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Question écrite concernant l’abandon graduel des véhicules thermiques

de
Aurélie Czekalski
à
Alain Maron, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de la Transition climatique, de l'Environnement, de l'Énergie et de la Démocratie participative (question n°1098)

 
Date de réception: 20/04/2022 Date de publication: 08/06/2022
Législature: 19/24 Session: 21/22 Date de réponse: 01/06/2022
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
02/05/2022 Recevable Bureau élargi du Parlement
 
Question   

Le gouvernement bruxellois a pour objectif l’abandon graduel des véhicules thermiques (diesel en 2030, puis essence et LPG en 2035) sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale. Dans sa décision de mai 2018, le Gouvernement bruxellois déclare étudier cette politique afin de répondre aux objectifs en matière de qualité de l’air et de santé ainsi qu’en termes de diminution des émissions de gaz à effet de serre pour lutter contre le réchauffement climatique.

Rappelons donc ici que le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale a décidé de lancer une concertation avec les parties prenantes et les secteurs concernés, avec pour objectif l'interdiction des véhicules diesel au plus tard en 2030, l'interdiction des véhicules essence dans une étape suivante, et le développement à court et moyen terme des technologies alternatives (notamment celles déjà disponibles comme les véhicules électriques, hybrides et roulant au CNG).

Permettez-moi de vous poser les questions suivantes :

  • Quelles décisions ont été prises par le Gouvernement bruxellois quant à l’interdiction des véhicules diesel, essence et LPG ? Pourriez-vous nous donner la ventilation des ces décisions par dates, mesures et impacts ainsi que l’impact sur les finances bruxelloises ?

  • Si on passe à une mobilité 100% électrique en Région bruxelloise, de quel ordre sera l’augmentation de la consommation en électricité ? Des mesures sont-elles prises par Sibelga pour renforcer le réseau en prévision ? Si oui, lesquelles ?

  • Quelles études d'incidence sur l'économie de la Région et en particulier l'impact sur les indépendants et certains secteurs comme l'Horeca ou le secteur des services, ou encore le secteur de l'aide et des soins nécessitant un véhicule dans le cadre de leur travail ont été réalisées ? Quels en sont les principaux résultats ?

 

 
 
Réponse    1)
Les décisions :
JUIN 2018 :
Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale décide de lancer une consultation et des études sur le principe d’interdire des véhicules diesel au plus tard en 2030 et l'interdiction des véhicules essence/LPG. Celle-ci permet d’organiser une large consultation citoyenne (écrite, mais également 9 workshops thématiques et 3 focus groupes).

JUILLET 2019 : la déclaration de politique générale du Gouvernement confirme la décision de procéder à une interdition progressive des véhicules diesel d’ici à 2030 au plus tard, et des véhicules essence/LPG d’ici à 2035.

NOVEMBRE 2019 : Cette ambition est inscrite dans la composante bruxelloise du PNEC, approuvé par le Gouvernement en novembre 2019.

MARS 2020 : Adoption du Plan Good Move par le Gouvernement bruxellois. La fiche D.5. « Évoluer vers une sortie des moteurs thermiques » confirme l’ambition de l'interdiction progressive des véhicules à moteur à combustion.

JUIN 2020 : En parallèle, le Gouvernement travaille sur le déploiement des alternatives aux véhicules thermiques. Il adopte sa première « vision stratégique régionale sur le déploiement d’une infrastructure de recharge ».

MARS 2021 : Adoption de l’arrêté modificatif en matière de l’exemplarité des pouvoirs publics, qui prévoit que les pouvoirs publics locaux et régionaux ne pourront plus acheter ou prendre en leasing que des voitures et des véhicules utilitaires légers « zéro-émission » à partir du 1er janvier 2025.

JUIN 2021 : Adoption en première lecture de l’arrêté LEZ « 2025 – 2035 », qui fixe les jalons de la zone de basses émissions bruxelloise jusqu’en 2035. Ceux-ci sont publiés sur le site https://lez.brussels. En parallèle, le Gouvernement bruxellois prend acte de la roadmap « Low Emission Mobility », qui détaille une stratégie de décarbonation du transport à l’échelle de la Région.

Les impacts :

De nombreuses études d’impacts et de consultations ont été réalisées en 2020 – 2021 afin de préparer la sortie progressive du diesel et de l’essence à Bruxelles. Celles-ci sont disponibles sur le site de Bruxelles Environnement.

En résumé :

-
Etude « Impact Santé » : Cette étude démontre que l’amélioration prévue de la qualité de l'air dans le cadre de la sortie du thermique et de la mise en œuvre du plan Good Move permettra d’éviter chaque année entre 100 et 110 décès prématurés, de réduire de 25 %  les maladies liées à l’exposition au NO2 et d'économiser 100 à 350 millions d'euros en dépenses liées à la santé à partir de 2030.
-
Etude « Impact sur les émissions du transport » : Ces analyses démontrent que l’interdiction progressive du diesel puis de l'essence, combinée à la réduction du trafic telle que prévue dans le plan Good Move, devraient permettre une réduction de 75% des émissions de CO2 liées au transport d'ici à 2030 (par rapport à un scénario sans sortie du thermique et sans Good Move), contribuant ainsi grandement à l'objectif de neutralité climatique que la Région de Bruxelles-Capitale s’est engagée à atteindre en 2050.
- Etude « Evolutions technologiques et impacts sur l’environnement et l’énergie » : Cette étude analyse les différentes motorisations possibles en RBC, et avance que le choix technologique le plus pertinent pour l’avenir est d’accélérer l’électrification du transport.
- Etude « Impact socio-économique » : Cette étude analyse l’impact socio-économique de la sortie progressive du thermique, et met en évidence que l’évolution à la baisse des prix de certains véhicules la rend crédible. Elle illustre également certaines pistes de mesures d’accompagnement qui pourraient être prises pour faciliter la transition.
-
Etude « Impact sur la mobilité des personnes et des marchandises » : Cette enquête illustre que la zone de basses émissions ne devrait pas être un levier de report modal majeur sans amélioration des alternatives à la voiture. Elle met également en évidence plusieurs leçons importantes au sujet des poids lourds, notamment en vue d’éviter une « camionnettisation ».


Impact sur les finances bruxelloises :

La question des impacts de cette évolution sur les finances est très large.
Comme indiqué ci-dessus, la sortie du thermique aura un impact économique indirect important, en réduisant les coûts en soins de santé liés à la pollution de l’air de 100 à 350 millions d’euros par an. Le passage progressif aux véhicules moins polluants nécessitera, lui, des investissements afin de renouveler progressivement la flotte de véhicules publics, qui aura lieu au fur et à mesure de la progression de la LEZ. Ceux-ci sont difficiles à estimer, car ils entrent (au moins partiellement) dans la stratégie de renouvellement naturel des flottes publiques bruxelloises. Ils peuvent par ailleurs être limités grâce à une optimalisation de la gestion du parc de véhicules publics et de leur usage, et évolueront à la baisse grâce à la réduction du coût d’achat des véhicules électriques (voir ci-dessus) ainsi que par l’évolution positive du TCO de véhicules moins polluants.
Pour faciliter cette transition, différentes mesures sont mises en place pour aider les communes à anticiper et intégrer cettes transition :

- Un facilitateur « Mobility & fleet »
- Un facilitateur « Bornes »
- Des centrales d’achat et de leasing de véhicules et de bornes
- Diverses primes (LEZ, vélo-cargo, etc)
- Des échanges de bonnes pratiques réguliers, via Brulocalis mais également via l’équipe « Plans de déplacement d’entreprise », dont l’organisation d’un « Salon de la mobilité ».
- Etc.

A ce titre, un budget de 8 millions d’euros par an est alloué à Bruxelles Environnement pour accompagner les particuliers, les professionnels (entreprises, indépendants, associatif, etc.) et les pouvoirs publics dans cette transition. Ces mesures sont toutefois loin d’être les seules à permettre une évolution des pratiques de mobilité à Bruxelles, puisqu’elles viennent s’ajouter aux nombreuses initiatives entreprises par Bruxelles Mobilité pour améliorer l’offre en solutions de mobilité diverses pour les bruxellois et les navetteurs.

2)
En 2019, la demande totale d’énergie en RBC était de 18.891 GWh. Le transport y contribue pour 21% (4.000 GWh). La demande en électricité était, elle de 5.221 GWh.
Les résultats d’une étude réalisée par la VUB et Sweco, pour Bruxelles Environnement en 2022, démontrent que la demande en électricité augmentera en 2035 (+/- 100% électrification) de 1.650 GWh suite à la décarbonation progressive du parc automobile. Il s’agit d’une augmentation de la demande en électricité de 31% suite à l’électrification du parc de véhicules. Notons toutefois que si cette demande en électricité est attendue à la hausse, la demande totale en énergie du secteur du transport, elle, diminuera toutefois de 60% en raison de la meilleure efficacité énergétique des véhicules électriques.
Le gestionnaire du réseau électrique bruxellois, Sibelga, suit cette question de près. A cet égard, elle a commandé, en 2019, une étude macroéconomique sur l’impact de l’électromobilité sur les réseaux électriques belges. Cette étude a permis d’évaluer l’impact de différents scénarios de recharge, et d’illustrer qu’à court terme, le réseau électrique bruxellois peut recharger un grand nombre de véhicules électriques, à condition que la recharge des véhicules soit répartie dans le temps et l'espace et que les investissements de modernisation puissent être poursuivis.
A plus long terme, afin d’assurer la stabilité du réseau, Sibelga adaptera ses politiques d’investissement afin de renforcer les parties du réseau les plus sollicitées, et devra déployer une stratégie visant à faire évoluer le réseau de distribution vers un « smart grid », qui devrait permettre une meilleure observabilité et de nouvelles solutions de « pilotage » de la demande d’électricité.
Rappelons également que Sibelga établit chaque année un plan d’investissement quinquennal pour son réseau électrique, dans le cadre duquel il propose des mesures qui permettent de rendre le réseau électrique résilient et adapté aux défis de la décarbonation. Ces plans d’investissements font l’objet systématiquement d’une consultation publique et d’un avis de Brugel avant d’être approuvés par le Gouvernement.
3)
Dans le cadre des études d’impact en matière de sortie du thermique, Bruxelles Environnmement a commandé une étude concernant l’impact socio-économique auprès du consortium Stratec – VUB. Cette étude a été réalisée en 2020 – 2021. Le rapport est disponble sur le site web de Bruxelles Environnement.

Celle-ci se fonde sur des hypothèses concernant l'évolution future du coût total de possession (TCO) de différents types de véhicules, et évalue leur impact financier sur plusieurs types de profils d’utilisateurs. Pour les ménages, elle illustre notamment que le TCO d'un véhicule électrique en 2030 oscillera entre 5 000 et 8 000 euros de moins qu'une voiture à essence pendant toute la durée de vie du véhicule. Sur cette base, on s'attend à ce que, à partir de 2035, un marché d'occasion de voitures électriques se développe avec des prix plus bas que leurs équivalents essence. Pour les entreprises, l’étude identifie une série de secteurs qui devraient profiter de cette transition, et une série de points d’attentions visant à permettre une transition aisée à l’ensemble des acteurs économiques bruxellois.

Sur cette base, le Gouvernement a donc élaboré et met en œuvre sa feuille de route « Low Emission Mobility » qui propose une série de mesures d’accompagnement (renfort de diverses primes, mise en place de facilitateurs, diffusion d’informations, appels à projets, dérogations diverses, etc).

Source : Bruxelles Environnement,
Bilan énergétique 2019 de la Région de Bruxelles-Capitale