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Question écrite concernant la politique régionale en matière de coopérative d'habitation

de
Bianca Debaets
à
Nawal Ben Hamou, Secrétaire d'État à la Région de Bruxelles-Capitale en charge du Logement et de l'Égalité des Chances (question n°995)

 
Date de réception: 23/09/2022 Date de publication: 28/11/2022
Législature: 19/24 Session: 22/23 Date de réponse: 23/11/2022
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
30/09/2022 Recevable
 
Question   

Il va sans dire que le marché du logement bruxellois est très tendu depuis un certain temps. Les autres entités fédérées sont également confrontées à ce problème, ce qui conduit à la recherche d'alternatives à l'achat et à la location traditionnels.

L'une de ces alternatives est la coopérative d’habitation, où les résidents n'investissent pas directement dans une maison mais achètent plutôt une "part" et deviennent ainsi copropriétaires d'une société coopérative ou, par exemple, de tout un immeuble à appartements. En contrepartie de cette part, ils reçoivent un "droit d’habiter" à vie : moyennant une certaine contribution mensuelle, ils peuvent emménager dans un logement appartenant à la coopérative. Les charges sont ainsi partagées. Ceux qui ont des moyens financiers limités achètent moins de parts mais paient plus de frais mensuels. Ceux qui peuvent apporter un capital plus important bénéficient d'une réduction sur la somme mensuelle.

À titre d'exemple : en Flandre, il existe déjà 27 coopératives d’habitation actuellement. Fin juillet, le ministre flamand du logement a annoncé que cinq projets pilotes supplémentaires seraient lancés afin de soutenir davantage cette forme d’habitat novatrice.

Je voudrais donc vous poser les questions suivantes :

  • La coopérative d’habitation existe-t-elle déjà en Région de Bruxelles-Capitale ? Dans l’affirmative, pouvez-vous en dire plus ? Quels sont les projets en la matière, quels organismes les soutiennent-ils (SLRB, Fonds du logement, citydev.brussels, etc.) et quelle capacité de logement cela représente-t-il ? De quel soutien concret bénéficient ces projets et initiatives ?

  • Dans le cadre de vos attributions, avez-vous déjà réalisé d'autres recherches ou études sur les possibilités de coopératives d’habitation en Région de Bruxelles-Capitale ? Dans l’affirmative, pouvez-vous en dire plus ? En quoi cette forme d’habitat novatrice pourrait-elle contribuer à soulager les énormes tensions que connaît aujourd'hui le marché bruxellois du logement ? En quoi cette forme de logement pourrait-elle compléter le modèle CLT existant ?

  • En particulier, avez-vous déjà étudié la possibilité de lancer également des appels à projets en matière de coopérative d’habitation en Région de Bruxelles-Capitale ? Dans l’affirmative, pouvez-vous en dire plus ? Quelles actions et quels moyens sont-ils prévus à cette fin ?

 

 

 
 
Réponse    J’ai l’honneur de vous adresser les éléments de réponse suivants :

Il convient tout d’abord de noter que la notion d’habitat coopératif n’est pas formellement définie en région de Bruxelles-Capitale. En effet, cette notion renvoie à des réalités multiples. La coopérative est un régime juridique qui peut se matérialiser de bien des manières en ce qui concerne le logement.

Il existe des coopératives de locataires, de propriétaires, d’investisseurs… Les exemples les plus notables sont sans doute les sociétés coopératives de logements sociaux regroupées au sein de la Fesocolab, tels qu’ABC ou le Logis-Floréal.

Récemment d’autres initiatives ont vu le jour, notamment dans le cadre du projet européen Calico.

Dans le cadre de ce projet, des appartements ont été achetés et financés par deux coopératives gérées par ses partenaires, qui les mettent ensuite en location aux futurs propriétaires.  

En effet, les appartements de Pass-ages ont été achetés par une coopérative, « Vill’ages de Pass-ages », constituée et gérée par leurs habitants.
Les appartements d’Angela.D sont quant à eux, propriété de la coopérative d’investissement « Fair Ground Brussels » (anciennement nommée « Common Ground »), initiée par plusieurs acteurs associatifs bruxellois. La plupart des appartements sont mis à disposition à tarif social grâce à l’intervention de l’Agence Immobilière Sociale « Logement pour Tous ». Les terrains restent quant à eux, propriété de la Fondation d’Utilité Publique CLTB, ce qui garantira le maintien des clauses anti-spéculatives pour tous ces logements.

Ce modèle permet de renforcer la gouvernance participative pour les logements locatifs et d’inscrire le recours aux AIS et à la finance privée dans le cadre d’une maîtrise de socialisation perpétuelle des logements.

Plus précisément, dans le cas de Pass-ages, la coopérative « Vill’ages de Pass-ages » qui a été créée, est une coopérative d’habitants, ce qui veut dire que les habitants sont les principaux coopérateurs. Il y a néanmoins d’autres coopérateurs (garants, investisseurs et sympathisants).

En tant que coopérateurs, les habitants ont des parts de la coopérative. Ils n’achètent pas leur appartement et les 10 appartements sont la propriété de la coopérative. Le modèle développé prévoit que les coopérateurs doivent normalement apporter en parts de coopérative, au moins 30% de la valeur de l’appartement qu’ils vont habiter. Cette règle ne s’applique néanmoins pas aux personnes qui vont habiter un des appartements AIS (3 des 10 appartements de la coopérative). Il est par ailleurs éventuellement possible d’apporter moins de 30% de la valeur de l’appartement dans le cas où le ménage n’a pas les capacités financières pour cet apport, à condition que la coopérative et le groupe d’habitants marquent leur accord.

A noter que dans l’hypothèse où un ménage décide de quitter son appartement, c’est la coopérative qui choisit le nouveau ménage. Le ménage qui quitte son appartement peut décider de rester coopérateur (mais il change alors de statut en passant de coopérateur habitant à coopérateur investisseur) ou alors peut décider de revendre ses parts de la coopérative.
Dans le cas d’Angela D, comme mentionné ci-dessus, les 10 logements de l’habitat à vocation féministe sont la propriété de la coopérative « Fair Ground Brussels ». Cette coopérative comporte une quinzaine d’acteurs bruxellois actifs dans l’accès au logement et l’entrepreneuriat social.

Ces 10 logements sont pris en gestion par l’AIS « Logement Pour Tous » et habités par des femmes en situation de précarité, membres de l’association Angela D qui s’engage pour l’accès au logement dans une perspective féministe.


Concernant les études et recherches entreprises au sujet du logement coopératif, sachez que sur base des informations transmises par Pass-ages, une étude réalisée par le professeur Nicolas Bernard de l’Université Saint-Louis sur les différents types de coopératives d’habitants est en cours et devrait être publiée dans le courant de 2023. Celle-ci devrait permettre de répondre à vos questions plus spécifiques.

Par ailleurs, la Faculté d’architecture de l’ULB et le BMA travaillent actuellement à l’organisation d’une exposition sur le logement coopératif dans le courant de l’année prochaine.

Enfin, aucun appel à projets n’a été lancé dans ce domaine.