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Question écrite concernant le trafic des chiots.

de
Dominique Dufourny
à
Bernard Clerfayt, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de l'Emploi et de la Formation professionnelle, de la Transition numérique, des Pouvoirs locaux et du Bien-Être animal (question n°535)

 
Date de réception: 16/12/2020 Date de publication: 03/02/2021
Législature: 19/24 Session: 20/21 Date de réponse: 08/01/2021
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
18/12/2020 Recevable p.m.
 
Question    Volés, élevés en batterie, Importés illégalement, vendus avec de faux documents. Les chiots sont l’objet de toutes sortes de trafics, tout simplement parce qu’ils génèrent un chiffre d’affaire exorbitant. Victimes de leur succès, ils paient au prix fort la course au profit d’individus sans foi ni loi.

En Belgique, 1,5 millions de chiens et 2,2 millions de chats résident dans nos foyers. Si une partie de ces animaux ont été adoptés dans un refuge ou achetés chez un éleveur correct, c’est-à-dire, qui tient compte du bien-être de ses animaux, énormément de personnes font l’acquisition d’un chiot auprès d’un mauvais éleveur. Généralement, il s’agit d’un importateur de chiots d’Europe de l’Est – ce qu’on appelle un éleveur intensif –, qui commercialise un grand nombre de races.

Arrachés à leur univers de bruit et de pestilence, les chiots sont vaccinés à la chaine tandis que leurs mères sont traitées comme des machines à reproduire, que ce soit en Belgique ou en Europe de l’Est. Ces éleveurs ne se soucient pas de la santé de l’animal… Les carnets de vaccination s’entassent dans les bureaux et seront triomphalement mis sous le nez des acheteurs pour leurs garantir que le chiot est parfaitement protégé et qu’il est tranquille pendant un an au niveau de la santé, jusqu’aux rappels de vaccination. La réalité est moins idyllique… Toujours pour maximiser les profits, il s’agit de vaccins périmés, voire des copies de vaccins qui ont été utilisés. Moyennant quoi, l’animal est très imparfaitement protégé et peut contracter de la giardiase (qui se manifeste par des diarrhées sanglantes), de la toux du chenil, de dermatophytoses et de la parvovirose.

Ceci explique pourquoi la majorité des chiots fournis par ces circuits atterrissent pour des pathologies lourdes chez les vétérinaires, peu après avoir été acquis par des propriétaires peu avertis. Le praticien découvre aussi des tares, appelées vices rédhibitoires, dues à l’absence de sélection en élevage et des troubles du comportement qui empoisonnent la vie du chien comme celle de ses maîtres. En général, ces derniers s’attachent instantanément à leur petit animal, attachement qui ne fait que croître au fur et à mesure qu’ils découvrent ses misères. Et malgré les soins prodigués, trop souvent hélas, on ne peut rien faire pour sauver le chiot malade et épuisé.

Un mot du voyage qui l’a mené de son pays de naissance à la Belgique… Le carburant est cher, donc il faut rentabiliser chaque transport au maximum. Les chiots sont donc entassés dans des cages et sans eau ni nourriture et pendant une vingtaine d’heures, ils vont être secoués dans une camionnette pressée d’arriver à destination.

Et il n’est pas question de voyager en véhicule agréé : cela reviendrait plus cher et surtout, les livraisons discrètes à des éleveurs qui prétendent avoir produit les portées chez eux se remarqueraient davantage. Certains « élevages familiaux » se font livrer une cinquantaine de chiots tous les mois… Le stress, la déshydratation, le contact avec des animaux malades induisent un nombre de morts conséquents. C’est cela la triste réalité du trafic des chiots…

Dès lors, Monsieur le Ministre, je souhaiterais aborder avec vous les éléments suivants :

1. Êtes-vous au fait de cette problématique?

2. Combien de transports illégaux de chiots destinés à la Belgique ont-ils été interceptés de 2018 à ce jour ?

3. Combien de transports légaux de chiots ont-ils été contrôlés au cours de ces mêmes années ? Dans combien de cas une fraude relative aux passeports a-t-elle été constatée ?

4. Qu’avez-vous entrepris pour parvenir à une solution efficace dans la lutte contre le trafic des chiots en Région bruxelloise ? Avez-vous des contacts avec vos homologues flamant et wallon sur ledit problème ? Dans l’affirmative, quelles ont été les conclusions ?

5. Est-ce-que les polices judiciaire et administrative collaborent-elles synchroniquement avec le conseil du bien-être animal en matière de trafic des chiots?

6. Comment recherche-t-on activement la « mafia des chiens» ? Estime-t-on qu'on dispose de suffisamment de collaborateurs pour contrôler la situation actuelle ?

7. De quelle manière les passeports des animaux et les certificats de vaccination sont-ils protégés contre la falsification ?

8. Pouvez-vous m’indiquer si vous êtes favorable à une harmonisation du système d’identification et d’enregistrement au niveau européen? Le cas échéant, y a-t-il concertation sur le sujet avec vos homologues wallon et flamand, ainsi qu’avec les autorités européennes, pour faire avancer le dossier en ce sens?

9. Est-ce-que montant de l’amende est-elle suffisamment dissuasive pour étouffer le trafic illicite avec efficacité ?

10. Combien de plaintes le conseil du bien-être animal ont-ils reçues depuis 2018 pour des chiots illégalement importés et des passeports canins falsifiés ?
 
 
Réponse    La région de Bruxelles-Capitale compte 7 éleveurs de chiens, qui sont tous des « éleveurs amateurs » ce qui signifie qu’ils ne commercialisent pas plus de dix portées de chiens par an et peuvent uniquement commercialiser les portées issues de leur propre élevage. Jusqu'à présent, ces éleveurs n'ont pas été reconnus coupables des infractions que vous mentionnez.

Aucun « éleveur commerçant » n’est enregistré en Région de Bruxelles-Capitale (c’est-à-dire un éleveur qui commercialise des portées issues de son propre élevage et d’autres élevages que le sien).

En ce qui concerne le nombre de transports interceptés depuis 2018, je ne dispose pas de cette information. Les transports illégaux en provenance d'autres pays devraient logiquement être interceptés aux postes de contrôle frontaliers. En l'absence de frontières avec d'autres pays, la Région de Bruxelles-Capitale ne dispose pas de tels points de contrôle et aucun transport routier illégal n’a été intercepté.

Le contrôle de la fraude relative aux passeports européens relève du SPF Santé publique, sécurité de la chaîne alimentaire et environnement et non du bien-être animal.

Afin de lutter contre ce trafic, l'arrêté royal du 27 avril 2007 relatif aux conditions d'agrément des établissements pour animaux et aux conditions d'échanges d'animaux a été modifié en 2018 et prévoit ce qui suit:
- depuis le 01/10/2019, les informations obligatoires à inclure dans la publicité en vue du commerce d'animaux ont été étendues.
- à partir du 01/01/2021, il ne sera plus permis en Région de Bruxelles-Capitale de proposer ou d'exposer des chiots (et chatons) à la vente en l'absence de leur mère.

Il s’agit de mesures adoptées conformément à l'une des recommandations du "Sous-groupe d'initiative volontaire sur la santé et le bien-être des animaux de compagnie (chiens) dans le commerce", un groupe de travail composé de représentants de divers pays européens, dont l'objectif est de mieux réglementer le commerce européen de chiots et aussi d'informer correctement les acheteurs potentiels. Bruxelles Environnement ainsi que les administrations régionales wallonne et flamande coopèrent aux initiatives de ce groupe de travail.

Le trafic de chiots est un problème de dimension européenne et même internationale. J’ai donc indiqué à la Commission qu’il était nécessaire que la stratégie bien-être animal de la Commission aborde cette thématique. Sur les thèmes du transport commercial, de l'identification et de l'enregistrement, de la publicité via des plateformes en ligne, un certain nombre de documents de travail et de lignes directrices ont déjà été élaborés et présentés sur la plateforme du bien-être animal de la Commission européenne, afin d'inscrire ce sujet à l'ordre du jour de l’agenda politique européen.


En ce qui concerne la recherche active de la « mafia des chiens », j’attire votre attention sur l'importance des contrôles aux frontières qui ne sont pas présentes sur le territoire bruxellois.

Par ailleurs, le contrôle des ventes frauduleuses sur Internet nécessite des méthodes spécialisées, comme celles utilisées, par exemple, par la Federal Computer Crime Unit ce qui rend les contrôles compliqués au niveau de Bruxelles Environnement.

Une harmonisation du système d’identification me semble primordiale afin de permettre le contrôle et la traçabilité du commerce de chiens. La base de données belge DogID, qui est gérée conjointement par les 3 régions, est reliée à la base de données (privée) Europetnet, qui relie également les données d'autres bases de données nationales.


Enfin, s’il s’agit d’infractions en matière de bien-être animal, la sanction pénale susceptible d’être prononcée vise un emprisonnement de huit jours à deux ans et/ou une amende de 50 à 100.000 euros. Ni le département bien-être animal ni le Conseil bruxellois du bien-être des animaux n'ont reçu de plaintes à ce sujet.