Logo Parlement Buxellois

Question écrite concernant le ChatGPT et ses conséquences

de
Christophe De Beukelaer
à
Elke Van den Brandt, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, chargée de la Mobilité, des Travaux publics et de la Sécurité routière (question n°1521)

 
Date de réception: 06/02/2023 Date de publication: 13/04/2023
Législature: 19/24 Session: 22/23 Date de réponse: 21/03/2023
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
09/02/2023 Recevable p.m.
 
Question    Le 22 décembre 2022 fera date dans l’Histoire. C’est l’avènement au grand public de l’intelligence artificielle via la mise en ligne de ChatGpt.

Alors que nous en sommes encore au début, « Chatgpt » et « Claude » viennent de réussir les examens du barreau américain, examen de médecine ou encore un MBA.

« ChatGPT » va impacter tous ceux qui produisent des textes, y compris du code, comme les journalistes, les Community Managers, les professionnels du marketing, les avocats, les codeurs, etc. Mais il est également possible de l’utiliser pour tout ce qui touche au traitement de données, à la création visuelle, aux levées de fond, au secrétariat, et j’en passe.

Les métiers bureaucratiques, « intellectuels » et créatifs seront complètement chamboulés. L’intelligence artificielle sera pour l’intelligence ce que la machine à vapeur a été pour le travail manuel : une révolution.

Nous avons deux choix face à l’arrivée de l’intelligence artificielle dans nos vies :

  • Nous replier sur nos petites habitudes, ne dénoncer que les limites et les dangers, tenter de freiner le changement et de s’accrocher au monde tel qu’on le connait. C’est trop souvent là posture du monde politique.

  • Partir du principe que la technologie n’est en soit ni bien ni mal mais que tout dépend de ce qu’on en fait. Ça peut être une opportunité si on anticipe et qu’on accompagne, dès le début, ces changements. Respecter l’ancien en greffant le nouveau plutôt que de gaspiller de l’énergie et du temps précieux à le combattre. Anticiper et prendre ces sujets à bras le corps afin de veiller à ce que ces changements soient forces de biens pour notre société et les hommes et femmes qui les composent.

Dès lors, Madame la Ministre, j’aurais quelques questions à vous :

  • Soutenez-vous des projets en Intelligence artificielle (IA) qui jouent un rôle dans l’optimisation des itinéraires de transport en temps réel afin de désengorger notre ville ?

  • Avez-vous rencontré les entreprises et les acteurs clés actifs dans ce domaine ? Pouvez-vous nous faire part des conclusions de ces rencontres?

  • Avez-vous analysé l’impact que l’intelligence artificielle aura sur notre mobilité et qu’avez-vous mis en place afin de l’anticiper ?

  • Avez-vous mis en place un groupe de travail qui étudie le rôle que l’IA peut avoir en mobilité et sécurité routière, en sa capacité à prédire les problèmes de circulation et à les résoudre avant qu’ils n’affectent les voyageurs, en sa capacité à améliorer la sécurité routière en identifiant les dangers potentiels et en aidant à prendre les mesures afin de les prévenir ou encore en sa capacité à planifier les meilleures infrastructures de transport en fonction des besoins ?

  • Dans les administrations dont vous avez la tutelle, avez-vous mis en place un groupe de travail qui étudie comment l’IA va transformer le travail de ces administrations ? Quels postes vont être affectés ? Avez-vous nommé un référent IA ? Avez-vous un plan afin de former le personnel à ces nouvelles technologies afin de rendre les administrations plus efficientes ?

 
 
Réponse    Il est incontestable que l’intelligence artificielle (IA) a fait d’énorme progrès ces 30 dernières années grâce à la puissance de calcul des ordinateurs modernes et que celle-ci va encore s’améliorer. Même sans avoir de résistance au changement et au progrès, la prudence reste de mise car les promesses et attentes dans ce domaine dépassent souvent les résultats réels.
Bruxelles Mobilité est consciente de l'impact de l'IA sur la vie quotidienne de chacun. Afin d’anticiper et d’accompagner ces changements et en faire une opportunité, nous construisons des partenariats et posons notre candidature à des projets nationaux et européens travaillant sur le sujet. Enfin, nous prenons la thématique avec le sérieux nécessaire afin de garantir qu'elle soit bénéfique pour notre Région et nos concitoyens.

Bruxelles Mobilité utilise déjà des technologies basées sur l’Intelligence Artificielle
pour la mobilité. Nous pouvons citer les caméras associées à un logiciel d’analyse d’images vidéo de plusieurs types :
- Tous les tunnels sont équipés de caméra DAI (pour Détection Automatique d’Incidents, des incidents comme un véhicule à l’arrêt, une file, de la fumée, un véhicule à contresens, un piéton dans tunnel, etc.). Certaines de ces caméras sont équipées d’un module de comptage, qui permet de compter les véhicules. Ces caméras sont parfaitement capables de compter le nombre de passages de véhicule (avec moins de 5% de marge d’erreur) mais pas vraiment de reconnaître et classifier les types véhicules.
- Plusieurs autres systèmes de caméras-logiciels sont utilisés/testées à plusieurs endroits sur le réseau de surface (=hors tunnel, aux carrefours par exemple). Notamment des logiciels utilisant l’intelligence artificielle, auxquels on peut apprendre à mieux identifier les véhicules par entraînement (deep learning). C’est un domaine en constante évolution ; nous évaluons les systèmes déjà en place en collaboration avec le Centre d'Informatique pour la Région Bruxelloise (CIRB).
Bruxelles Mobilité, en collaboration avec le CIRB, teste déjà d'autres technologies innovantes avec l'intelligence artificielle. Nous pouvons citer l'utilisation de l'intelligence artificielle pour détecter et corriger les données erronées ou pour détecter et signaler les pannes et anomalies d'appareils dans les tunnels.
En collaboration avec la STIB, FARI (VUB-ULB) et le CIRB, Bruxelles Mobilité vient d’obtenir un financement européen en faveur du développement de solutions technologiques intégrant l’intelligence artificielle. Un financement qui permettra d’ici 2027 d’améliorer la récolte et l’analyse de données de mobilité multimodale.
C’est dans le cadre du projet Citcom.ai (« European AI Testing and Experimentation Facility (TEF) for Smart and Sustainable Cities and Communities ») que Bruxelles Mobilité et ses partenaires viennent d’obtenir un financement européen de près de 500.000 euros.  Ce projet s’inscrit dans l’objectif de la Commission européenne de cofinancer des sites de référence spécialisés dans quatre secteurs (manufacture, soins de santé, agroalimentaire et villes intelligentes) pour le développement et le déploiement d’une IA de pointe. Les TEF sont destinés à tous les fournisseurs de technologies en Europe pour tester et expérimenter des produits basés sur l'IA. Les TEF sont un élément clé pour construire un écosystème d'excellence et de confiance dans l’IA en Europe. Ils offriront un soutien pour tester les dernières technologies basées sur l'IA dans des environnements réels.

Dans le secteur des villes et communautés intelligentes, Bruxelles Mobilité développera en collaboration avec la STIB, FARI et le CIRB un site spécialisé de mise à disposition de données de mobilité multimodale permettant à des fournisseurs de technologies européens de tester leurs solutions basées sur l’intelligence artificielle.
La participation à ces projets nous permet de rester informés des dernières avancées et garder une veille technologique pour assurer un développement continu et une intégration de ces technologies dans nos outils de gestion, de planification et de développement de la mobilité.

Dans le cadre du partenariat avec l’agrégateur de données de micromobilité partagée pour la gestion de ces services, l’agrégateur en question nous a informés sur les services supplémentaires développés et, notamment, sur le potentiel de l’intelligence artificielle ; notamment sur l’optimisation de la réduction des émissions de CO
2 dans la gestion des flottes de véhicules partagés ou sur l’identification de priorités en matière de sécurité routière.
Une analyse d’impact de l’intelligence artificielle dans le cadre du développement des véhicules autonomes a été partiellement réalisée dans le cadre d’une étude commandée par la Région et pilotée par la STIB en partenariat avec Bruxelles Mobilité. Le rapport de cette étude, finalisé en 2019 par les agences Arthur D. Little et Espaces-Mobilités, a identifié 10 chantiers et actions concrètes à court terme pour la Région de Bruxelles-Capitale dans ce contexte. Ces actions permettront à notre Région de se préparer au développement et à l’adoption des technologies relatives aux véhicules autonomes.
Un comité d’accompagnement sera établi dans le cadre du projet européen cité ci-dessus. Dans ce contexte, des cas d’usage seront définis, notamment en matière de sécurité routière et d’optimisation des déplacements multimodaux.
D’un point de vue technique, l’intelligence artificielle de ChatGPT a dû être
nourri avec un apprentissage supervisé (c’est-à-dire avec une source qui peut dire ce qui est vrai ou faux) et par apprentissage par renforcement (c’est-à-dire en corrigeant ses erreurs) pour calibrer un modèle de langage qui fait plus de 175 milliards de paramètres jusqu’en 2021. Malgré cela, openAI la société qui a développé ChatGPT, reconnait que son produit fait encore des erreurs et produire des instructions biaisées voire dangereuses. Des raisons techniques font que la qualité d’une artificielle reflètera toujours la qualité des données auxquelles elle a été nourrie. En d’autres termes, si les données d’entrées sont fausses, biaisées ou de mauvaises qualités, l’IA résultante en sera de même. Il est donc primordial d’avoir des données de qualité en premier lieu. C’est dans cette optique que Bruxelles Mobilité travaille avec les autres acteurs de la région sur la mise en place d’un Code Bruxellois de la donnée.
La STIB entretient une veille technologique permanente quant aux nouveautés, tous domaines confondus. Dans ce cadre, la STIB participe à l’initiative régionale mentionné ci-dessus AI TEF (AI Testing & Experimentation Facilities).
Par ailleurs, la STIB utilise déjà de nombreux outils algorithmiques pour planifier l’offre ou gérer le réseau (logiciels de régulation automatique au métro...), ainsi que pour mesurer la fréquentation attendue de son réseau et planifier les renforts en fonction.
Cela étant, la STIB ne mène actuellement pas de projet lié à l’intelligence artificielle pour l’optimisation en temps réel des itinéraires de ses transports.
Un tel projet reviendrait à réorienter les lignes en fonction du trafic, laissant démunis les voyageurs attendant leur transport aux arrêts définis ou amenant des voyageurs loin de l’arrêt souhaité. De telles réorientations en temps réel ne seraient par ailleurs possibles que pour le bus et poseraient de nombreux soucis : accessibilité des arrêts pour PMR, disponibilité de l’information aux arrêts, lisibilité du réseau, passage par des voiries non adaptées (pour le croisement des véhicules, le rayon de giration, les demi-tours au terminus…), etc.
La STIB a envisagé de faire appel à des outils d’IA pour les systèmes de ressources humaines en 2020, lors du Maturity Assessment. L’objectif était de définir son niveau d’ambition digital et de réfléchir sur l’évolution des outils informatiques de la STIB pour soutenir cette transformation digitale.

Le service IT de parking.brussels a un temps envisagé la possibilité de déterminer les trajets des véhicules scanneurs sur la base de données traitées par une intelligence artificielle. Cette piste n’a pas été suivie parce qu’elle n’a pas été jugée pertinente dans l’objectif de fluidifier le trafic automobile.
Il est à noter que l’intelligence artificielle est déjà utilisée dans le secteur du stationnement, dans la reconnaissance des plaques d’immatriculation essentiellement.