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Question écrite concernant le harcèlement de rue et l'application de la loi du 22 mai 2014 tendant à lutter contre le sexisme dans l'espace public, ainsi que les formes de harcèlement sexuel et de harcèlement sexuel de rue commis dans les lieux publics.

de
Leila Agic
à
Nawal Ben Hamou, Secrétaire d'État à la Région de Bruxelles-Capitale en charge du Logement et de l'Égalité des Chances (question n°144)

 
Date de réception: 18/11/2019 Date de publication: 06/04/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 06/04/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
13/03/2020 Recevable Bureau élargi du Parlement
 
Question    La loi contre le sexisme stipule qu’une personne ayant un comportement ou un geste, en public ou en présence de témoins, visant à considérer une personne comme inférieure ou à la mépriser en raison de son sexe ou encore de la réduire à sa dimension sexuelle, peut se voir comparaitre devant le tribunal correctionnel qui pourra prononcer une peine de prison d’un mois à un an et/ou une amende de 50€ à 1000€.

Néanmoins, parallèlement, le harcèlement de rue est un phénomène très répandu dans notre société. En effet, l’association Vie féminine a recensé que 98% des femmes ont déjà été victimes d’harcèlement de rue. Dans la même optique, selon l’ASBL JUMP, 9 femmes sur 10 sont confrontées à des comportements sexistes dans l’espace public.

Paradoxalement, seulement 55 faits de sexisme dans l’espace public ont été enregistrés par la police fédérale en 2018
1. Encore plus grave, en 4 ans, cette loi n’a conduit qu’à une seule condamnation2.

Différentes explications peuvent être avancées pour expliquer ce faible taux de plainte par rapport au nombre réel de victimes.

Premièrement, le fait que beaucoup de femmes ignorent l’existence de la loi contre le sexisme et ne savent pas que ces faits sont punissables pénalement.

Deuxièmement, les victimes de harcèlement ont souvent peur de porter plainte car elles ont honte ou se sentent coupables.

Ensuite, l’une des raisons principales au manque de plaintes est le fait qu’il est très difficile d’identifier son harceleur et encore plus difficile de prouver les faits allégués car c’est bien aux victimes que revient la charge de la preuve.

De plus, tous les commissariats de police n’ont pas été formés sur l’application de cette loi car certaines zones ont travaillé là-dessus et d’autres pas encore. Selon l’ASBL Vie féminine, la police n’est pas toujours compétente et ne semble pas préoccupée par les problèmes de harcèlement de rue
3. Pourtant, la police est légalement et déontologiquement obligée de prendre les plaintes et de faire appliquer la loi.

Le sexisme constitue un problème grave. Il est omniprésent et renforce les inégalités entre les hommes et les femmes dans notre société.

Nous estimons que cette loi de 2014 contre le sexisme est importante car elle lance un signal mettant en évidence ce phénomène d’harcèlement et de rue et le fait que ce soit inacceptable et punissable. Cette loi devrait, néanmoins, être retravaillée afin de rendre son application optimale.

Mes questions sont les suivantes :

1) Envisagez-vous une campagne permettant de faire connaitre la loi de 2014 et encourager les femmes victimes d’harcèlement de rue à porter plainte ?

2) Est-ce qu’une formation est prévu dans les différents commissariats de la Région afin de permettre à tous les policiers recueillant ce genre de plaintes d’agir de manière appropriée ?

3) Envisagez-vous de coopérer avec le Fédéral afin de travailler ensemble dans le but de compléter la loi de 2014 afin de faciliter les démarches de plainte pour les victimes de harcèlement de rue ?


1 https://www.dhnet.be/actu/societe/alors-que-le-harcelement-en-rue-est-bien-reel-la-loi-contre-le-sexisme-fait-
un-flop-5dc1b9069978e218e3ac7188#.XcVBcGljj3g.facebook

2 https://www.rtbf.be/info/societe/detail_une-premiere-condamnation-pour-sexisme-dans-l-espace-public-a- bruxelles?id=9858469
3 https://www.rtbf.be/info/societe/detail_la-loi-contre-le-sexisme-3-ans-apres-un-bilan-en-demi- teinte?id=9984216
 
 
Réponse    En 2018, equal.brussels a mené une campagne « 0% sexism » contre le harcèlement sexuel dans l’espace public. Cette campagne contenait un volet informatif indiquant aux victimes et aux témoins, quelles sont les différentes façons de réagir face aux actes de harcèlement sexuel et quels types d’aides existent.

Suite aux recommandations formulées dans la résolution visant à lutter contre le harcèlement sexiste dans l’espace public, en particulier dans les transports en commun, approuvée par votre Parlement le 30 avril 2019, plusieurs actions précises ont été reprises dans ma note d’orientation 2019-2024 qui vous a récemment été présentée, à savoir:

- Inclure la lutte contre le harcèlement sexuel en espace public dans le futur plan régional de lutte contre les violences faites aux femmes. Ce premier plan global régional est actuellement en cours de finalisation, en concertation avec les institutions bruxelloises partenaires et les associations de terrain. Cette thématique y trouvera toute sa place ;
- Lancer un appel à projets thématique ciblant la lutte contre le harcèlement en rue ;
- Mettre en place des formations et renforcer les formations actuelles sur des thématiques telles que le cyberharcèlement et le harcèlement sexuel, en collaboration avec Brusafe et les partenaires du terrain. A cet effet, equal.brussels est en train de réaliser un cadastre des formations existantes sur toutes les formes de violences faites aux femmes.

Cette problématique est capitale et les réponses à y apporter devront être collectives, c’est pourquoi Equal.brussels a retenu environ 25 projets dans le cadre de son dernier appel à projets thématique dédié à l’appropriation de l’espace public, notamment sous l’angle du genre. Les subventions sont en cours d’attribution.

Cette appel à projets invitait les associations bruxelloises à déposer tout type de projets, qui contribuerait aux questionnements des usages et/ou de l’aménagement de l’espace public, à son appropriation ou encore à la formulation de pistes pour le rendre plus inclusif en termes de diversité, au regard du genre, de la féminisation, du handicap ou encore de la culture.

Par ailleurs, vous avez certainement connaissance des mesures prévues dans le plan global de sécurité en ce qui concerne l’atteinte à l’intégrité des personnes et notamment bien entendu des femmes.

Enfin, la coordination égalité des chances de Bruxelles Pouvoir Locaux orientera son action relative à l’espace public autour de 3 axes pour 2020. Un axe est notamment relatif à la place des femmes dans l’espace public du point de vue du sentiment d’insécurité, des violences et du harcèlement sexiste, avec un travail sur les auteurs et les jeunes garçons.

Les actions s’orientent pour 2020 vers l’accompagnement des services communaux en contact avec les jeunes: sensibilisation et prévention.

Concernant la question de la formation, il est en effet très important que tous les agents soient formés et sensibilisés à la problématique du harcèlement sexuel.

Sur la base d’un cadastre de ces formations qu’equal.brussels est en train de réaliser, et des concertations avec le secteur associatif et institutionnel qui prennent place dans le cadre du futur plan régional de lutte contre les violences faites aux femmes, des nouvelles formations seront planifiées et organisées en fonction des compétences de chaque partenaire du Plan.

En ce qui concerne la collaboration entre les différentes entités du pays dans la lutte contre les violences faites aux femmes, une conférence interministérielle a été mise sur pied fin décembre dernier.

Le premier focus de cette CIM relative aux droits des femmes, sera la question des violences faites aux femmes. Nul doute que la problématique du harcèlement sexiste et sexuel trouvera pleinement sa place au sein des futures discussions de cette CIM. Cette conférence, c’est une manière de responsabiliser chaque décideur politique sur cette question, quel que soit son niveau de pouvoir.

Par ailleurs, afin d’assurer la cohérence entre le futur plan régional et le Plan d’Action National, l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes fait partie du groupe interinstitutionnel qui accompagne la préparation du Plan Régional de lutte contre les violences faites aux femmes.