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Question écrite concernant les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et leurs aidants-proches.

de
Mohamed Ouriaghli
à
Elke Van den Brandt et Alain Maron, membres du Collège réuni en charge de l'action sociale et de la santé (question n°345)

 
Date de réception: 04/01/2021 Date de publication: 20/04/2021
Législature: 19/24 Session: 20/21 Date de réponse: 19/03/2021
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
05/03/2021 Recevable p.m.
 
Question    En Belgique, deux tiers des personnes âgées de + de 60 ans se plaignent du fonctionnement de leur mémoire (1). Ces troubles peuvent être de véritables maladies. Parmi celles liées à la démence, la plus répandue est la maladie d'Alzheimer.

Cette maladie est une affection du cerveau qui engendre des dysfonctionnements des cellules dans certaines de ses parties. En conséquence, les cellules meurent, ce qui entraîne à terme une diminution du volume du cerveau et une perte des capacités cognitives. Les symptômes de la maladie varient d’une personne à l’autre : pertes de mémoire, désorientation dans l'espace et le temps, changement de caractère, expression verbale appauvrie, etc. Son évolution est malheureusement inéluctable… 

La Ligue Alzheimer ASBL (2) rapporte une estimation de
52 millions de personnes atteintes de démence dans le monde en 2019. En Belgique, le nombre estimé était de 192.926 en 2018. 1 personne âgée de 65 ans et + sur 20 serait touchée par cette maladie et au-delà de 85 ans, 1 personne sur 5. 60 à 70% des cas de démence sont attribués à la maladie de Alzheimer.

Si la recherche est porteuse de beaucoup d’espoir, aucun traitement curatif n’a encore pu être développé à ce jour. Le diagnostic précoce permet néanmoins de mettre en place un accompagnement adapté afin de prolonger les années de vie autonome et préserver la qualité de vie.

S’il semble qu’un plus grand nombre de femmes souffrent d’une neurodégénérescence, ce serait surtout lié au fait que ces dernières vivent en moyenne plus longtemps que les hommes.

Le vieillissement de la population s’accélère : il est constaté que le nombre de personnes âgées progresse plus vite que celui des personnes de tous les groupes d’âge plus jeunes.


En 2017, 1 personne sur 8 dans le monde était âgée de 60 ans ou plus. En 2030, cette proportion devrait passer à 1 personne sur 6, et d’ici 2050, à 1 sur 5 (3).
La population mondiale devenant de plus en plus âgée, les démences sont en voie de devenir un véritable problème de santé publique !

La maladie d'Alzheimer est porteuse de souffrance psychique pour la personne malade mais elle bouleverse aussi profondément la vie et la santé des proches qui s’en occupent à domicile. Dans ce contexte d'usure physique et psychologique et vu la durée de la maladie (10 à 15 ans), un hébergement en maisons de repos et de soins devient (parfois) indispensable.

Permettez-moi de vous poser quelques questions sur ce sujet qui m’intéresse particulièrement :

- Le Collège réuni a-t-il connaissance de la population bruxelloise atteinte de la maladie d’Alzheimer : nombre de malades, âge moyen, part femmes/hommes, % de malades traités médicalement ?
Quelles sont les actions entreprises ou soutenues par le Collège pour aider la population à bénéficier d’un diagnostic précoce ? Je pense que la gratuité du dépistage constituerait un pas important pour diagnostiquer (puis traiter) les malades plus rapidement et efficacement : cela vous semble-t-il possible ? L'offre quantitative et qualitative de consultations de dépistage de la maladie d’Alzheimer est-elle suffisante en Région bruxelloise ? Cette offre est-elle promue auprès du public-cible et son entourage ?


- En Belgique, des associations comme La Ligue Alzheimer et d’autres acteurs ont plaidé ces dernières années pour la mise en place d’un Plan Alzheimer pour notre pays. En mai 2017, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) adoptait un plan d’action mondial sur la démence qui s’étend sur une période de 2017 à 2025 (4). Celui-ci soutient le message urgent que les gouvernements doivent mettre en œuvre leur propre plan ou leurs propres politiques. Notre pays se place dans la liste des mauvais élèves au niveau européen puisqu’il n’a toujours pas mis en place de Plan national, contrairement à ses voisins.
Dans le cadre de la Conférence interministérielle sur la Santé, pourriez-vous être un des acteurs de cette impulsion auprès du gouvernement fédéral, pour l’aboutissement d’un Plan national avant 2025 ?

- Dans son accord de gouvernement, le Collège réuni a annoncé qu’il « sera particulièrement attentif au sort des personnes âgées atteintes d’une maladie de type Alzheimer et/ou désorientées. Il examinera la possibilité de créer un centre d'expertise spécialisé dans cette problématique ».
Où en êtes-vous dans votre réflexion et quelles seraient les missions que devra remplir ce centre ? Ce type de structure semble déjà exister en Flandre, quels sont les retours d’expérience que vous en avez ? Il me semble opportun que les associations existantes, plus particulièrement La Ligue Alzheimer qui a une expérience forte et reconnue avec le contact des familles et dans la formation des professionnels, soient consultées et concertées dans l’élaboration de ce projet, ainsi que le KCE avec qui elle travaille : cela est-il prévu ? Avez-vous une idée du budget qui sera alloué pour cette étude ?

- La famille ou les aidants proches qui s’occupent des malades d’Alzheimer à domicile ont besoin d’être aidés pour supporter la complexité et la pénibilité de la charge. Le Collège réuni soutient-il des associations assurant des services d’(entre)aide pour et avec les familles ? Les services de proximité, comme les maisons de quartiers par exemple, sont-ils mis à contribution, en particulier dans les quartiers défavorisés, pour procurer une aide aux malades et à leurs familles ?

- Enfin, s’agissant de la prise en charge en institution : quelles sont les formules d’accueil existantes et les institutions qui s’occupent des patients sur notre Région ? Quels sont les lieux d’accueil soutenus par la COCOM ?
Combien coûte le placement d’un malade en institution ? Des aides financières existent-elles pour alléger la facture ?
Le nombre d’institutions spécialisées est-il suffisant actuellement ? Y a-t-il des alternatives comme dans d'autres pays et les besoins dus au vieillissement de la population sont-ils anticipés par les gouvernements ?

https://www.chu-brugmann.be/fr/med/neurorevali/memo.asp
https://alzheimer.be/
https://www.who.int/docs/default-source/documents/decade-of-health-ageing/decade-ageing-proposal-fr.pdf?sfvrsn=b0a7b5b1_12
https://www.who.int/mental_health/neurology/dementia/infographic_dementia/fr/
 
 
Réponse    Nous ne connaissons pas le nombre réel de Bruxellois souffrant de la maladie d'Alzheimer. Toutefois, nous pouvons faire des estimations sur la base de quelques éléments d'information.

La Ligue Alzheimer indique que parmi les plus de 65 ans, 1 personne sur 20 est touchée par la maladie d'Alzheimer et 1 sur 5 parmi les plus de 85 ans.

En appliquant ces proportions à la population bruxelloise, nous arrivons à 11.972 habitants souffrant de la maladie d'Alzheimer en 2020.

Parmi ceux-ci, 7.507 seraient des femmes et 4.465 des hommes, la différence étant uniquement due au fait que les femmes vivent en moyenne plus longtemps que les hommes et sont donc plus représentées dans les tranches d'âge supérieures.
Avec l'augmentation de l'espérance de vie et le vieillissement de la population, ces chiffres ne feront qu'augmenter dans les années à venir.

En outre, nous disposons également d'informations des mutualités sur la proportion de Bruxellois qui prennent des médicaments contre la démence.

En 2018, cela représentait 0,7 % des plus de 65 ans de la Région, soit 931 personnes. Cela signifierait que moins de 10 % des Bruxellois souffrant de la maladie d'Alzheimer prennent des médicaments pour cette maladie (et probablement un peu moins puisque ces médicaments peuvent aussi être utilisés pour d'autres formes de démence, la maladie d'Alzheimer représentant que 70 % des démences).

L'évolution de l'utilisation de ces médicaments est également en baisse. Entre 2008 et 2012, il s’agissait d’environ 2 % des plus de 65 ans à Bruxelles, pour diminuer systématiquement les années suivantes.
Ce phénomène a également été observé dans une étude menée par les Mutualités Libres en 2013. Cette étude explique cette tendance à la baisse par un changement du système de remboursement en 2011 et une augmentation des contrôles à partir de 2012 dans le cadre de mesures d'austérité.

L’étude montre également qu'un patient Alzheimer traité en institution (MS/MRS) génère trois fois plus de dépenses (18.000 € en 2012) pour l'INAMI qu'un patient Alzheimer vivant à domicile (6.000 €).

Les mutualités ont donc demandé que les montants économisés par l’assurance maladie après les mesures de 2011 et 2012 soient consacrés au soutien des aidants-proches. L'aide fournie par les aidants-proches permet aux patients de rester plus longtemps dans leur environnement familier, ce qui favorise le bon déroulement du traitement.

Lors de la conférence interministérielle du 19 octobre 2015, un plan d’implémentation pour l'outil BelRAI a été approuvé.
Cet outil d'évaluation des soins, qui sera mis en œuvre au niveau national (en collaboration avec les régions et les communautés), en plus de soutenir l'élaboration de plans de soins adaptés aux personnes âgées souffrant de maladies chroniques, nous fournira également les informations épidémiologiques nécessaires à l'élaboration des politiques. De plus, l'utilisation au niveau national d'un BelRAI screener spécifique permettra de détecter et d'aider plus rapidement les personnes souffrant d'un problème cognitif, et donc de traiter plus rapidement la maladie d'Alzheimer.

En ce qui concerne le plan fédéral “Alzheimer”. Ces dernières années, les régions et les communautés ont développé leurs propres politiques en matière de maladie d'Alzheimer et de démence. En Wallonie, par exemple, il y a le plan d'action « Action Alzheimer Wallon », et le « Centre Alzheimer et maladies apparentées ». En Flandre, le « Plan Démence Flandre » a été lancé en 2010 et actualisé en 2016, le « Centre d'expertise de la démence » y est actif et la politique en matière de démence est en cours d'actualisation. La coopération entre les entités et les services fédéraux permettra donc, dans un avenir proche, de disposer de plus de données épidémiologiques valides sur le plan scientifique.

Le « Centre d'expertise de la démence brOes » est l'un des neuf centres régionaux d'expertise en démence reconnus par la Flandre depuis 2004. « brOes » est né d'un besoin spécifique de la Région de Bruxelles-Capitale. « brOes » attire l'attention de la société sur la démence et veut contribuer à maintenir et à améliorer la qualité de vie des personnes souffrant de démence et de leur environnement.

En ce qui concerne les aidants-proches de patients souffrant de la maladie d’Alzheimer. La famille et les aidants-proches sont soutenus par les organisations suivantes qui reçoivent une subvention facultative d'Iriscare.

Subsides facultatifs octroyés par Iriscare aux organisations avec des projets secteur aidants proches :

Door Iriscare toegekende facultatieve subsidies aan organisaties met projecten in de mantelzorgsector:

Organisations

Organisaties

Projet

Projecten

2019

2020

Aidants proches Bruxelles asbl

Projet de sensibilisation aux aidants-proches

Bewustmakingsproject voor mantelzorgers

12.500,00 €

12.500,00€

Jeunes Aidants proches asbl

Jonge mantelzorgers vzw

Equipe Mobile Prévention Soutien Aidance (EMPSA)

pour les familles concernées par une situation de dépendance acquise à la suite d’un accident, d’une maladie

voor gezinnen die ten gevolge van een ongeval of ziekte met een afhankelijkheidssituatie te maken hebben

-

128.130,00€

Huis voor Gezondheid vzw

Projet Aidants proches

Project Mantelzorg

12.500,00 €

 


Les Service du Collège réuni octroient également des subsides à des associations soutenant les aidants-proches que ce soit le réseau SAM, ou l’ASBL Huis voor Gezondheid, notamment. Je vous détaillerais tout cela bien volontiers dans le cadre d’une question écrite.

Par ailleurs, nous savons que la maladie d’Alzheimer touche en particulier les personnes âgées. Cette donnée doit donc être intégrée à nos réflexions sur tout le secteur de l’accompagnement des personnes âgées. Conformément au Plan Santé Bruxellois, dont les axes de force seront repris dans le Plan Social Santé Intégré, une approche intégrée et de proximité sera donc développée. Elle consiste à recréer un maillage social et une approche sanitaire préventive, au plus près des souhaits et des besoins des personnes plus âgées, pour leur permettre de rester à domicile dans de bonnes conditions.

Sachez également que trois projet-pilotes concernant le développement d'un modèle de soins intégrés pour personnes âgées au niveau du quartier sont actuellement en cours. Ces projets seront évalué par l'Observatoire de la Santé et du Social de Bruxelles-Capitale. Les résultats de l'évaluation sont attendu pour cet été. Les trois projets-pilotes sont les suivants :
- CitiSen, à Schaerbeek ;
- Zoom Seniors, dans les communes de Bruxelles-ville et Saint-Gilles ;
- Senior solidarite(it), à Etterbeek.

Ces trois projets ont débouché sur une analyse précise des besoins des personnes âgées dans chaque quartier. L'évaluation s'attachera à déterminer la mesure dans laquelle l'approche développée dans chaque projet par quartier répond à ces besoins. Sur base de cette évaluation, nous évaluerons dans quelle mesure l'approche par quartier peut être généralisée à l'échelle du territoire de la Région.

Enfin, en ce qui concerne la prise en charge des personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer. Pendant la journée, les personnes peuvent être prises en charge dans les 4 centres d’accueil de jour reconnus et subventionnés par la COCOM ou dans les 11 centres de soins de jour reconnus et subventionnés par la COCOM. Certains de ces centres sont spécialisés dans la prise en charge des personnes atteintes de démence.

Si un accueil résidentiel s'avère nécessaire, ces personnes peuvent se tourner vers les maisons de repos reconnues par la COCOM. La plupart des maisons de repos et de soins disposent d'une section spécifique pour la démence et d’un membre du personnel ayant suivi une formation complémentaire. Il s’agit de la personne de référence pour la démence, qui doit suivre une formation reconnue par la COCOM. Les maisons de repos sont financées par le biais d’une indemnité forfaitaire d’Iriscare.

Si la personne en question n’arrive pas à payer ses factures, elle peut faire appel aux mesures de soutien habituelles en introduisant une demande auprès du CPAS compétent.

La faisabilité de développer des structures alternatives aux maisons de repos financièrement accessibles sera étudiée au travers d'une étude de programmation relative aux structures de maintien à domicile, d'accueil ou d'hébergement pour personnes âgées de la Région bruxelloise, lancée dans les prochaines semaines.

Cette étude s'intéresse, entre autres :
· Au développement d'hébergements alternatifs adossés aux maisons de repos, tels que des résidences-services et des habitats communautaires ;
· Au développement de structures "semi-résidentielles" tel que les centres d'accueil et de soins de jour ou des centres de court-séjour.

Dans ce cadre, l'étude de programmation évaluera la manière dont ces hébergements et ces structures ont été développés en Flandre, en Wallonie, ainsi que dans d'autres pays européen. Une partie de l'étude sera également consacrée aux aspects financiers liés au développement de telles structures.