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Question écrite concernant la réinsertion des anciens détenus par le travail.

de
Bianca Debaets
à
Bernard Clerfayt, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de l'Emploi et de la Formation professionnelle, de la Transition numérique, des Pouvoirs locaux et du Bien-Être animal (question n°514)

 
Date de réception: 30/10/2020 Date de publication: 16/12/2020
Législature: 19/24 Session: 20/21 Date de réponse: 15/12/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
19/11/2020 Recevable p.m.
 
Question    Les anciens détenus manquent souvent de moyens à leur sortie. Pour les justiciables bénéficiaires du revenu d’intégration sociale, il faudra faire avec les procédures des CPAS et attendre la décision du conseil de l’action sociale. Il en découle souvent une absence de revenu le premier mois de la sortie, voire beaucoup plus longtemps. La meilleure façon de se réinsérer dans la société est d’intégrer rapidement le marché du travail.

L’accord de gouvernement contient le passage suivant sur la réinsertion des détenus à Bruxelles : « Pour contribuer à la réinsertion sociale réussie des détenus, le gouvernement renforcera les services d’aide aux justiciables et poursuivra les projets visant la création de solutions de logements adaptées pour prévenir le sans-abrisme de ces personnes en fin de détention. D’autres projets doivent être mis en place ou amplifiés en vue de la sortie de prison (emploi, formations, enseignement, permanence pour la distribution de kit de sortie, etc.). Le gouvernement poursuivra la mise en œuvre du plan stratégique de 2014 grâce à des plans annuels définis avec le secteur. »

Je voudrais dès lors vous poser les questions suivantes :

- Quels programmes ou projets financez-vous afin d’aider les (anciens) détenus à trouver du travail ou à suivre une formation ? Le cas échéant, quelles formations ? Comment se déroulent-elles ? Quel budget le gouvernement met-il à disposition à cette fin ?

- Combien de détenus sont-ils suivis en 2019 et 2020 par Actiris, d’une part, et le VDAB Brussel/BF, d’autre part, dans le cadre de la réinsertion sur le marché du travail ou des projets précités ? Quel a été l’effet de la crise du coronavirus ? Pouvez-vous également ventiler par catégorie d’âge, sexe, rôle linguistique, nationalité ?

- Qu’est-il convenu avec les établissements pénitentiaires pour le suivi des détenus libérés ? De quel nombre parle-t-on ? Un service spécifique s’occupe-t-il de cette question au sein d’Actiris ? Les anciens détenus sont-ils aussi immédiatement réinscrits sur le marché du travail ?

- Quand une évaluation est-elle prévue ? Pouvez-vous nous expliquer les programmes ou projets concernés ?

- Envisagez-vous des mesures supplémentaires de réinsertion sociale des détenus dans le cadre de vos compétences, et conformément à l’accord de gouvernement ? Avez-vous demandé à view.brussels d’étudier plus avant le sujet ?

- Dans quelle mesure collaborez-vous avec le gouvernement fédéral, la Cocom et les Communautés à cet égard ?

- Comment assurez-vous le suivi du fonctionnement des organisations concernées, telles que Dispositif Relais, Casablanco et JES, à cet égard ? Comment sont-elles impliquées dans la politique globale en la matière ?
 
 
Réponse    Dans le cadre du Plan de Formation 2020, il est prévu le renforcement de la formation et de la validation des compétences des détenus.

Depuis 2017, Bruxelles Formation et l’Enseignement de Promotion sociale collaborent au développement du Plan Prison, un plan d’actions qui promeut une augmentation des actions de formation et de validation des compétences au bénéfice des détenus et ex-détenus bruxellois.

La collaboration des différents acteurs de terrain (Bruxelles Formation, Enseignement de Promotion sociale, asbl Adeppi - Atelier d’éducation permanente pour personnes incarcérées - et asbl Après) a permis, depuis 2017, de former chaque année entre 400 et 500 détenus dans des formations en alphabétisation, en langues (anglais, français et néerlandais), en informatique ou encore dans les domaines de l’esthétique et de la gestion d’entreprise.

En 2019, 439 stagiaires ont été formés dans les prisons bruxelloises dans le cadre de ce Plan par les asbl Adeppi, Après et l’Enseignement de Promotion sociale (Cours Erasme, Institut Roger Lambion et Institut Jeanne Toussaint).

Les formations de base ‘Français débutant’, ‘Suite Office’ et ‘Néerlandais’ ont été celles qui ont été suivies par le plus de stagiaires.

Les modules de formation données par l’Enseignement de Promotion sociale (connaissance en gestion de base, aide polyvalent en restauration de collectivité et technique de coiffure) ont donné lieu à une certification. 15 attestations de réussite ont été délivrées aux détenus en 2019 dans ce cadre. Celles-ci sont valorisables sur le marché du travail ou pour poursuivre la formation hors des murs.

Les frais de partenariats comptabilisés par Bruxelles Formation pour 2019 s’élèvent à 136.000€.

Bruxelles Formation ne verse pas d’indemnités de formation aux détenus. C’est la Régie pénitentiaire qui octroie une prime de formation aux détenus qui suivent une formation qualifiante.


De plus, BF espaces numériques a lancé en 2019 un projet pilote d’e-learning en prison en partenariat avec la Direction de l'enseignement à distance de la Fédération Wallonie-Bruxelles (EAD), la Direction régionale Sud des établissements pénitentiaires (EPI) et les asbl Adeppi et Après.

Ce projet est actuellement testé dans la prison de Forest) et en Wallonie (prisons d’Arlon, Leuze et Marche).

A côté de l’offre de Bruxelles Formation (Excel, calcul, Word et français), on retrouve une part du catalogue de l’Enseignement à Distance de la Communauté française et quelques modules du Forem. Le dispositif a été lancé en juin 2019 pour une période pilote de deux années à l’issue de laquelle il sera évalué.

Le Plan Prison arrivant à son terme en décembre 2020, un nouveau Plan sera élaboré sur base des expériences et leçons apprises du Plan précédent, en poursuivant la collaboration entre Bruxelles Formation, l'Enseignement de Promotion Sociale et l'Administration Générale des Maisons de Justice. Un nouveau chargé de mission sera recruté par Bruxelles Formation et l’Enseignement de Promotion sociale dans les meilleurs délais.

En attendant le nouveau Plan, il est prévu pour 2021 de reprendre l’offre 2020 à l’identique.


En ce qui concerne l’accompagnement des détenus à leur sortie, et dans le cadre de la mesure de partenariat ‘Accompagnement de publics spécifiques’ (APS) d’Actiris, l’’asbl Après’ (accompagnement en français) et l’’asbl Groep Intro’ (accompagnement en néerlandais, français et anglais) accompagnent depuis 2009 des chercheurs d’emploi détenus (à la fin de leur peine de prison) et des ex-détenus vers le marché du travail.

Le partenariat s’est étendu depuis 2017 à trois nouveaux Partenaires: le ‘Dispositif Relais’, ‘Casablanco vzw’ et ‘Jes vzw’.

Le budget alloué pour l’accompagnement des (ex) détenus à leur sortie s’élève à 725.000 EUR.


Bruxelles Formation ne dispose pas de données systématiques et complètes concernant l’âge, le genre, la langue et la nationalité des stagiaires, formés en prison.


L’organisation des formations en prison a été rendue très difficile par la crise sanitaire.

Bruxelles Formation est en train de faire un bilan avec ses différents partenaires afin d’obtenir une image précise du réalisé 2020. La crise sanitaire a bien entendu eu des effets, qui s’ajoutent aux difficultés préexistantes liées au milieu carcéral (manque de places, locaux non adaptés). Les activités collectives de formation ont été mises à l’arrêt en raison du premier confinement et la reprise de ces activités s’est souvent heurtée à la difficulté de mettre en œuvre les mesures sanitaires de prévention (manque de produits de nettoyage, petite taille et mauvaise aération des locaux, etc.). De nouvelles sessions qui devaient démarrer au cours de cette année sont toujours en suspens.


Au niveau de l’accompagnement des ex-détenus dans le cadre du partenariat Actiris, 524 (ex-)détenus ont été accompagnés au cours de l’année 2019 par les 5 Partenaires pré- cités.

Concernant les statistiques disponibles, l’âge moyen varie selon le dispositif partenaire : les ¾ des personnes suivies par ‘Dispositif Relais’ ont moins de 30 ans contre 20 à 35 % chez les autres partenaires.

On constate également une surreprésentation des hommes (95 à 100 %), sauf chez ‘Jes vzw’, où le rapport homme/femme s’élève à 60/40.

Le pourcentage de personnes ayant une nationalité hors Union Européenne varie entre 35 et 50 %.

345 ex-détenus ont été accompagnés entre janvier et juillet 2020 contre 447 sur la même période en 2019.

Cette baisse s’explique par l’impact de la crise du coronavirus. En effet, le suivi dans les locaux des partenaires n’a pas été possible pendant quelques mois et le suivi à distance est plus compliqué à organiser vu que les détenus ne pouvaient utiliser un téléphone que de manière limitée.

Le contact avec les Institutions pénitentiaires, les avocats... n’était pas non plus évident.


Comme mentionné précédemment, un Partenariat ‘Accompagnement de publics spécifiques’ (APS) existe entre Actiris et 5 asbl pour l’accompagnement des ex détenus. Tous les partenaires, sauf ‘Casablanco’ (qui rencontrent les ex-détenus lorsqu’ils sont en congé pénitentiaire), conseillent les détenus qui le veulent sur leur parcours d’accompagnement. Ils réalisent avec eux un bilan, élaborent un projet professionnel le plus concret possible et recherchent une offre de formation, ou une offre d’emploi qui répond à leurs besoins et leurs compétences.

Une telle offre concrète fait partie du Plan de reclassement présenté au ‘Tribunal de l’application des peines’, qui décide de la libération sous condition. Sans cette offre, les chances de libération conditionnelle sont minimes.

Dès qu’un détenu accepte de suivre un accompagnement chez un des partenaires et n’est pas encore libéré sous conditions, il est déjà inscrit auprès d’Actiris ; ce qui permet ainsi d’avoir les informations nécessaires quand il bénéficiera de la libération conditionnelle.


La mesure de partenariat APS est actuellement évaluée, tant au niveau qualitatif que quantitatif. Aussi bien les services d’Actiris que les partenaires sont associés étroitement à cette évaluation.

Les résultats de l’évaluation reprendront aussi des pistes et recommandations pour le projet de la nouvelle mesure APS qui débutera le 1er janvier 2022 et dont l’appel à projets est prévu au cours de 2021.


Les actions d’intervention en milieu carcéral sont concertées et coordonnées dans le cadre d’une Conférence interministérielle francophone visant la coordination des politiques d’intervention en lien avec le milieu carcéral, dite ‘CIM Prison’, prévue par un Accord de coopération signé le 29 mars 2018 entre la Région Wallonne, la Fédération Wallonie Bruxelles et la COCOF.

Elle a pour objectif d’évaluer et de stimuler la coordination des politiques menées avec le milieu carcéral dans 7 domaines : Culture - Sport - Psychosocial - Action sociale - Santé - Enseignement de promotion sociale (EPS) - Formation professionnelle. Elle s’est réunie récemment le 2 décembre dernier.

D’autre part, un protocole de collaboration entre la Région Wallonne, la Région de Bruxelles Capitale, la Fédération Wallonie Bruxelles et la COCOF a été signé le 22 mai 2019 afin de favoriser la continuité des parcours de formation et de validation des compétences de détenus transitant par les prisons bruxelloises vers les prisons wallonnes. Un plan d’action conjoint sera mis en place en 2021 avec les administrations concernées.

Je n’ai jamais eu de contact avec mes homologues de la Région flamande à ce sujet. Je suis bien évidemment prêt à travailler avec eux pour développer des projets comme je le fais avec la Région wallonne et la Fédération Wallonie-Bruxelles.


Des contacts réguliers ont lieu entre tous ces partenaires et le Département Partenariat d’Actiris pour discuter de tous les aspects liés à la mise en œuvre des projets d’accompagnement : les difficultés traversées par le groupe cible sur leur parcours d’insertion, les procédures existantes au sein d’Actiris ou d’autres organismes, les lacunes sur le plan de l’offre en formation... ceci afin de dégager des réponses concrètes aux problèmes de terrain.