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Question écrite concernant le cri d'alarme d'acteurs de terrain concernant l'importance de maintenir des guichets ouverts à la population.

de
Emin Özkara
à
Bernard Clerfayt, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de l'Emploi et de la Formation professionnelle, de la Transition numérique, des Pouvoirs locaux et du Bien-Être animal (question n°812)

 
Date de réception: 16/09/2021 Date de publication: 12/01/2022
Législature: 19/24 Session: 20/21 Date de réponse: 16/11/2021
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
18/10/2021 Recevable p.m.
 
Question   

Monsieur le Ministre, j'ai récemment été contacté par des acteurs de terrain qui lance un cri d'alarme par l'intermédiaire d'une lettre ouverte ( voir ici: https://tinyurl.com/ymwjd46k ). Afin de ne pas dénaturer le message, il me semble opportun de relayer à l'identique quelques uns des propos qui m'ont été envoyés et ensuite, vous poser les questions d'usage.

"Comme vous le savez, la précarité numérique touche toutes les populations, les jeunes, les familles, les âgés.

La crise sanitaire a entraîné une fermeture de nombreux guichets à la population et avec elle le manque de possibilité d’expliquer, de poser des questions et d’accéder à des aides bien indispensables pour les publics plus fragilisés socialement. Ces guichets sont nécessaires aussi bien dans les banques que dans les mutuelles, les communes, les CPAS, la CAPAC, l’ONEM, les Pensions, les universités, les écoles….

En ce mois de rentrée scolaire, de nombreux acteurs de terrain lancent un cri d’alarme pour que la rentrée ne soit pas le signe d’un retour à « comme avant été », à des guichets fermés et du tout au digital !

De nombreuses familles ont connu trop de difficultés pour les inscriptions scolaires ou les demandes de bourses.

Les guichets doivent rester ouverts pour maintenir un contact humain sans lequel le non recours ne fait qu’augmenter et avec lui la précarisation croissante de notre société." 1

Suite à ces propos et au contexte de crise de la COVID-19, je souhaiterais vous poser les questions suivantes :

  1. Actuellement, quel est le pourcentage de la population bruxelloise vulnérable face au numérique ? Quel est le pourcentage de personnes qui n'ont aucune compétence numérique ? Quel est le pourcentage de personnes qui ont des compétences numériques faibles ?
  2. Quelles sont les aides sociales et les formations numériques mises en place pour aider la population bruxelloise vulnérable face au numérique ou lutter contre la fracture numérique ? Des mesures supplémentaires vont-elles être dégagées eu égard à la forte demande d'aide en matière de numérique ?
  3. Quelles sont les mesures mises en place par votre administration afin de permettre à la population bruxelloise vulnérable face au numérique d'effectuer les démarches administratives nécessaires à leur vie quotidienne ?
  4. Les "décisions administratives restreignant l’accès physique aux organismes publics et privés renforcent la précarité des citoyens et des citoyennes. Cette crise sanitaire sans précédent n’a fait que révéler la fracture bien réelle qui se creuse dans la société. Si la pression des demandes auprès des administrations semble être régulée ou même avoir diminué, il s’agit d’un trompe-l’œil. Les publics n’ont pas disparu, ils n’ont juste pas atteint les services désirés."2 Quid du non recours aux droits sociaux ?
  5. "Aucune intelligence artificielle ne remplacera jamais une personne dans le règlement de difficultés sociales et administratives. Elle ne pourra pas redonner confiance, courage et dignité comme le font les acteurs et actrices de terrain. Dès lors, il faut laisser le choix aux publics ! Qu’ils puissent, selon leurs compétences, décider de rencontrer un ou une agent à un guichet, remplir un formulaire papier, s’enregistrer par téléphone, ou finalement passer par internet."3 Quid des mesures en place et à venir qui permettent l'équité de traitement et le maintien de l'ouverture de guichets pour accueillir et aider les personnes ?

1 Myrrhine KULCSAR, Coordination de l’Action sociale du CPAS de Saint-Gilles, mail du 15/09/2021.

2 La Coordination de l’Action sociale du CPAS de Saint-Gilles soutenue par de nombreux réseaux et acteurs, "Lettre ouverte du 13/09/2021: Face à la digitalisation des services les guichets doivent rester ouverts. Revenons à l’humain!", https://tinyurl.com/ymwjd46k , consulté le 16 septembre 2021.

3 Idem.

 
 
Réponse    1/
Selon le Baromètre de l’inclusion numérique 2020, paru en août 2020 et édité par la Fondation Roi Baudouin, les pourcentages de la population bruxelloise vulnérable face au numérique sont les suivants :
- Inégalités d’accès : 10% des ménages ne disposent pas de connexion internet en Région de Bruxelles-Capitale et près de 30% des ménages vivants avec de faibles revenus ne disposent pas de connexion internet à domicile ;
- Inégalités liées aux compétences numériques : 41% des bruxellois ont de faibles compétences numériques ou n’utilisent pas internet (32% + 9%), tandis que 75% des personnes ayant de faibles revenus sont touchés par cette vulnérabilité numérique.
- Inégalités liées à l’utilisation des services essentiels. En Région de Bruxelles-Capitale, 35% de la population ne recourt pas à l’e-administration. Chez les personnes ayant de faibles revenus, ce pourcentage monte à 55%.

2&3/
Au niveau des formations numériques, le Plan d’Appropriation Numérique (PAN) prévoit 66 actions dont des formations afin d’augmenter les compétences numériques des citoyens bruxellois. Un budget de minimum 900.000 € par an est alloué au CIRB (800.000€) et à easy.brussels (100.000€) afin de mener des actions dans ce sens.
Outre les diverses actions prévues par le PAN, les Espaces Publics Numériques sont, à l’heure actuelle, les endroits les plus adaptés pour que les personnes vulnérables face au numérique puissent effectuer leurs démarches administratives en ligne.
De plus, les citoyens peuvent trouver de l’aide au niveau des CPAS et autres organismes d’actions sociales afin d’être accompagnés dans leurs démarches.


4/
Le non-recours aux droits sociaux est une problématique qui a fait l’objet d’une étude récente : https://journals.openedition.org/brussels/5628
Il en ressort qu’une partie du non recours aux droits sociaux concerne les personnes qui n’ont pas les compétences numériques suffisantes pour pouvoir faire leurs démarches en ligne de manière autonome. Il est donc indispensable de garantir des alternatives non digitales (cf. réponse à la question 5).
La fracture numérique n’est pas le seul facteur menant au non-recours. Des facteurs tels que la complexité administrative (cf easybrussels - agence de simplification), la complexité des statuts des demandeurs, la connaissance d’une des langues nationales, etc. sont également à prendre en considération.


5/
Easybrussels travaille actuellement sur un projet d’ordonnance visant à réguler la digitalisation des services publics. Cette ordonnance prône le principe du « numérique d’abord » tout en prévoyant des alternatives pour que les services publics numérisés restent accessibles à tous les citoyens.
La Coordination Inclusion Numérique travaille également sur la mise en place de recommandations inclusives dans le cadre des services publics numérisés. Ces recommandations permettront aux services publics de mettre en place des alternatives à la digitalisation afin que les publics les plus éloignés du numérique puissent y avoir recours.