Présidence : M. Ibrahim Dönmez, président.

Demande d'explications de Mme Véronique Jamoulle

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant les récentes difficultés financières que rencontre le groupe Orpea.

M. le président.- En l'absence de Mme Véronique Jamoulle, sa demande d'explications est lue par Mme Delphine Chabbert.

Mme Delphine Chabbert (PS).- Le mercredi 26 janvier 2021 était publié « Les Fossoyeurs », un livre du journaliste indépendant Victor Castanet, sur le business des maisons de retraite privées en France. Cette publication a provoqué un scandale qui a ébranlé tout le pays. Plus particulièrement, le livre dénonce les défaillances d’Orpea, le n° 1 mondial des maisons de retraite, qui fait passer la rentabilité avant l’humain.

Le groupe est également présent dans 23 pays, dont la Belgique. Chez nous, Orpea exploite 80 maisons de repos et de soins et résidences-services - dont une vingtaine au sein de notre Région - pour plus de 7.200 lits. Il emploie plus de 4.200 personnes. C’est dire si nous sommes également concernés.

Depuis, le groupe Orpea s’est effondré sur les marchés et a perdu 90 % de sa valeur. Le 26 octobre dernier, l’entreprise a annoncé l’ouverture d’une nouvelle procédure amiable de conciliation devant le tribunal de commerce de Nanterre pour renégocier sa dette avec ses créanciers, soit un placement sous contrôle judiciaire.

Le nouveau PDG, Laurent Guillot , a expliqué cet état de fait par un endettement trop important, en raison du développement international et immobilier mené à un rythme effréné, à l’initiative de l’ancienne direction générale. Il n’hésite pas non plus à parler de détournements de fonds par l’ancienne équipe dirigeante. Plusieurs de ces centres de soins résidentiels figurent d’ailleurs sur la liste noire des services d’inspection belges.

Dans la foulée, le groupe français a mis sur la table une réorganisation majeure, qui n’exclut pas de quitter la Belgique. En effet, la Belgique se classe avec neuf autres dans la colonne des pays à restructurer ou à sortir du portefeuille, en raison de sa mauvaise rentabilité en tant qu’unité commerciale.

La situation financière difficile d’Orpea, sa mise sous protection judiciaire ainsi que sa réorganisation majeure, ne risquent-t-elles pas d’avoir un impact sur le terrain et une incidence sur le fonctionnement des activités du groupe, donc sur les résidents, le personnel et les fournisseurs ?

En France, plusieurs perquisitions ont été lancées depuis le 15 novembre dans des établissements du groupe privé Orpea, dans le cadre de l’enquête préliminaire pour maltraitance institutionnelle et infractions financières. Qu'en est-il de la Belgique et de Bruxelles en particulier ?

Où en est-on dans le nombre de plaintes concernant les établissements d’Orpea à Bruxelles (maltraitance, argent public mal utilisé, etc.) ? Combien de maisons de repos d'Orpea ont-elles fait l’objet d'un contrôle depuis janvier 2021 ?

Avez-vous eu écho d’éventuelles fraudes aux subventions publiques ? Pouvez-vous nous transmettre le dernier rapport de l'administration relatif aux maisons de repos d'Orpea ? Nous l'avions demandé au début de l'année dernière, mais nous n'avons encore rien reçu.

Enfin, avez-vous pris connaissance des déclarations de la nouvelle direction française, qui se veut rassurante ? Elle parle notamment d'une revalorisation des salaires et d’embauches. Le directeur général, Laurent Guillot, a fait part également de ses trois priorités : la sécurité des collaborateurs, la qualité du soin et de l’accompagnement et les pratiques éthiques et responsables. Toutefois, il a aussi déclaré que « toutes les options sont sur la table, y compris celle de réduire les activités à l’étranger ». Qu'en est-il de la Belgique ? Avez-vous des informations à ce sujet ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Concernant la publication au Moniteur belge, M. Vervoort, président du Collège réuni, a envoyé le texte avec demande de publication le 14 décembre.

Je propose que nous ne débattions pas à nouveau de l’ordonnance aujourd’hui. Elle a été votée à une large majorité. Je vais toutefois répondre de manière structurée à l’ensemble de vos questions, en commençant par celles qui portent spécifiquement sur le groupe Orpea.

(poursuivant en français)

J’en viens à vos questions relatives à la situation financière d’Orpea et aux éventuelles intentions du groupe. Iriscare, qui est en contact permanent avec les institutions qu’il agrée, ne dispose d’aucune information officielle en la matière.

(poursuivant en français)

Vous savez probablement qu'Orpea a désigné un nouveau directeur en charge de l'Europe du nord, à la fin de l’année 2022. Ce dernier a sollicité une rencontre officielle avec mon cabinet. Je l’ai rencontré ce lundi 16 janvier. Nous avons eu un échange concernant la réforme en cours du secteur des maisons de repos, en ce compris la mise en œuvre, les arrêtés etc., ainsi que la situation du groupe, notamment à Bruxelles. Il en ressort que la situation financière d’Orpea en Belgique serait difficile, compte tenu de la fragilisation du groupe à la suite du scandale révélé en 2022 auquel vous faites référence dans vos questions. Des raisons structurelles liées à la suroffre de lits à Bruxelles compliqueraient encore davantage la situation.

Pour autant, aucun scénario précis concernant l'avenir des établissements du groupe n’a été confirmé. Toutes les pistes de réflexion seraient ouvertes. Nous avons convenu de rester en contact régulier, afin de suivre la situation de près. Orpea étant l'opérateur d'un nombre important de lits à Bruxelles, sa gestion de la situation à l'avenir est importante.

Quant à la suite d’une éventuelle fermeture d’une maison de repos, d’Orpea ou d'un autre opérateur, la nouvelle ordonnance du 15 décembre 2022 prévoit, en son article 19, que l'agrément et l’autorisation spécifique de mise en service et d'exploitation échoit de plein droit, en cas de fermeture volontaire par un gestionnaire de tout ou partie des places agréées. En outre, l'ordonnance précise en son article 7, que « aucune autorisation pour l'exploitation de places en maisons de repos ne sera octroyée aux établissements appartenant au secteur privé à but lucratif, tant que ce secteur représente une part de plus de 50 % du total des places qui sont agréées en tant que places de maison de repos ». Si une maison de repos commerciale décide de fermer un établissement, elle perd donc son autorisation d'exploiter les places de maisons de repos et, a priori, ne pourra obtenir de nouvelle autorisation.

Par ailleurs, la nouvelle ordonnance prévoit également que, tant que le nombre de places de maison de repos qui bénéficient d’une autorisation restera supérieur au nombre de places prévues dans la programmation transitoire en vertu de l'ordonnance, aucune nouvelle autorisation ne sera octroyée.

Enfin, la possibilité de cession de lits, autorisée entre gestionnaires, est supprimée. Toutefois, dans le cadre de la programmation à venir, le Collège réuni déterminera un certain nombre de lits qui pourront être attribués chaque année, en fonction des besoins, pour les nouveaux projets de création ou d'extension d'établissements répondant aux critères de qualité fixés dans l’ordonnance.

Autrement dit, les lits récupérés à la suite d'éventuelles fermetures dans le secteur commercial seront réattribués, au travers de la programmation, aux institutions répondant adéquatement aux critères de qualité fixés dans l’ordonnance et appartenant aux secteurs public et associatif, tant que le quota de 50 % ne sera pas atteint.

En ce qui concerne les hausses des prix de journée demandés aux résidents, Iriscare n'est pas en mesure de connaître les raisons exactes de l'indexation des prix pratiquée par les établissements pour personnes âgées. En effet, la procédure simplifiée d'indexation des prix prévue par l'arrêté ministériel du 12 août 2005 n'oblige pas les institutions à remettre à Iriscare la raison de la hausse des prix, mais uniquement le calcul appliqué tel que décrit à l'article 5, paragraphe 1er dudit arrêté.

Plusieurs raisons peuvent donc pousser les établissements à indexer leurs prix d'hébergement au regard de l'évolution de l'indice des prix à la consommation. Il peut s'agir d'une augmentation des charges d'exploitation récurrentes, dont la rémunération du personnel, des prix de produits et matières consommables, de diverses fournitures et de petits matériels consommables, du prix du gaz, de l'électricité et de l'eau, etc.

Iriscare est donc informé si l'établissement a augmenté ses prix pour s'aligner sur l'évolution de l'indice des prix à la consommation, mais sans en connaître les raisons précises. Certains établissements indexent leurs prix systématiquement chaque année, d'autres à chaque saut d'indice pivot, d'autres encore n'indexent pas pendant plusieurs années.

Cela dit, afin de maintenir l’accessibilité financière des institutions dans le contexte que nous connaissons, le Collège réuni a prévu une enveloppe budgétaire pour aider les institutions de santé bruxelloises, dont les maisons de repos. Les montants dégagés pour le secteur des maisons de repos, en particulier en 2022, sont les suivants :

- pour les maisons de repos commerciales, 1.730.000 euros ;

- pour les maisons de repos publiques, 691.000 euros ;

- pour les maisons de repos associatives, 418.075 euros.

Pour pouvoir bénéficier de cette aide, les maisons de repos devaient notamment garantir de ne pas avoir compensé un éventuel surcoût énergétique par le biais de leur politique tarifaire. Si une hausse des prix est intervenue dans les maisons de repos concernées, elle ne répondait dès lors pas à l'augmentation des coûts de l'énergie.

Au-delà de ce contexte particulier, l’accessibilité financière des institutions est bien entendu au cœur de notre action. La nouvelle ordonnance prévoit d'évaluer toute nouvelle demande d'autorisation spécifique de mise en service et d'exploitation pour les maisons de repos, les centres de soins de jour et les courts séjours, sur la base de critères de qualité, dont l'accessibilité financière de l'établissement. Les modalités d’évaluation de ces critères sont en cours d'élaboration. Elles seront fixées par le Collège réuni dans un arrêté d'exécution de l'ordonnance qui entrera en vigueur fin 2023, afin que la réforme soit pleinement mise en œuvre au 1er  janvier 2024.

Ces critères seront également d’application pour attribuer de nouveaux lits, quand les besoins s’en feront sentir. Je rappelle que ce n'est actuellement pas le cas, puisque 25 % des lits agréés sont structurellement vides.

Comme annoncé à plusieurs reprises, et notamment lors des débats relatifs à la nouvelle ordonnance, les normes d’encadrement vont être rehaussées. L’augmentation des normes - et donc des financements - concernera prioritairement des kinésithérapeutes, ergothérapeutes, logopèdes et éducateurs ; autrement dit, du personnel non soignant dont la mission est d’appuyer le caractère communautaire des maisons de repos, tout en soulageant le personnel soignant. Le projet d’arrêté en la matière sera soumis au Collège Réuni en première lecture dans les semaines à venir. L'ambition est que l'ensemble des arrêtés puissent entrer en vigueur au 1er janvier prochain.

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Le nouveau régime d'inspection est progressivement mis en place. Dix nouveaux inspecteurs sont opérationnels au sein d'Iriscare depuis le 1er janvier 2023. Ils réalisent un travail d'inspection mais aussi d'accompagnement dans le cadre de la nouvelle logique d'inspection, plus intelligente. L'arrêté sur les sanctions intermédiaires a été approuvé aujourd'hui par le Collège réuni. Quant aux premiers retours des fédérations des maisons de repos sur le nouveau mode d'inspection, ils sont positifs.

Je partage les inquiétudes par rapport à l'avenir du groupe Orpea, qui est en difficulté, comme on peut lire dans la presse. En effet, il a perdu 90 % de sa capitalisation boursière et a lui-même admis certaines dérives, non seulement en matière de gestion, mais aussi de spéculation foncière ou d'achats excessifs de structures dans différents pays.

Le groupe a reconnu que son surplus de lits était problématique, y compris en Belgique et plus particulièrement à Bruxelles. J'ai déjà eu l'occasion de vous en informer lors de la discussion de l'ordonnance. Il était donc normal pour moi de répondre à la demande d'échanges et de discussions émanant du directeur général d'Orpea actif en Belgique. Cela dit, vous imaginez bien que, surtout dans la situation actuelle, le groupe encadre sa communication.

Si Orpea devait décider de fermer l'une ou l'autre maison de repos, nous serions évidemment attentifs à la façon dont cela se passe, au respect des résidents et du personnel, et à l'application de l'ensemble des dispositions légales.

De toute façon, il y a tellement de lits vides dans différentes institutions, y compris celles d'Orpea, que si - pure supputation - Orpea fermait des maisons de repos, il y aurait largement assez de places pour répartir les candidats, notamment grâce au système de récupération.

Mon cabinet et Iriscare suivent de très près l'évolution de la situation.

- Les incidents sont clos.

Question orale de M. Geoffroy Coomans de Brachène

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant la « puff », cigarette électronique tendance chez les jeunes.

M. Geoffroy Coomans de Brachène (MR).- Le 17 février dernier, nous avions pu échanger sur la problématique de la « puff » au sein de cette commission. J'ai pu faire part à plusieurs reprises de mon inquiétude au sujet de certaines drogues qui sont très facilement accessibles pour les jeunes, dont l’utilisation fréquente et dangereuse du gaz hilarant. En effet, ce détournement à des fins festives peut avoir des conséquences graves à court mais aussi à long terme sur la santé.

La puff est une cigarette électronique jetable très demandée par des jeunes dès 14 ans, et ce malgré l’interdiction de vente aux mineurs. Elle est petite, colorée et sucrée, et coûte entre 8 et 12 euros. Facile d’utilisation, elle permet de prendre entre 250 et 800 bouffées, avant de s’en débarrasser. Elle contient une batterie au lithium qui, jetée à la poubelle, pollue énormément.

Selon un tabacologue, la puff contient des sels de nicotine avec un pH (indice d'acidité) modifié pour être moins irritant. Elle agit comme pour une cigarette classique, parvient rapidement au cerveau et crée vite une dépendance.

Le SPF Santé publique avait inclus l’interdiction de la puff dans la proposition de modification de l’arrêté royal du 28 octobre 2016, qui réglemente la commercialisation de ces cigarettes. Mais la Commission européenne a fait observer que l’interdiction d’une catégorie de production particulière dans un État membre est uniquement possible pour des motifs qui sont liés à la situation spécifique du pays concerné.

C’est pourquoi le SPF Santé publique a préparé un dossier rassemblant des arguments pour justifier cette interdiction, qui devrait arriver tout prochainement sur la table européenne, si ce n’est déjà fait. La Commission européenne a ensuite six mois pour l’évaluer. La Belgique croise donc les doigts, le ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke, rappelant son intention claire d’y parvenir.

La prévention de la consommation de tabac sous toutes ses formes, y compris les cigarettes électroniques, et spécifiquement chez les jeunes, fait partie des objectifs du plan d’action bruxellois pluriannuel de prévention et de gestion du tabac et de la Fondation contre la tuberculose et les affections respiratoires (Belgian Lung and Tuberculosis Association, Belta). En cette première année de pilotage du plan sur le phénomène de la vape, quelle en est l’évaluation ? Quels sont les objectifs pour 2022-2023, sachant que les subsides de Belta ont été augmentés de 100.000 euros ?

Disposez-vous de chiffres, ou au moins de tendances, quant à l’utilisation de la puff au sein de notre ville-région ?

D’après le SPF Santé publique, la Région bruxelloise est celle qui détient le plus d’infractions en matière d’interdiction de fumer. Quelles mesures ont été déployées par vos services pour diminuer ce triste résultat et de quels moyens disposent-ils ?

Une étude sur l’augmentation des déchets dangereux liés aux batteries est-elle prévue ? Cela devrait également vous intéresser en tant que ministre chargé de l'Environnement.

Une campagne de sensibilisation est-elle au programme, notamment auprès des publics les plus jeunes et les plus susceptibles de développer cette forte addiction ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Le plan bruxellois de prévention et de gestion du tabagisme et de la vape, lancé en 2019 sous l’égide de la Fondation contre la tuberculose et les affections respiratoires (Belgian Lung and Tuberculosis Association, Belta), organisme coupole regroupant le Fonds des affections respiratoires (Fares) et l’association flamande pour les soins de santé respiratoire et la lutte contre la tuberculose, en est actuellement à sa quatrième année de pilotage, et ce, à budget constant depuis 2019.

Les nouveaux usages dérivés de la cigarette « classique » sont inclus dans les actions de prévention développées par le Fares, en tant qu’acteur de prévention, dans le cadre du nouveau plan de promotion santé 2023-2027. Ces actions visent à réduire l’initiation au tabagisme et aux produits considérés comme similaires, dont la puff.

Le plan de prévention et de gestion du tabagisme et de la vape (2019-2030), qui se veut le reflet d’une articulation des compétences entre la Cocof et la Cocom, reprend lui aussi cet objectif. Il est en effet judicieux de renforcer la capacité de chacun à prendre des décisions favorables à son bien-être, en lui permettant de s’interroger en connaissance de cause sur la consommation de produits du tabac ou considérés comme similaires, sans jugement ni parti pris.

Vu l’apparition récente de la puff, nous ne disposons pas encore de chiffres d’utilisation pour la Région de Bruxelles-Capitale.

En juin dernier, le service Prévention tabac du Fares et ses partenaires ont toutefois mené un sondage sur la puff auprès de jeunes âgés de 11 à 24 ans, pour jauger directement leur perception et leur usage de la puff. Cette enquête servira également de base pour mener des actions de prévention destinées à ce public.

Le SPF Santé publique s’est appuyé sur ces résultats pour débattre de la question au niveau politique, afin notamment d'établir la position à adopter et contribuer à l’argumentaire d’un dossier introduit sur cette thématique au niveau européen.

Les principaux résultats du sondage montrent que :

- la majorité des jeunes (65 %) connaissent la puff, pourtant apparue en décembre 2021. Ils l’ont découverte principalement à l’école et dans la rue ;

- la plupart des répondants (60 %) identifient facilement les points de vente où ils pourraient directement se procurer une puff : principalement dans les magasins de nuit et les librairies ;

- sur les 168 jeunes qui connaissent la puff, près d’un quart (24 %) la consomment.

Vous m'interrogez sur le nombre d’infractions à l'interdiction de fumer. Le plan a également pour objectif d’augmenter l’aide au sevrage tabagique et de contribuer à réduire l’exposition au tabagisme et à la vape à Bruxelles, compte tenu des spécificités de la population bruxelloise. Ce plan a donc été renforcé en vue de suivre l’évolution des spécificités et priorités et de réduire les inégalités sociales de santé. Il développe une offre pluridisciplinaire et variée d’aide à la gestion du tabagisme des adultes et des jeunes, y compris ceux issus de groupes à risques, en tenant en compte des spécificités multiculturelles et de genre.

En complément, les communes sont mobilisées afin de développer des actions locales de sensibilisation à la gestion du tabagisme actif et passif. Nous organisons également, par l'intermédiaire du Fonds des affections respiratoires, une formation continuée en tabacologie qui contribue à augmenter les compétences des professionnels de santé. Cette formation est proposée par l'Institut Jules Bordet et Tabacstop.

En ce qui concerne l’étude sur l'augmentation des déchets dangereux liés aux batteries, cette question relève des compétences de la propreté et de l'environnement et non de la santé. À ce stade, selon les services de Bruxelles Environnement, aucune étude n'est prévue étant donné la prochaine interdiction de la puff en Belgique.

Pour ce qui est des campagnes de sensibilisation auprès des publics les plus jeunes, à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac instituée par l’Organisation mondiale de la santé, une semaine sans tabac aura lieu en Région bruxelloise du 25 au 31 mai 2023. L'édition précédente remonte à 2020. Cette campagne vise autant à remettre en question la consommation de tabac et de la vape en tant que produit du tabac qu’à permettre à chacun, à chances égales, de disposer de toutes les ressources nécessaires afin de choisir en connaissance de cause de s’émanciper du tabagisme ou de la vape, sous leurs formes active ou passive.

Pour étendre sa visibilité, le Fonds des affections respiratoires et l'association flamande pour les soins de santé respiratoire et la lutte contre la tuberculose sont présents sur les réseaux sociaux, ce qui leur permet entre autres de toucher les jeunes.

M. Geoffroy Coomans de Brachène (MR).- Nous partageons la même ambition de réduire la consommation de tabac. Nous pouvons nous réjouir, car j'ai entendu ces derniers jours qu'entre 2021 et 2022, la consommation dans notre pays est passée de 29 à 24 %. Si cette tendance à la baisse se poursuit, nous pouvons commencer à rêver d'une éradication du tabac dans cinq ans.

Nous prenons conscience du caractère dangereux de ce type de consommation. J'entends que les publics les plus précarisés sont souvent les plus concernés. Nous devrions peut-être mener une étude qui tiendrait compte de ce critère.

Nous savons que l'utilisation de tabac, ou en l'occurrence la puff, est un fléau pour la santé, y compris celle pour l'entourage - les enfants sont parfois des victimes collatérales. La puff vise directement le public jeune. Il s'agit également d'un fléau pour le portefeuille et pour l'environnement.

D'aucuns prétendent que la cigarette électronique aide à se sevrer du tabac. Je crains qu'en raison de son positionnement, elle aide plutôt à commencer à en consommer. Nous devons fermer cette porte d'entrée au plus vite. Ni vous ni moi n'avons envie que nos enfants en deviennent adeptes.

- L'incident est clos.

M. Fouad Ahidar (one.brussels-Vooruit).- Comment expliquer que le comptage entamé par Bruss'help au mois de novembre ne soit toujours pas terminé deux mois plus tard ?

Avez-vous l'intention de prendre contact avec la Régie des bâtiments ?

Quand je parle de la prison, je ne pense pas aux cellules, mais à tous les bâtiments administratifs, bureaux et locaux qui pourraient héberger des publics vulnérables.

Je suis convaincu de votre bonne volonté et de votre intention d'héberger un maximum de personnes dans un bâtiment propre, où ils puissent réfléchir à leur avenir au lieu de supporter des températures glaciales.

Mais comment expliquer que quelque 50 à 80 demandeurs d'asile dorment au bord du canal s'il y a suffisamment de places d'accueil ? Pourquoi ces personnes ne trouvent-elles pas le chemin de l'hébergement disponible ? S'agit-il d'un refus de leur part ou d'un réel manque de places ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Comme expliqué, la prison ne nous semble pas une option intéressante, et ce, pour toutes les raisons que j'ai données, à commencer par son piteux état, y compris celui des bâtiments administratifs. Néanmoins, la Région a mis en place un groupe de travail afin de trouver d'autres bâtiments, dans un premier temps pour les réfugiés ukrainiens et ensuite pour répondre à la question de la crise de l'asile en général et à l'incapacité de Fedasil d'héberger l'ensemble des populations qui relèvent de sa responsabilité, à savoir les personnes ayant introduit une demande et disposant du document administratif ad hoc. Des centaines voire des milliers de ces personnes se retrouvent en effet à la rue, sans prise en charge mais sous la responsabilité de Fedasil.

C'est une réalité que nous subissons depuis plusieurs mois. Des discussions avec le gouvernement fédéral sont menées à cet égard. Certaines aboutissent, certes, mais les résultats restent insuffisants.

Par ailleurs, il n'y a pas encore véritablement de volonté de changer le logiciel de la politique d'asile. Il faudrait disposer structurellement d'un nombre de places ouvertes, quitte à ce que certaines restent une partie du temps inoccupées, de sorte à absorber une nouvelle augmentation du nombre de personnes. Cette politique n'est pas encore vraiment endossée au niveau fédéral. Ainsi, le fédéral ne dispose pas toujours des bâtiments et du personnel nécessaires pour assumer sa part de responsabilité.

Il en va de même pour la situation de séjour des réfugiés. En effet, tous ceux qui sont pris en charge par Fedasil - ou devraient l'être - n'obtiennent pas forcément le droit de séjour. Or, ils se trouvent dans notre Région et les autorités fédérales ne s'en préoccupent pas. Ce sont autant d'éléments qui sont finalement à la charge de la Région. Telle est la réalité !

Depuis le début de la législature, nous créons un grand nombre de nouvelles places, que nous finançons dans le cadre du budget de M. Vervoort. Toutes ces places sont destinées à accueillir des migrants au sens large du terme.

Sachez également que la majorité des places relevant de ma compétence en matière d'aide aux personnes sans abri sont des places d'urgence, dans les centres d'urgence, et sont aussi occupées par des personnes qui soit dépendent de Fedasil, soit sont sans papiers, alors qu'il ne nous incombe a priori pas de nous en occuper. Une bonne partie des budgets votés en Cocom supplée déjà les carences du pouvoir fédéral.

Par ailleurs, deux tiers des personnes sans papiers se trouvent à Bruxelles. Nous accueillons donc l'essentiel de la problématique, sans soutien fédéral. Je ne peux donc que vous encourager, comme je le fais également de mon côté, à faire pression, directement ou indirectement par le biais de nos divers relais politiques, sur le gouvernement fédéral afin qu'il saisisse enfin cette question à bras-le-corps.

Je pense très sincèrement que la Région, essentiellement à travers les compétences de M. Vervoort, fait le maximum pour créer de nouvelles places d'urgence, financer de l'accompagnement, suppléer les carences, etc. Cependant, à un moment donné, il faut trouver une solution plus globale et je regrette, tout comme vous, que des êtres humains soient les otages de cette situation.

- L'incident est clos.

Question orale de Mme Magali Plovie

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant les projets pilotes de résidences-services, leur développement et leur accessibilité financière.

Mme Magali Plovie (Ecolo).- Très récemment, nous avons discuté au sein de cette commission du projet d’ordonnance visant à modifier l’ordonnance du 24 avril 2008 relative aux établissements d’accueil ou d’hébergement pour personnes âgées.

Lors de votre exposé introductif, vous précisiez avoir « massivement investi dans le développement de "résidences-services sociales" ces deux dernières années, au travers de deux appels à projets. En 2021 et 2022, près de 2 millions d’euros ont été investis pour soutenir le développement des infrastructures de trois projets concrets, et la norme de croissance d’Iriscare a été mise à contribution pour en financer structurellement le fonctionnement. L’idée derrière ces projets est simple : nous voulons développer des structures agréées comme résidences-services qui vont plus loin que l’agrément et mettent en œuvre une politique de prix accessibles, tout en proposant un projet de vie communautaire renforcé ».

Effectivement, il est nécessaire de proposer, parallèlement aux maisons de repos qui sont destinées, en principe, à des personnes en situation de plus grande dépendance, d'autres solutions pour répondre à la diversité des demandes et des choix de vie des personnes âgées. Les résidences-services, qui accueillent des personnes âgées de plus de 60 ans, permettent de répondre à leur demande de continuer à mener une vie indépendante tout en bénéficiant de services auxquels elles peuvent faire librement appel. Favorisant l’autonomie, la liberté de choix, l’épanouissement des personnes, ces résidences-services, lorsqu’elles prennent la forme de structures agréées et que leur accessibilité financière est assurée, représentent une avancée évidente pour notre société.

Toutefois, ces dernières décennies, la plupart des projets de résidences-services qui ont vu le jour étaient des projets commerciaux, donc extrêmement chers et de fait peu accessibles. Or, vous insistiez lors de votre exposé sur le côté social de ces résidences-services et faisiez part de votre volonté de sélectionner les projets sur la base de leur politique de prix accessibles, ce que nous saluons.

Vous parlez de deux projets pilotes et de trois projets concrets. Faut-il entendre qu'un projet, qui n'aurait pas encore été sélectionné, viendrait s'ajouter à ces deux projets ? Quels sont ces projets ? Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Quelles sont les avancées observables de ces projets pilotes ? Les observations actuelles sont-elles positives ? Dans le cas contraire, des aménagements sont-ils prévus ? Est-il d’ores et déjà prévu d’augmenter le nombre de ces projets pilotes ?

Disposez-vous d’un calendrier de mise en œuvre et d’analyse de cette politique publique et de ses effets ?

Qui gère ces résidences-services et qui s’y occupe des admissions ? Ces résidences-services peuvent en effet être organisées dans le cadre du logement social.

Quelles modifications législatives sont étudiées par votre cabinet ?

Quels moyens sont utilisés, outre la norme de croissance d’Iriscare, pour rendre ces résidences-services accessibles ? S’il n’y en a pas d’autres, cette norme de croissance suffira-t-elle à offrir des solutions accessibles à moyen et long termes ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Dans un premier temps, Iriscare a lancé un appel à projets destiné à la création de résidences-services sociales en 2021.

Près de 780.000 euros au total ont été répartis entre trois organisations candidates des secteurs privé et public, pour leur permettre de déployer leurs activités entre le dernier trimestre 2021 et le 31 décembre 2022.

Il s'agit des projets suivants :

- projet de résidence-services sociale Lemaire du CPAS de Molenbeek en partenariat avec Le Logement molenbeekois : le financement soutient la construction et l'aménagement des espaces communs d'une résidence-services sociale composée de 31 logements sociaux ;

- projet de résidence Alliance Habitat Vieillesse heureuse du CPAS de Molenbeek en partenariat avec la Société du logement de la Région de Bruxelles-Capitale : le financement soutient la construction d'une résidence-services sociale regroupant 24 résidences-studios ;

- projet Tisseurs de liens de la Centrale de services à domicile en partenariat avec les ASBL Bras dessus Bras dessous et Senior Montessori : le financement soutient la réalisation d'une étude de faisabilité permettant de conceptualiser et de modéliser une résidence-services sociale. La Centrale de services à domicile et ses partenaires souhaitent créer une résidence-services sociale à partir du modèle qui sera ainsi dégagé.

Dans un second temps, les services du Collège réuni ont également lancé un appel à projets en juillet 2022 afin de financer des projets d'investissement en infrastructures visant la création de résidences-services sociales sur le territoire bruxellois. Cet appel à projets s'est clôturé le 15 août 2022.

Un budget de 1,1 million d'euros a été débloqué en vue de financer jusqu'à 60 % du montant des travaux. La répartition du budget entre les candidats retenus a été approuvée en décembre 2022.

Il s’agit des trois projets suivants :

- résidence-services sociale Lemaire du CPAS de Molenbeek ;

- projet de résidence Alliance Habitat Vieillesse heureuse du CPAS de Molenbeek ;

- projet de studios de résidence-services sociale de l'ASBL Les Trois Pommiers : le financement soutient l'amélioration du confort de cinq studios aménagés en résidence-services sociale dans l'immeuble des Trois Pommiers.

J’en viens au suivi des projets pilotes. La convention qui encadre l'octroi des subsides dans le cadre des appels à projets prévoit la tenue d'un comité d'accompagnement composé d'experts d'Iriscare. Ce comité a pour rôle d'évaluer l'avancement du projet, de contrôler le respect des engagements pris par l'organisation et de suggérer des améliorations, des modifications et de prendre des mesures permettant de garantir la bonne exécution du projet.

Il ressort des réunions du comité d'accompagnement que :

- la résidence-services sociale Lemaire a entamé ses activités le 1er juillet 2022. Les porteurs du projet ont travaillé sur l'occupation des locaux, dont certaines infrastructures sont encore en cours de développement et sont financées par le deuxième appel à projets. Le CPAS de Molenbeek-Saint-Jean a également présenté le projet de vie aux résidents. Il a travaillé à la description des services de base et est en train de faire l'inventaire des besoins des résidents en ce qui concerne les services facultatifs et les activités à mettre en place ;

- le projet de résidence « Vieillesse heureuse » de l'alliance habitat est en cours d'élaboration. La période allant de novembre 2021 à février 2022 a été consacrée à constituer le dossier pour l'introduction du permis d'urbanisme. Celui-ci a été introduit le 14 février 2022 ;

- le projet « Tisseurs de liens » de la Centrale de services à domicile (CSD) a réalisé son objectif par la finalisation de son étude de faisabilité. Elle sera présentée au secteur en janvier 2023. La CSD et ses partenaires travaillent à la création d'une résidence-services sociale comprenant 26 logements pour personnes âgées et 4 logements destinés à des familles et étudiants, avec des espaces de vie communs offrant des services et des activités pour les résidents et les habitants du quartier. La résidence sera logée dans le grand bâtiment actuel de la CSD, situé dans le haut de Saint-Gilles.

S'agissant des actions à venir, il est nécessaire de définir formellement ce qu'est une résidence-services sociale, à savoir sa dimension sociale. Cette définition devra être introduite dans la réglementation afin que la résidence-services sociale soit reconnue comme établissement pour personnes âgées et intégrée dans la programmation.

Nous devrons ensuite créer ou adapter les conditions et normes d'agrément pour les résidences-services sociales, à savoir, notamment, le public accueilli, les pouvoirs organisateurs, l'accompagnement et les services, l'ouverture sur le quartier, l'organisation et la participation des résidents et les normes architecturales.

Enfin, nous entendons développer un financement adapté pour les résidences-services sociales afin que leur gestion et leur accessibilité soient garanties. Celui-ci sera intégré dans un arrêté du Collège réuni fixant le montant et les conditions d'octroi de financement pour les résidences-services sociales.

Tous ces chantiers réglementaires sont entamés. Ils se poursuivront jusqu’en 2024, vu l’ampleur de la tâche et la réforme des maisons de repos en cours, qui occupent beaucoup les équipes d’Iriscare et mon cabinet.

Mme Magali Plovie (Ecolo).- Nous pouvons nous réjouir de ces avancées. S'agissant de projets novateurs, il est normal de tâtonner avant de définir la bonne direction.

Il est important, en effet, qu'Iriscare soit présent au sein des comités d'accompagnement pour identifier les difficultés, les points à améliorer et vous aider, ce faisant, à rédiger les futures normes.

J'espère que la révision des normes aboutira avant la fin de la législature, pour développer à plus large échelle des résidences-services. Il en faudrait au minimum une par commune. Ces résidences-services constituent des solutions alternatives sérieuses aux maisons de repos, car l'autonomie est maintenue, tout en luttant contre le sentiment de solitude que ressentent beaucoup de personnes âgées lorsqu'elles restent seules chez elles.

- L'incident est clos.

Question orale de Mme Delphine Chabbert

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant la guidance à domicile.

Mme Delphine Chabbert (PS).- L’ordonnance de la Cocom du 14 juin 2018 relative à l’aide d’urgence et à l’insertion des personnes sans abri prévoit la reconnaissance et subsidiation du post-hébergement après un séjour en maison d’accueil. Ce service de guidance à domicile permet la continuité, à plus long terme, du travail psycho-social entamé lors du séjour, afin d’éviter le retour en rue, en institution, la réapparition de problèmes d’ordre matériel ou financier et de faciliter la recherche de l’aide adéquate.

Selon l’article 29, §1er de cette ordonnance, les organismes sont agréés pour l’accomplissement d’un ou plusieurs services visés pour une période renouvelable de cinq ans maximum. À la suite de cela, une demande d’autorisation de fonctionnement provisoire doit être déposée pour une durée de 18 mois.

Pourtant, il me revient que ces délais ne reflètent pas la réalité du terrain et que les besoins d’accompagnement post-hébergement dépassent très souvent cette durée. Par ailleurs, une personne sans abri qui satisfait aux conditions légales reprises dans l'ordonnance - notamment être majeure - a normalement droit au revenu d'intégration sociale. Dans le cas de personnes sans abri accompagnées d’enfants, seuls les adultes ont droit à ce revenu.

Combien de personnes bénéficient du service de guidance à domicile post-hébergement ? Quel budget y est alloué ? S'agissant d'un service permettant d'éviter de retomber dans le sans-abrisme, il me semble important.

Une adaptation du délai de cinq ans initialement prévu par l’ordonnance de 2018 est-elle à l’ordre du jour ? Dans la négative, une évaluation plus approfondie est-elle prévue ?

Disposez-vous de chiffres plus précis en ce qui concerne le nombre de personnes sans abri avec enfants ? Y a-t-il une perspective d’élargissement du dispositif d’intégration sociale aux enfants sans abri ? Un autre dispositif d’aide aux personnes sans abri avec enfants est-il à l’ordre du jour ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Il y a lieu de distinguer, conformément à la réglementation en vigueur en Cocof et en Cocom, l’accompagnement post-hébergement réalisé par les maisons d’accueil et la guidance à domicile réalisée par les services du même nom agréés par la Cocom.

Ces deux types d’opérateurs sont complémentaires et il importe que les maisons d’accueil - dont le métier premier est d’accueillir et accompagner vers la solution d’après la maison d’accueil - mettent tout en œuvre pour établir des partenariats avec les services de guidance à domicile, dans une logique de passage de témoin, au meilleur bénéfice des personnes et familles concernées.

Concernant le nombre de personnes bénéficiant d’un accompagnement post-hébergement assuré par l’une des maisons d’accueil agréées par la Cocom, les rapports d’activité des six maisons d’accueil pour l’année 2021 permettent d’identifier que 127 personnes ont bénéficié de ce type d’accompagnement.

Quant à la capacité d’accompagnement et le budget de la guidance à domicile, en 2022, le budget total pour les onze services de guidance à domicile était de 2.826.000 euros, pour une capacité d’accompagnement d'environ 660 personnes et familles. À ce budget s'ajoutent les nombreuses subventions octroyées dans le cadre de projets de relogement, qui offrent un accompagnement similaire à de la guidance à domicile.

Le budget prévu en 2023 pour la guidance à domicile est de 3.255.000 euros, soit une augmentation substantielle. À ce budget s’ajoute le montant, en cours de calcul par l’administration, permettant de porter la capacité d’accompagnement des services de guidance à domicile de 660 à 900 personnes dans les semaines à venir. Cette augmentation se traduira par le renforcement de neuf services et la création d’un nouveau service par l’ASBL Escale, à la suite d'un appel à projets lancé en juillet 2022.

Ceci permet de renforcer considérablement la prévention de perte de logement et de contribuer au succès du relogement durable de personnes sortant d’une situation de sans-abrisme ou de mal-logement.

Concernant le délai de cinq ans que vous évoquez, évitons la confusion : il s'agit en réalité de la durée de l'agrément octroyé à la maison d'accueil, après que celle-ci a bénéficié d'une autorisation de fonctionnement provisoire de 18 mois. Elle diffère de la durée d'hébergement au sein d'une maison d'accueil, de même que de la durée de l’accompagnement post-hébergement.

La durée de l'agrément est limitée à cinq ans afin de garantir que la maison d'accueil continue à respecter les normes d'agrément.

La durée de l'hébergement au sein de la maison d'accueil est limitée à deux ans après la date d'entrée de l'usager en maison d'accueil. Cette période peut être prolongée, conformément à l'article 70 de l'arrêté du Collège réuni du 9 mai 2019 relatif à l'agrément et au mode de subventionnement des centres d'aide d'urgence et d'insertion.

La durée de la mission de post-hébergement est limitée à trois mois, renouvelable une fois, en vertu de l'article 65 dudit arrêté. Cette limite se justifie par le fait que les missions de post-hébergement des maisons d'accueil ne doivent pas empiéter sur les missions des services de guidance à domicile, comme je l’expliquais précédemment. Le renforcement de ces services doit permettre d’accroître les collaborations entre ces deux types d’opérateurs.

Je ne dispose pas d’informations actualisées sur le nombre de personnes sans abri avec enfants. Ces chiffres seront connus dès que l'ASBL Bruss'help aura finalisé l'analyse des données collectées lors du dénombrement, ce qui devrait prendre plusieurs mois.

Quant aux modalités de l'intervention financière des CPAS destinée aux enfants, elles ne relèvent pas des compétences de la Cocom. La détermination du montant du revenu d’intégration sociale ou de son équivalent tient compte du fait que l’adulte a ou non des enfants à charge, indépendamment des allocations familiales.

La prise en charge, par les CPAS, du coût relatif à l’hébergement d’enfants accompagnant leurs parents dans les maisons d’accueil est analysée dans le cadre du chantier relatif à la contribution financière des personnes hébergées en maison d’accueil. Cette question est cruciale : ces enfants occasionnent un coût réel pour les maisons d’accueil et il est souhaitable que les maisons d’accueil puissent les accompagner de façon optimale.

Mme Delphine Chabbert (PS).- Ma question portait bien sur l'ordonnance de la Cocom relative à l'accueil des personnes sans abri, et donc des services de guidance à domicile en Cocom et des maisons d'accueil soutenues par la Cocom. Bien que le chiffre de six maisons d'accueil reste modeste, cela représente tout de même plusieurs centaines de personnes accueillies.

Vous avez dissipé la confusion concernant le délai de cinq ans. Mes déclarations faisaient suite à des rencontres de terrain avec des travailleurs sociaux qui accompagnent ces femmes, puisqu'il s'agit essentiellement de femmes. Je reviendrai vers ces personnes à ce sujet.

Je conviens également qu'il est légitime de renforcer les collaborations entre les maisons d'accueil - une mission de trois mois me semblant toutefois être le minimum - et d'autres services, afin d'encourager l'autonomie de la personne en lui permettant d'accéder à ces services sans rester complètement dépendante d'une maison d'accueil, même après l'hébergement. Néanmoins, les travailleurs du secteur sont mis en difficulté par le manque de subsides de suivis qu'ils doivent réaliser hors budget. C'est un problème pour l'organisation de la structure en général.

Enfin, j'ai bien noté que les missions de suivi post-hébergement sont financées pour une durée renouvelable de trois mois. Il y aurait lieu d'évaluer cet aspect, même si je pense comme vous qu'il faut soutenir le passage vers d'autres services, notamment celui de la guidance à domicile, qui ont été refinancés.

Je relaierai notre échange auprès des maisons d'accueil.

- L'incident est clos.

Question orale de Mme Delphine Chabbert

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant les subventions relatives à l'infrastructure des institutions bicommunautaires de la Région de Bruxelles-Capitale dans les domaines de la santé et de l'aide aux personnes.

Mme Delphine Chabbert (PS).- La Cocom peut accorder des subventions pour couvrir les coûts d’infrastructure des institutions bicommunautaires de la Région de Bruxelles-Capitale dans les domaines de la santé et de l’aide aux personnes. Cela comprend les ASBL. Ces subventions permettent principalement de financer la construction, l’extension, la transformation, la rénovation ou l’aménagement des établissements accueillant des personnes.

Pour le moment, ces subventions sont accordées au cas par cas sur la base d’appels à projets, soit dans le cadre d’un plan pluriannuel approuvé par le Collège réuni, soit au moyen d'une demande de subvention facultative.

Cependant, des procédures spécifiques régissent l’octroi d’une subvention d’infrastructure selon le type d’institution, notamment les maisons de repos. Selon l’article 22, § 1er, de l’ordonnance du 24 avril 2008 relative aux établissements d’accueil ou d’hébergement pour personnes âgées, les subventions aux maisons de repos « sont octroyées dans les limites des crédits budgétaires ».

Or, il me revient des rencontres avec les opérateurs que l’obtention de subventions pour couvrir les coûts d’infrastructure des ASBL par appel à projets complique la procédure, et empêche une vision à plus long terme des projets d’infrastructure. Si les opérateurs relevant de la Cocom ne représentent pas la majorité des opérateurs de la Région, ils existent tout de même.

Disposez-vous d’une vue plus précise concernant le nombre de demandes de subventions introduites par des ASBL bruxelloises dans le cadre d’une couverture des coûts d’infrastructure ?

La mise en place d’un crédit budgétaire pour les institutions bicommunautaires de la Région de Bruxelles-Capitale dans les domaines de la santé et de l’aide aux personnes est-elle à l’ordre du jour ? Dans le cas contraire, y a-t-il une ouverture en ce sens ?

Pouvez-vous déjà fournir des informations supplémentaires sur la nouvelle législation et les réglementations relatives au financement des infrastructures des institutions bicommunautaires prévues pour 2023 ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Premièrement, depuis 2016, dans le cadre des différents appels à projets, l'administration a reçu les demandes de subsides suivantes du secteur associatif :

- dix-neuf demandes pour le plan pluriannuel 2017-2023 aide aux personnes ;

- quatorze demandes pour le calendrier des investissements 2022-2025 relatif à la rénovation des habitations protégées pour des patients psychiatriques ;

- une demande dans le cadre d'un appel à projets pour la création d'un centre d'accueil de jour pour des femmes sans abri ;

- deux demandes pour l'appel à projets pour la création de résidences-services sociales ;

-  et cinq demandes dans le cadre de l'appel à projets pour la création de logements de transit et le relogement durable de personnes sans abri.

Par ailleurs, hors appels à projets, l'administration a également reçu seize demandes de subvention venant de diverses ASBL depuis 2016.

Notons, par ailleurs, que six ASBL exploitent des hôpitaux agréés par la Cocom. Ces ASBL sont reprises dans le calendrier de construction 2008-2023 des institutions de soins de santé.

Les hôpitaux peuvent aussi bénéficier d'un financement via les sous-parties A1 et A3 du budget des moyens financiers des hôpitaux. Ce financement est encore géré par le niveau fédéral pour le compte de la Cocom tant qu'il n'y a pas de nouveau cadre législatif et réglementaire permettant de procéder autrement. Nous y travaillons. 

Deuxièmement, concernant les crédits budgétaires, une enveloppe budgétaire spécifique est fixée avant le lancement d'un appel à projets sur la base, entre autres, d'une étude de besoins. Les crédits d'engagement et de liquidation correspondants sont prévus à la fois sur le budget initial et sur le budget pluriannuel de la Cocom. Sur la base des résultats de l'appel à projets, le budget est alors affiné et un calendrier des investissements est arrêté et soumis pour approbation au Collège réuni.

En ce qui concerne cette législature-ci, les membres du Collège réuni ont prévu les budgets suivants pour la politique de la santé et de l'action sociale :

- 6.469.209 euros pour le calendrier des investissements 2022-2025 relatif à la rénovation des habitations protégées pour des patients psychiatriques ;

- 16,5 millions d'euros pour le calendrier des investissements 2022-2027 relatif aux travaux des maisons de soins psychiatriques ;

- 1,6 million d'euros pour l'appel à projets relatif à la création de logements de transit et le relogement durable de personnes sans abri ;

- 1,1 million d'euros pour l'appel à projets relatif à la création de résidences-services sociales ;

- et 400.000 euros pour l'appel à projets relatif à la création d'un centre d'accueil de jour pour des femmes sans abri.

En plus des budgets précités, deux calendriers datant des législatures précédentes sont toujours en cours d'exécution. Il s'agit du calendrier de construction des institutions de santé pour la période 2008-2023, qui porte sur 20 millions d'euros, et du plan pluriannuel 2017-2023 d'aide aux personnes, qui porte sur 6,7 millions d'euros.

Enfin, en ce qui concerne la nouvelle réglementation relative au financement des infrastructures des institutions bicommunautaires prévue pour 2023, deux avant-projets d'ordonnances relatives au financement des infrastructures des institutions bicommunautaires ont été rédigés : l'avant-projet d’ordonnance relative au financement des infrastructures des hôpitaux et des maisons de soins psychiatriques et l'avant-projet d’ordonnance relative au financement des infrastructures de divers types d’institutions relevant de la politique de l’aide aux personnes et de la santé.

Le Collège réuni a déjà approuvé les principes du premier avant-projet. Quant au second, l'administration a reçu l'avis favorable de l'Inspection des finances. Elle demandera, en ce début d'année 2023, l'accord des membres du Collège réuni compétents pour le Budget et les Finances.

De manière générale, ces nouvelles législations, qui - je l'espère - seront adoptées avant la fin de la législature, permettront d'uniformiser et de mieux structurer les procédures d'octroi de subventions. Conjointement avec l'organisation d'appels à projets et l'adoption de calendriers des investissements, l'ambition est d'éviter la discrimination dans l'octroi de subventions, de préserver le lien avec les objectifs repris dans la déclaration de politique générale du gouvernement et d'avoir une vue à plus long terme sur les infrastructures des institutions bicommunautaires.

Mme Delphine Chabbert (PS).- Mes questions sont sans doute posées un peu trop tôt, puisque le travail est en cours et que de nouvelles législations sont attendues, mais ces infrastructures sont essentielles pour la qualité de l'accueil et leur financement est crucial pour pouvoir se projeter dans l'avenir.

- L'incident est clos.

Question orale de Mme Delphine Chabbert

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant le plan directeur intégré de prévention et de lutte contre le sans-abrisme.

Mme Delphine Chabbert (PS).- Dans le cadre de ses missions organiques, Bruss’help est notamment chargée d’élaborer un plan directeur de prévention et de sortie du sans-abrisme. Il s’agit là d’un des douze chantiers de son plan d'actions pour les années 2021-2024.

Vous aviez vous-même précisé, lors de la commission du 23 septembre 2021 : « Ce plan directeur se veut être un plan intégré de prévention, fondé sur une approche intersectorielle, ce qui implique la consultation de multiples acteurs, tant publics que privés. »

Cela semble effectivement nécessaire pour trouver des solutions transversales et concertées et se forger une vision globale du sans-abrisme, à l’heure actuelle et à l’avenir, d'autant que les besoins ne cessent de croître dans notre Région.

La finalisation de ce plan directeur est prévue pour la fin 2023. Le travail est en cours, mais les opérateurs et personnes impliquées dans son processus d’élaboration se posent de nombreuses questions.

Où en est l’élaboration de ce plan, qui devrait être achevé d’ici quelques mois ? Disposez-vous déjà de certains résultats ?

Pouvez-vous apporter des précisions sur les modalités méthodologiques utilisées ? Comment Bruss'help opère-t-elle dans le cadre de ces chantiers ? Sur la base de quels critères les opérateurs consultés ont-ils été sélectionnés ?

Lors de la commission du 23 septembre 2021, vous déclariez que, le plan n’étant que dans sa phase préparatoire, des objectifs spécifiques n'avaient pas encore pu être fixés. Disposez-vous à présent d’une meilleure vue d’ensemble, un an et demi plus tard ? Quels sont les objectifs spécifiques déterminés depuis lors ?

Selon vous, en quoi les objectifs de ce plan vont-ils différer de ceux, bien connus, du « Livre blanc du secteur sans-abri » rédigé à l’époque par La Strada, ancêtre de Bruss’help ? Une mise à jour s’imposait probablement, mais cette démarche était-elle nécessaire dans son ensemble ? Avez-vous des attentes supplémentaires par rapport au Livre blanc ?

Disposez-vous déjà d’un calendrier pour l’élaboration, la mise en place et la mise en œuvre de ce travail ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- L’élaboration du plan directeur intégré - aussi appelé masterplan - est en effet l’un des chantiers majeurs de Bruss’help, inclus dans le plan d’actions validé par l’assemblée générale de l’ASBL.

Le Comité de l'aide d'urgence et de l'insertion sociale restreint, piloté par Bruss’help, est chargé d'assurer l’élaboration et la mise en œuvre de ce plan. À cette fin, de nombreuses rencontres constructives ont été organisées, qui ont permis de :

- s’accorder sur un cadre de contenu et une méthode de travail ;

- élaborer la méthodologie du plan ;

- réaliser une large enquête auprès des acteurs de terrain et des experts du vécu pour alimenter les axes de travail et les actions concrètes ;

- relayer les résultats de l’enquête ;

- définir les thèmes, les cinq objectifs prioritaires et les pistes d’actions pour les rencontrer.

Les acteurs consultés sont les suivants :

- pôle administrations : fonctionnaires et fonctionnaires dirigeants de la Cocom, de la Cocof, de la VGC, de la Région de Bruxelles-Capitale et du SPP Intégration sociale sur les matières social-santé, prison et jeunesse ;

- pôle acteurs des secteurs et secteurs connexes : tous les opérateurs de l’urgence et de l’insertion, des hôpitaux, des hôpitaux psychiatriques, de la prison, de la jeunesse, de la toxicomanie et de la santé mentale ;

- pôle ayant droits : le Syndicat des immenses, le Front commun des SDF, Jamais sans toit, et Brussels Platform Armoede ;

- pôle académique : un référent recherche par académie, à savoir l' Université catholique de Louvain , l'ULB, Odissee, l'Université de Liège , la Katholieke Universiteit Leuven et Feantsa.

Bruss’help adressera dans les jours à venir une invitation à chaque chef de groupe parlementaire, invitant ces derniers à suivre le processus à titre d’observateur.

Pour ce qui est de la finalité du plan directeur, celui-ci doit permettre d’organiser les stratégies, les ressources et les acteurs autour d’un plan opérationnel global et collectif dont l’ambition est de réduire autant que possible le nombre de sans-abri en Région de Bruxelles-Capitale.

Les principes et le cadre sont définis comme suit :

- le plan directeur est fondé sur une approche globale visant à prendre en compte tous les obstacles auxquels font face les personnes privées de logement, et à considérer le panel de facteurs qui conduisent au sans-abrisme ;

- il s’appuie sur une mobilisation intersectorielle, associant les acteurs du secteur de l’aide aux sans-abri et les professionnels travaillant dans les domaines connexes ;

 il doit avoir une visée pragmatique, à savoir proposer un ensemble d’actions cohérentes permettant d’atteindre des résultats quantifiables et mesurables dans le temps.

Le comité restreint a défini cinq objectifs spécifiques :

- personne ne devrait rester dans un hébergement d’urgence lorsque la période d’urgence est dépassée ;

- personne ne devrait dormir dans la rue ;

- personne ne devrait rester dans un hébergement temporaire plus longtemps que nécessaire ;

- personne ne devrait sortir d’une institution sans option de logement ;

- personne ne devrait finir à la rue ou avec une problématique liée au manque de logement à cause de la transition vers la vie adulte.

La valeur ajoutée du plan directeur résidera principalement dans son caractère opérationnel. Il ne s’agira plus de réflexions ou de recommandations. Les membres du comité de coordination restreint veillent à ne pas produire un énième livre blanc, mais à définir des objectifs quantifiés, accompagnés de propositions d’actions concrètes articulées de façon cohérente.

Par ailleurs, il est prévu que le plan directeur s’articule avec deux autres grands programmes de prévention et de lutte contre la pauvreté, à savoir le plan social-santé intégré et le plan fédéral de lutte contre la pauvreté et les inégalités.

Quant au calendrier, l'objectif est de finaliser l'écriture du plan directeur durant l’été 2023. Avant cela, plusieurs événements sont prévus, en février, mai et juin 2023, le premier portant sur le diagnostic et les constats, le deuxième sur les ressources mobilisables et le troisième sur les ressources à mobiliser. Le texte définitif sera disponible début décembre 2023.

La question de l’évaluation du plan directeur n’a pas encore été abordée. Il sera nécessaire de définir les indicateurs sur la base desquels l’efficacité et l’efficience du plan seront évaluées. Le moment venu, il me paraîtrait intéressant que ce plan intégré soit présenté au Parlement.

Mme Delphine Chabbert (PS).- Cette question tombe à pic, car j'entends qu'une invitation sera envoyée à chaque groupe politique. Je vais m'assurer que l'information me parvienne. Par rapport au livre blanc de La Strada, j'entends que la vision est très concrète, programmée et opérationnelle. J'imagine qu'elle sera inspirée de tout ce qui a déjà été fait. La Région bruxelloise projette, depuis des dizaines d'années, une sortie du sans-abrisme. Il y a plusieurs manières d'y arriver.

Vous évoquez le lien entre le plan directeur et les autres plans d'envergure qui doivent structurer l'action de la Région bruxelloise en matière de sans-abrisme, comme le plan social-santé intégré. Nous attendons toujours le plan bruxellois de lutte contre la pauvreté, qui devait faire partie de l'arsenal d'outils. Il serait intéressant d'en avoir une présentation.

Je retiens la proposition de présenter le plan directeur au sein de cette commission, qui suscitera probablement l'intérêt d'une grande quantité de commissaires, au vu des questions posées par mes collègues sur le sans-abrisme. Nous en parlerons avec le président et les membres de la commission.

- L'incident est clos.

Question orale de Mme Nicole Nketo Bomele

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant l'accueil des sans-abri.

Mme Nicole Nketo Bomele (DéFI).- Le contexte de crise dans lequel nous sommes plongés depuis bientôt trois ans intensifie les inégalités sociales et la précarité de la population bruxelloise. La question des personnes sans abri est un sujet plus que jamais extrêmement sensible : aujourd’hui, elles sont au moins 5.000 à dormir dehors par dix degrés sous zéro.

À la mi-novembre, le New Samusocial a ouvert en Région bruxelloise 320 places supplémentaires pour accueillir les sans-abri à l’aube de l’hiver. Au total, il pourra ainsi accueillir près de 1.000 personnes jour et nuit dans huit structures durant la saison hivernale, soit environ 415 personnes en famille, environ 160 femmes seules, de 275 à 300 hommes seuls et quelque 130 personnes isolées et vulnérables nécessitant un accueil et un accompagnement soutenus. Chaque structure d’accueil est gérée par des équipes psycho-médico-sociales qui proposent aux résidents un plan d’accompagnement en vue de les orienter vers des solutions de relogement adaptées.

Dans le contexte du nombre croissant de personnes sans abri et de la crise de l’accueil qui laisse sans abri des centaines de personnes en demande de protection internationale, la priorité de l’accueil sera accordée aux personnes considérées comme particulièrement vulnérables : les familles avec enfants, les femmes seules ainsi que les hommes fragiles et malades. Par ailleurs, les équipes mobiles d’aide du New Samusocial poursuivront jour et nuit leur action de maraude dans les rues de la Région afin d’apporter, dans la mesure de leurs capacités d’intervention, une aide aux personnes les plus désocialisées.

Les mesures d’urgence, de nature sanitaire ou périodique - hiver, canicule -, sont nécessaires et indiscutables. Retenons surtout qu’elles doivent être couplées à des mesures structurelles et durables. Le secteur continue de le rappeler à juste titre.

Pour cet hiver, quelle sera la capacité de places ouvertes 24h/24 ? Quelles améliorations et changements comptez-vous apporter dans l’accueil des sans-abri, par rapport à l’hiver passé ?

Quelle approche adoptez-vous face aux assuétudes et aux problèmes de santé mentale ? Des collaborations entre le public et le privé, entre autres par la réquisition d'hôtels et de bureaux vides, sont-elles à l'ordre du jour ? Si oui, comment allez-vous procéder ?

Pouvez-vous nous détailler votre approche du sans-abrisme au féminin ? Estimez-vous qu’il y a suffisamment d’abris de nuit réservés aux femmes ? Quelle suite avez-vous donnée à l’étude-action de L'Îlot ? Les femmes qui vivent dans la rue ont tendance à passer sous les radars, notamment parce qu’elles fréquentent peu les centres d’aide aux personnes sans abri.

Qu’en est-il des seniors, particulièrement vulnérables et qui, souvent, n’osent pas demander de l’aide ? En outre, comment repérer les seniors isolés vivant dans des logements totalement vétustes et insalubres ?

Je sais en outre que les mineurs étrangers non accompagnés ne relèvent pas de votre compétence, mais il n'empêche que ces jeunes se trouvent sur le territoire bruxellois et leur sort doit être considéré comme une priorité absolue. Il est de votre responsabilité de leur garantir un accompagnement tant social que psychologique, ainsi que l'accès à un logement d'urgence. Quelles actions sont-elles menées pour accompagner et loger ces jeunes qui errent dans les rues de Bruxelles ?

Enfin, L'Îlot essaie de créer des cellules régionales de captation de logements, qui accompagnent des investisseurs privés souhaitant investir dans l’abri, en servant aussi une cause sociale. Les avez-vous déjà rencontrés à ce sujet avec vos collègues du gouvernement ?

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Avant toute chose, je tiens à rectifier une erreur systématiquement commise en matière de chiffres relatifs aux personnes dites sans abri. Les chiffres généralement cités sont issus du dénombrement réalisé tous les deux ans par Bruss’help, qui incluent l’ensemble des personnes sans abri et mal logées, c’est-à-dire toutes les personnes accueillies dans les centres d'accueil d’urgence, les maisons d’accueil, les projets d’occupation temporaire, les logements de transit, etc., ainsi que les personnes qui sont en rue. Fort heureusement, ce chiffre ne représente donc pas seulement les personnes en rue, mais bien les personnes qui n'ont pas de solutions de logement pérenne.

Il n’en reste pas moins que les crises successives fragilisent encore plus les personnes vulnérables. Je vous rejoins sur ce point. Par ailleurs, la crise de l’accueil des demandeurs d’asile, ainsi que le nombre important de personnes sans droit de séjour, amènent à des situations humainement intenables.

Pour en venir à vos questions précises, 4.233 places d’hébergement sont disponibles à ce jour à Bruxelles pour les publics vulnérables. Elles sont réparties entre des places d’hébergement d’urgence, des maisons d’accueil, des hôtels et des projets d’occupation temporaire accompagnée de bâtiments vides, des places à destination des personnes migrantes et des places au sein des hébergements collectifs de la plateforme Help Ukraine. À ceci s’ajoute bien évidemment l’ensemble des projets de relogement durable de personnes sans abri, en partenariat avec les CPAS, les agences immobilières sociales et les sociétés immobilières de service public.

Concernant la capacité d’accueil subventionnée par la Cocom, depuis un an, l’offre d'accueil est déterminée au sein du Comité de l’urgence et de l’insertion, présidé par l'asbl Bruss’help et associant des représentants de toutes les catégories de services du secteur.

Le secteur a donc acté la fin d’une logique saisonnière au profit d'une offre annuelle, ce qui permet de mettre fin aux coupures de dispositifs d'hébergement au printemps, qui laissaient à la rue des personnes sans solution d’accueil.

Concernant les éléments qui ont été améliorés, je citerai l’annualisation de l’offre de l’accueil de jour et de nuit, la généralisation progressive de l’accueil 24h/24, l’amélioration de la qualité des infrastructures des centres d’accueil d’urgence, l’augmentation de la capacité d'hébergement des maisons d'accueil et la création de nouvelles structures, en Cocof et en Cocom, le développement de projets innovants d’occupation temporaire de bâtiments vides, la mise en place d'un plan grand froid déployé par l'asbl Bruss'help, en partenariat avec safe.brussels et les communes, ce qui permet une meilleure réactivité en cas de conditions climatiques extrêmes, et l’augmentation substantielle de la capacité d’accompagnement des opérateurs de Housing First. Cette capacité a en effet plus que doublé et nous espérons qu'elle quadruplera.

Concernant les femmes confrontées à une situation de sans-abrisme ou de mal-logement, ce public nécessite une attention particulière et des dispositifs adaptés à ses spécificités, comme j’ai eu l’occasion de l’expliquer à de nombreuses reprises dans cette commission.

Voici les mesures prises en faveur du public féminin :

- l’ouverture de nouvelles capacités d’accueil (en centre d’urgence et maison d’accueil) destinées aux femmes, accompagnées ou non d’enfants, aux femmes victimes de violences conjugales ou intrafamiliales et aux familles monoparentales ;

- le développement de projets de relogement destinés aux femmes caractérisées par des problématiques de santé mentale ou d’assuétude ;

- l'ouverture prochaine d’un centre de jour (non mixte) pour femmes, d’une capacité de 100 à 150 places.

Concernant les seniors, nous soutenons, depuis 2021, un projet visant à faciliter l’accès de personnes sans abri âgées dans les maisons de repos. Le projet « Espace d'habitation pour adulte demandeur » de l'ASBL Senior Montessori, en partenariat avec les ASBL Santé mentale et exclusion sociale et Infirmiers de rue ainsi que le New Samusocial, vise, en mobilisant les compétences propres de chacun des partenaires, à garantir que l’entrée et l’intégration dans la maison de repos se passent dans les meilleures conditions, tant pour la personne accueillie que pour les équipes des maisons de repos.

Concernant la captation et la création de logements durables accessibles à des personnes et familles sans abri, l’ASBL L'Îlot est subventionnée pour sa cellule « capteur et créateur de logement » depuis 2016. Par ailleurs, une subvention a été octroyée à l'ASBL Bru4Home depuis 2020, dans le même objectif.

Enfin, Bruss’help s’est vu confier une mission de coordination de cette dimension de captation et d'attribution des logements, via un consortium associant des représentants du secteur.

Mme Nicole Nketo Bomele (DéFI).- Je suis satisfaite que l'on mette fin à cette logique saisonnière. Je souhaite néanmoins épingler un problème concernant la prise en charge des personnes sans abri par les CPAS. Dans le cadre de ma permanence sociale, j'ai suivi le cas d'une personne qui, comme il fait très froid en ce moment, est parfois accueillie dans sa famille dans d'autres communes. En vertu du principe de territorialité, le CPAS a voulu clore son dossier. J'estime que nous devrions faire preuve de souplesse face à ces situations difficiles.

Si vous le souhaitez, je peux vous poser une question écrite à ce sujet.

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- Nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter. C'est un véritable problème que les CPAS se renvoient la balle par rapport aux personnes dont le domicile, par définition, n'est pas fixe. Nous travaillons sur ce point avec la fédération des CPAS bruxellois et il existe même des missions pour avancer sur la question de la territorialité. Je suis tout à fait d'accord avec vous, c'est insupportable. Il faut donc trouver une solution.

Cela étant dit, le fait que les CPAS soient répartis sur dix-neuf communes, qu'ils disposent chacun d'une autonomie de gestion et qu'ils n'aient pas d'obligation de coopérer entre eux ne facilite pas les choses. En outre, la question de l'adresse de référence peut engendrer un flou. Ainsi, un CPAS peut très vite se défausser s'il constate que vous avez accès au canapé de telle ou telle personne en dehors de sa commune. C'est inacceptable. Les services sociaux s'arrachent les cheveux et les intéressés aussi, alors qu'ils sont déjà en état de grande précarité.

Nous essayons, à travers la fédération des CPAS que nous subventionnons, de faire avancer le dossier dans la bonne direction et de trouver des solutions pérennes, avec un accord global entre les CPAS sur les modalités de prise en charge.

Mme Nicole Nketo Bomele (DéFI).- Je vous remercie d'y veiller. En cette période de grand froid, il est en effet choquant d'entendre un assistant social me répondre qu'il faudrait que la personne loge sous un pont pour pouvoir constater son domicile.

- L'incident est clos.

Question orale de Mme Nicole Nketo Bomele

à Mme Elke Van den Brandt et à M. Alain Maron, membres du Collège réuni chargés de l'Action sociale et de la Santé,

concernant les troubles alimentaires, maladies mentales encore trop taboues et peu prises en charge.

Mme Nicole Nketo Bomele (DéFI).- Beaucoup ont déjà connu des moments où une petite voix dans leur tête essaye de les dénigrer et de les faire sentir bien imparfaits. Pour les personnes qui souffrent de troubles alimentaires, les appels de cette voix sont répétitifs et dévorants. Se préoccuper de son image corporelle est courant dans notre société, mais les troubles alimentaires poussent cette préoccupation à l’extrême. Relevant énormément du mental, ils sont extrêmement variés et complexes à déconstruire. Boulimie, anorexie, dysmorphie : chaque trouble a ses spécificités.

Le nombre de troubles alimentaires chez les jeunes, en particulier les jeunes femmes et les filles, a fortement augmenté ces dernières années, notamment avec les réseaux sociaux et la diffusion de contenus basés sur l’obsession du corps et de l’alimentation saine. Officiellement, les contenus en ligne faisant l’apologie de l’extrême minceur sont interdits. Aujourd’hui, les réseaux comme Instagram et TikTok font amende honorable en masquant les hashtags trop explicites tels que #anorexie et #boulimie et renvoient vers des ressources d’aide. Néanmoins, Instagram et TikTok sont souvent accusés d’ériger en but ultime des modes de vie sains à l’extrême ou des diktats de beauté farfelus.

Quelle est la capacité réservée pour les personnes souffrant de troubles alimentaires au sein de la Clinique de la Ramée et des unités de pédopsychiatrie générales Domino, à la Clinique Saint-Jean, et à l' Hôpital universitaire des enfants Reine Fabiola  ?

Qu’avez-vous mis en place de façon spécifique au niveau de la Région bruxelloise en matière de troubles alimentaires, au vu de l’aspect très genré de cette problématique, s'agissant de la prévention et des actions à entreprendre ? Des activités sont-elles possibles dans les écoles, les clubs de sport et les maisons de jeunes, en collaboration avec la Commission communautaire française ?

Un dialogue interfédéral ou interministériel existe-t-il à ce sujet ? Est-ce envisageable ?

Existe-t-il des statistiques sur la prévalence des troubles alimentaires à Bruxelles ? Nous avons besoin de quantifier le problème afin d’y apporter des réponses. Il serait intéressant de procéder à une large enquête à travers les réseaux sociaux, par exemple, et d’y mener de larges campagnes de sensibilisation pour soutenir au mieux ces jeunes.

M. Alain Maron, membre du Collège réuni.- La capacité d’accueil de la Clinique La Ramée est de 34 lits, dont 15 sont réservés à des adolescents. Cette unité ouverte constituée d'une équipe pluridisciplinaire propose un projet thérapeutique spécifique aux problématiques d'anorexie, de boulimie et d'hyperphagie incontrôlée.

D'autres unités d'accueil général en pédopsychiatrie au Centre hospitalier universitaire Brugmann, à la Clinique Saint-Jean, à l’UZ Brussel et aux Cliniques universitaires Saint-Luc accueillent également des patients souffrant de ce genre de troubles. L'hôpital Érasme possède aussi une capacité d'accueil spécifique pour les patients souffrant de troubles alimentaires.

Au niveau ambulatoire, la Cocom ne finance aucun projet spécifique en matière de troubles alimentaires. Néanmoins, les missions générales des services de santé mentale intègrent bien entendu la prise en charge de cette problématique, tout comme le travail avec le réseau du jeune et la collaboration avec le tissu hospitalier afin d’assurer, le cas échéant, la continuité des soins.

Cette problématique est aussi largement abordée au sein du groupe de travail intercabinets sur les soins de santé mentale, ainsi qu'au sein du Comité pour la nouvelle politique de santé mentale pour enfants et adolescents. Au sein de ce comité, les représentants du gouvernement fédéral et des secteurs, experts et acteurs concernés formulent des recommandations qui sont ensuite discutées et validées en conférence interministérielle.

À ce stade, et en accord avec les autres niveaux de pouvoir, notre ambition est de nous concentrer sur des points concrets pour nous inscrire dans le programme de soins des troubles alimentaires du gouvernement fédéral. Les objectifs bruxellois sont les suivants :

- diffuser les recommandations du groupe de travail dédié aux troubles alimentaires auprès des secteurs concernés ;

- sensibiliser les opérateurs par une communication adéquate, afin qu’ils intègrent les lignes directrices à chacun des niveaux concernés (promotion et prévention, première ligne d’aide et de soins, soins de santé mentale ambulatoires, services de santé mentale, revalidation, etc.), en tenant également compte des opérateurs du secteur du handicap ;

- s’assurer que le secteur hospitalier, ressource principale en matière de prise en charge aiguë des troubles de l'alimentation, en tienne compte dans sa pratique thérapeutique et de réseau ;

- développer les moyens de former et d’informer (sensibilisation et formation des acteurs de première ligne ainsi que des acteurs de l’accompagnement et du soin) ;

- collaborer avec la Fédération Wallonie-Bruxelles pour garantir une réponse adéquate et une couverture complète des besoins ;

- réaliser un cadastre des ressources pour la prise en charge des troubles alimentaires, et ce, à tous les niveaux, en matière de formation et sensibilisation, d'actions préventives, de détection et intervention suffisamment précoces, de soins de santé mentale ambulatoires et de soins de troisième ligne aigus et spécialisés ;

- développer parallèlement un système d’enregistrement des données utiles en matière de troubles alimentaires pour la première ligne, en particulier les médecins généralistes, les services sociaux, etc.

Pour ce qui est de la prévalence, je vous renvoie à l'enquête de Sciensano. Celle-ci révèle qu'en 2018, 10 % de la population bruxelloise âgée de 15 ans et plus présentait un risque de trouble du comportement alimentaire. Il n'y a pas de différence statistiquement significative par rapport à l'enquête de 2013. La prévalence est plus élevée dans la catégorie d'âge des 15-24 ans et les Bruxellois ayant obtenu un diplôme de l'enseignement supérieur sont moins susceptibles de souffrir d'un trouble du comportement alimentaire que les personnes qui n'ont pas pu bénéficier d'une éducation tertiaire. Cette observation vaut d'ailleurs pour nombre de troubles psychologiques, voire psychiatriques.

Mme Nicole Nketo Bomele (DéFI).- Je me réjouis d'apprendre que vous travaillez avec la Fédération Wallonie-Bruxelles. Vous dites que 10 % des 15-24 ans sont concernés par ce problème. Il est donc nécessaire de mener un travail de fond avec les écoles secondaires et les établissements d'enseignement supérieur.

- L'incident est clos.