation immédiate d’activités de 4 hébergements touristiques.

Comme déjà souligné précédemment, le contrôle du respect des dispositions de l’ordonnance du 8 mai 2014 est assuré par la Direction de l’inspection économique de BEE. A ce jour, 6 inspecteurs sont chargés de la recherche et du constat d’infractions à la réglementation, activité allant de la recherche des hébergements touristiques non enregistrés au contrôle sur place du respect des conditions d'exploitation des hébergements enregistrés.

Eu égard aux mesures sanitaires prises par le Gouvernement fédéral, les contrôles
in situ par les inspecteurs ont été suspendus jusqu’à nouvel ordre, d’une part dans une optique de protection de la santé de ces agents et d’autre part compte tenu de la quasi-disparition de toute activité effective dans les hébergements touristiques. Néanmoins, les agents en charge de cette matière ont mis ce temps à profit afin de parcourir les plateformes de réservation en ligne et de relever les hébergements touristiques non enregistrés annoncés sur ces plateformes. Ces recherches seront mises évidemment à profit lorsque les enquêtes et visites in situ reprendront.

En ce qui concerne les chiffres détaillés sur les hébergements touristiques illégaux par quartier, je peux vous informer que dans le cadre de la mission d’évaluation de l’ordonnance du 8 mai 2014, une étude a été réalisée et une cartographie de la répartition territoriale des biens mis en location sur la plateforme Airbnb en 2017 a été réalisée.

Ses enseignements sont que l’offre d’hébergements touristiques de type résidence de tourisme touche l’ensemble de la Région de Bruxelles-Capitale, avec une concentration très importante dans le Pentagone et la première couronne Sud/Est (entre le quartier européen et le bas de Saint-Gilles) et une présence plus diffuse mais réelle dans le sud d’Ixelles, dans l’est d’Etterbeek, à Schaerbeek, mais aussi à Forest et Uccle.

En ce qui concerne les priorités en matière de contrôle, trois types de situation sont traitées prioritairement par les agents, à savoir :

- les plaintes formulées par des clients au sujet d’hébergements touristiques, enregistrés ou non ;
- les plaintes formulées par des tiers, le plus souvent des voisins ou copropriétaires, affectés par les nuisances générées par ce type d’activités ;
- les hébergements touristiques ne pouvant pas démontrer respecter les normes en matière de protection contre l’incendie. Ces cas sont portés à la connaissance des inspecteurs soit par la Cellule Enregistrement de BEE, soit par les services communaux en charge de la délivrance des attestations de sécurité incendie.

En ce qui concerne la recherche d’hébergements touristiques non enregistrés actifs sur les plateformes de réservation, la répartition du travail est réalisée sur une base spatiale, chaque agent étant chargé de plusieurs communes, à l’exception de la zone du Pentagone que les inspecteurs et inspectrices se partagent selon différents quartiers.

En ce qui concerne votre dernière question, il s’avère que la faible coopération de la part des plateformes de réservation et la protection de l’identité des annonceurs, et sur certaines d’entre elles de la localisation du bien, rend le travail très ardu, nécessitant parfois de longues enquêtes pour parvenir à identifier les exploitants.

Le fait que ces plateformes ne se considèrent pas tenues de vérifier si les annonceurs respectent les règles de la région ou du pays où ils exercent (en termes d’enregistrement notamment) a pour conséquence une prolifération inquiétante pour notre Région de ces hébergements touristiques illégaux. Ce thème sera d’ailleurs, parmi d’autres, un des sujets abordé dans le cadre de notre processus de révision de l’ordonnance du 8 mai 2014 sur l’hébergement touristique.