Présidence : M. Rachid Madrane, président.

Question orale de Mme Latifa Aït Baala

à M. Bernard Clerfayt, ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de l'Emploi et de la Formation professionnelle, de la Transition numérique, des Pouvoirs locaux et du Bien-être animal,

et à M. Pascal Smet, secrétaire d'État à la Région de Bruxelles-Capitale chargé de l'Urbanisme et du Patrimoine, des Relations européennes et internationales, du Commerce extérieur et de la Lutte contre l'incendie et l'Aide médicale urgente,

concernant les fonds européens pour le développement des compétences numériques des chercheurs d'emploi et des travailleurs vulnérables.

Mme Latifa Aït Baala (MR).- Il existe une multitude de mécanismes européens pour aider les États membres à divers égards, notamment au moyen de leviers financiers. C’est là l'une des grandes forces de l’Union européenne.

Dans le cadre du plan de relance Next Generation EU, un montant total de 806,9 milliards d’euros sera investi dans l’Union européenne. Selon les informations dont je dispose, la Belgique devrait recevoir 33,4 millions d’euros de subventions européennes. Cette somme, débloquée par le mécanisme React-EU - une subdivision du plan Next Generation EU -, permettrait à des personnes vulnérables de trouver un emploi. Les deux publics cibles sont les réfugiés ukrainiens et les demandeurs d’emploi et travailleurs vulnérables belges confrontés à des conditions précaires depuis le début de la crise sanitaire.

Au travers de ce budget, l’Union européenne souhaite mettre l’accent sur le développement des compétences numériques de ces travailleurs et chercheurs d’emploi. Pour rappel, en 2021, le mécanisme React-EU avait permis de financer la majorité des formations dispensées par Bruxelles Formation. Cela s'était traduit par deux grands projets, le premier portant sur des formations à haute valeur ajoutée, financées à 100 % par l’Union européenne à concurrence de près de 11,40 millions d'euros, l’autre était un tremplin financé à 50 % par React EU, pour un budget de quelque 1,035 millions d'euros.

Comment ce montant de 33,4 millions d’euros est-il ventilé entre les Régions ? Comment et sur la base de quels critères cette répartition a-t-elle été établie entre les trois Régions ?

Quand ces fonds seront-ils disponibles et liquidables pour la Région de Bruxelles-Capitale, si ce n’est pas déjà le cas ? Me confirmez-vous que ces fonds sont un complément aux aides Covid-19 déjà octroyées par l’Union européenne à la Belgique ?

Sous quelle forme concrète le gouvernement bruxellois a-t-il décidé d’aider les futurs bénéficiaires ? Dans quelle mesure ce nouveau budget sera-t-il distribué à Bruxelles Formation, comme ce fut le cas précédemment ?

Quelle est la date arrêtée pour le début de la mise en œuvre du plan d’action du gouvernement bruxellois sur l’utilisation de ces fonds ? À ce titre, une grille de critères a-t-elle été établie ou est-elle en cours d’élaboration pour l’octroi de ces aides aux bénéficiaires ? Combien de personnes seront-elles éligibles et combien de ces personnes serez-vous réellement en mesure d'aider ?

M. Bernard Clerfayt, ministre.- L’Union européenne a en effet mis en place des mécanismes de facilité et de soutien aux États membres pour faire face aux crises successives : la crise du coronavirus, puis celle liée à l’afflux des Ukrainiens fuyant la guerre et, enfin, la crise énergétique liée à la précédente.

Avant de vous répondre dans le détail, il est à noter que, pour l’accueil des bénéficiaires de la protection temporaire, il n’y a pas eu de nouveau financement, mais des facilités pour consommer des crédits budgétaires encore disponibles sur le Fonds de cohésion européen. La Région bruxelloise cherche toutefois à mobiliser au maximum le potentiel de financement proposé par l’Union européenne aux États membres.

En ce qui concerne la répartition du mécanisme React-UE, la Commission européenne a notifié à la Belgique, le 26 novembre 2021, le solde de 30 % des fonds React-UE, appelé React 2, lui revenant sur la base des dernières données statistiques. Il s'agit d'un montant global de 71.092.864 euros, dont 6.398.358 euros, soit 9 % de l’enveloppe belge, reviennent à la Région bruxelloise.

La répartition de ce solde entre les entités fédérées et le gouvernement fédéral a été décidée sur la base de la clé de répartition négociée en janvier 2021 pour répartir le budget européen prévu pour la mise en place du Plan national de reprise et de résilience ainsi que la première tranche de l’enveloppe dédiée au fonds React-UE.

L'État fédéral a reçu 10 %. Les 90 % restants ont été partagés entre les trois entités régionales : 47 % pour la Flandre, 34 % pour la Wallonie et 9 % pour Bruxelles. La part de l'État fédéral finance le programme du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD), qui vise l'alimentation des personnes les plus précarisées.

Les fonds REACT-UE ne sont pas « mis à disposition » de l’État membre, mais sont remboursés par la Commission européenne sur la base des dépenses qui lui sont déclarées. Il s’agit au départ d’enveloppes budgétaires intégrées dans les enveloppes budgétaires des différents programmes que sont le Fonds social européen (FSE), le Fonds européen de développement régional (Feder) et le FEAD pour la période 2014-2020. Les frais sont remboursés au rythme de la présentation des demandes de remboursement fournies par les autorités en charge de la gestion des différents programmes FSE, Feder et FEAD. Nous avançons les fonds et pouvons obtenir, sur la base des dépenses réelles, un remboursement des frais de la part de l'Union européenne.

Pour répondre à votre question sur l’inscription des fonds REACT-UE, ceux-ci viennent en sus des moyens liés à la facilité pour la reprise et la résilience. Ce dispositif vise à atténuer les conséquences économiques et sociales de la pandémie de Covid-19 et à rendre les économies et les sociétés européennes plus durables, plus résilientes et mieux préparées aux défis posés par les transitions écologique et numérique et aux possibilités qu’elles offrent.

L’initiative REACT-UE se distingue de la facilité pour la reprise et la résilience, car elle vise à apporter un soutien financier en faveur de la cohésion sociale et des territoires de l’Europe. Cette initiative s’inscrit dans le cadre des programmes liés à la politique de cohésion 2014-2020. Il s’agit de ressources supplémentaires exceptionnelles afin de fournir une assistance pour favoriser la réparation de la crise dans le contexte de la pandémie de Covid-19 et de préparer une reprise économique plus verte, plus numérique et plus résiliente.

En ce qui concerne votre question sur les bénéficiaires, vu le montant disponible et dans la continuité des actions soutenues par le biais de la première enveloppe React-EU, le gouvernement bruxellois a décidé de renforcer à hauteur de 2.800.000 euros les mesures de recherche active d’emploi actuellement soutenues par le programme FSE Emploi de la Région bruxelloise. L’objectif a été de continuer à répondre aux répercussions de la crise sanitaire, en particulier la lutte contre les inégalités qui tendent à se renforcer sur le marché de l’emploi.

Le gouvernement bruxellois a également décidé de renforcer le Fonds d’aide aux plus démunis (FEAD) à hauteur de 3.598.358 euros. L’objectif est de faire face à l’augmentation du nombre de demandes d’aide alimentaires reçues par le service public fédéral de programmation Intégration sociale et de pallier la future baisse de l’enveloppe FEAD prévue pour la période 2021-2027. Nous soutenons donc ce projet à hauteur d'environ 3.600.000 euros.

Enfin, sachez que les fonds React-EU sont intégrés dans les programmes de la politique de cohésion 2014-2020 et font l'objet des mêmes règles d’éligibilité. Les actions soutenues dans le cadre de la deuxième tranche de React-EU devaient être réalisées entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2022 au plus tard pour être éligibles à un cofinancement.

En ce qui concerne les bénéficiaires, nous estimons que les actions des ateliers de recherche active d’emploi soutenues grâce à l'enveloppe React-EU 2 permettront de toucher 5.500 chercheurs d’emploi bruxellois.

Nous n’avons pas encore le nombre de bénéficiaires du programme d’aide alimentaire géré par l'autorité fédérale pour la tranche React-EU 2, mais je peux d'ores et déjà vous annoncer que ce financement permettra l’achat de 26 produits alimentaires de première nécessité, qui seront distribués entre novembre 2022 et octobre 2023.

L’emploi et la formation professionnelle restent les principaux leviers pour assurer la prospérité des Bruxellois et de notre Région. Soyez donc assurée que le gouvernement bruxellois met tout en œuvre pour mobiliser les mécanismes offerts par l’Europe pour accompagner les Bruxellois vers de meilleures conditions de vie et limiter les répercussions des crises de ces dernières années.

Mme Latifa Aït Baala (MR).- Au sujet des réfugiés ukrainiens, vous dites qu'il n'y a pas de nouveau budget et qu'il s'agit de faire fructifier les fonds de cohésion existants. Or, nous savons que les politiques de mise à l'emploi de cette population particulière peuvent être considérées comme un échec, puisqu'en juillet 2022 seuls 10 % des réfugiés ukrainiens exerçaient un emploi et que ce chiffre avoisine à peine les 20 % aujourd'hui, alors que l'objectif était d'atteindre 80 %.

Quant à la répartition des fonds, elle correspond à peu près à la population de la Région de Bruxelles-Capitale, donc je n'ai pas de commentaire à faire à cet égard. Mes questions portaient davantage sur la recherche d'emploi, en particulier dans le secteur du numérique. En effet, les métiers du numérique sont aujourd'hui en plein essor et représentent une niche pour les populations les plus vulnérables, qui rencontrent des difficultés sur le marché de l'emploi ; le taux de chômage des jeunes avoisine en effet 40 % dans certains quartiers. Il faut former et accompagner ces populations, pour leur permettre d'accéder à ces métiers en pénurie.

Selon le président d'Agoria, 22.000 jobs du secteur technologique ne sont pas pourvus dans notre Région, alors qu'elle compte plus de 87.000 demandeurs d'emploi. Une meilleure adéquation entre l'offre et la demande devrait être possible, en l'occurrence. Pourtant, certaines initiatives, comme MolenGeek à Molenbeek, permettent aux jeunes de suivre une formation dans ce domaine. Je reviendrai sur ces éléments dans le cadre d'une question écrite.

M. Bernard Clerfayt, ministre.- Je ne vais pas rouvrir le débat sur toute une série de questions que vous posez et auxquelles je me ferai un plaisir de répondre. Je voudrais juste revenir sur les chiffres que vous citez relatifs au taux de mise à l'emploi des personnes qui bénéficient de la protection temporaire, je veux parler des Ukrainiens. On a vu ces derniers temps quelques articles de presse qui semblent indiquer que la réussite en Belgique de la mise à l'emploi de ces personnes était moindre qu'aux Pays-Bas : 80 % y auraient trouvé un emploi, alors qu'en Belgique, à Bruxelles, le taux se situe, de mémoire, entre 10 et 14 %. La Flandre n'est qu'à 20 %.

À mon sens, la tension sur le marché de l'emploi explique principalement le taux de réussite plus grand de la mise à l'emploi. Les Pays-Bas sont en plein emploi. Et nous parvenons à faire 14 à 15 % quand la Flandre est à 20 % en étant elle aussi en plein emploi. Le taux n'est donc pas satisfaisant dans l'absolu, mais il n'est pas à ce point mauvais. Surtout que la première difficulté est l'apprentissage de la langue qui est essentiel dans la plupart des emplois auxquels ces personnes peuvent postuler.

Je me ferais un plaisir de répondre à vos questions sur l'informatique et le numérique si vous me posez des questions spécifiques. Un bon tiers de l'offre de formation de Bruxelles Formation se situe dans ce secteur. Nous avons des programmes avec MolenGeek, BeCentral, toute une série d'opérateurs privés. Énormément de formations existent dans ce secteur, même si cela dépend du type de formation. On ne forme pas des ingénieurs informatiques, mais on forme des gens au codage en quelques mois. Une série d'emplois sont accessibles moyennant une formation courte, et il y a un nombre important d'offres en Région bruxelloise.

- L'incident est clos.