Logo Parlement Buxellois

Question écrite concernant les conséquences des fortes chaleurs et de la sécheresse sur les nappes phréatiques et l'approvisionnement en eau en Région de Bruxelles-Capitale.

de
Emin Özkara
à
Alain Maron, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de la Transition climatique, de l'Environnement, de l'Énergie et de la Démocratie participative (question n°458)

 
Date de réception: 01/09/2020 Date de publication: 21/10/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 06/10/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
01/09/2020 Recevable p.m.
 
Question    L’Institut Royal Météorologique (IRM) parle d’une vague de chaleur climatique nationale lorsque les maxima à Uccle atteignent au moins 25,0°C durant au moins 5 jours consécutifs parmi lesquels le seuil des 30,0°C est atteint durant au moins trois jours1.

Chez nous, en Belgique, nous avons connu une vague de chaleur climatique nationale durant cet été du 5 août au 16 août 2020 (12 jours de canicule). La semaine du 6 au 12 août 2020 a d’ailleurs été la plus chaude en Belgique depuis 1833, avec une température maximale moyenne de 33,5 degrés à Uccle
2. Les derniers mois ont également été marqués par de faibles précipitations. Selon l’IRM, la sécheresse devient structurelle en Belgique. Une carte publiée par le World Resources Institute (WRI) en 2019 classifie d'ailleurs notre pays comme étant "à risque" de stress hydrique3 (voir: https://frama.link/wrimap-2019).

Suite à ces records de hautes températures, au faible nombre de jours de précipitations et à l’annonce du caractère structurel de la sécheresse en Belgique, je souhaiterais savoir pour notre Région :

1. Quelles sont les conséquences de ces fortes chaleurs et de la sécheresse sur le niveau et l’évolution des nappes phréatiques et sur l’approvisionnement en eau des Bruxellois ? Quels sont les chiffres en possession de Monsieur le Ministre à ce sujet ?

2. Au niveau environnemental, quelles sont les conséquences des fortes chaleurs telles qu’elles ont été enregistrées par Bruxelles Environnement ?

3. Qu’en est-il des sites de captages qui participent à l’approvisionnement en eau de la Région de Bruxelles-Capitale ? Quelles sont les quantités d’eau (en millions de mètres cubes) fournies à notre Région par lesdits sites de captage en 2019 ?

4. Quelles sont les mesures mises en place par la Région bruxelloise, Bruxelles Environnement et VIVAQUA afin de sécuriser l’approvisionnement en eau de notre Région pour les mois et années à venir ?


1
https://www.meteo.be/fr/infos/dico-meteo/vague-de-chaleur, consulté le 24 août 2020.
2
https://www.rtl.be/info/belgique/meteo/semaine-la-plus-chaude-depuis-le-debut-des-releves-1237287.aspx, consulté le 24 août 2020.
3
https://www.lecho.be/economie-politique/belgique/general/la-secheresse-nouvelle-maladie-chronique-du-territoire-belge/10231266.html, consulté le 29 août 2020.
 
 
Réponse    1/

Bruxelles Environnement suit l’évolution du niveau piézométrique des nappes phréatiques présentes dans le sous-sol bruxellois dans le cadre du programme de surveillance des eaux souterraines.

VIVAQUA réalise une telle surveillance dans ses zones de captage (principalement en Wallonie, et en Région bruxelloise dans la Forêt de Soignes et dans le bois de la Cambre).

Compte tenu des précipitations déficitaires observés durant les mois d’avril à août 2020 (cf. graphique ci-dessous fourni à titre d’information complémentaire), de l’évapotranspiration potentiellement importante durant l’été et du stock d’eau disponible dans le sol, les précipitations observées durant cette période sont insuffisantes pour participer à la recharge du système phréatique.

La période optimale de recharge des nappes a lieu principalement durant les mois d’hiver par infiltration des eaux de pluie.

Nous observons actuellement dans la plupart des piézomètres situés dans le système phréatique une tendance globale à la baisse du niveau d’eau.

Cette baisse est moins marquée pour les piézomètres situés dans le centre et le nord de la région.

Cette tendance à la baisse est notamment à mettre en lien avec des recharges hivernales successives déficitaires (2013 et 2016) ou légèrement excédentaires (2015, 2017, 2018 et 2019) mais insuffisantes pour maintenir un bilan hydrogéologique du système phréatique en équilibre.

A ces données s’ajoutent depuis 2013 (à l’exception de 2016) des déficits pluviométriques estivaux successifs qui, couplés aux fortes chaleurs de ces derniers étés, exercent une pression sur la ressource.

Pluviométrie à Uccle (mm) données IRM

Mois

Observée

Normale

Surplus (+) ou déficit (-)

pluviométrique exprimé en %

Jan-20

51,3

76,1

-33%

Feb-20

107,7

63,1

71%

Mar-20

81,2

70

16%

Avr-20

19

51,3

-63%

Mai-20

5,4

66,5

-92%

Jun-20

69,4

71,8

-3%

Jul-20

47,4

73,5

-36%

Aug-20

51,4

79,3

-35%

TOTAL

432,8

551,6

-22%




Depuis le début de l’année, la pluviométrie est déficitaire de 22% à Bruxelles (Uccle) ; les mois d’avril et de mai étant les plus déficitaires, les mois de juillet et d’août ayant eu un tiers de précipitations en moins que la normale.

Ce déficit pluviométrique durant les mois d’été aura a fortiori moins d’impact sur la variation du niveau de la nappe que les précipitations des mois d’hiver, mais il se fait (et fera) en revanche davantage ressentir au niveau de la végétation et des petits cours d’eau.

Bruxelles Environnement continue de suivre l’évolution du niveau des nappes, soumises à des pressions grandissantes dans ce contexte de changement climatique, de périodes de sécheresses plus longues et plus fréquentes et, globalement, de perturbation du cycle naturel de l’eau afin de gérer au mieux la ressource.


2/

On peut a priori tirer quelques conclusions de la vague de chaleur de cet été, et surtout du peu de pluie que nous avons connu :

- suite aux précipitations déficitaires des mois d’été, et comme évoqué ci-avant, la tendance à la baisse du niveau des nappes phréatiques va se poursuivre dans les prochains mois (temps de réaction des aquifères de 1 à 4 mois par rapport aux événements pluvieux);
- les cours d’eau bruxellois, déjà caractérisés par des faibles débits, ont connu des niveaux d’étiage très faibles (à titre d’exemple, le Molenbeek, qui est le cours d’eau le plus sensible à la sécheresse vu les configurations locales a même été à sec durant quelques jours dans la partie aval du Parc Roi Baudouin), accentuant la vulnérabilité de l’écosystème aquatique ;
- certains étangs ont connu des développements de cyanobactéries, signe d’une eutrophisation du milieu et du faible taux d’oxygène dans l’eau. Ce fut le cas dès la dernière semaine de juillet, dans plusieurs étangs de la vallée de la Woluwe principalement ;
- l’indice de sécheresse du sol est élevé (Standardized Precipitation Index très sec) avec ce que cela implique pour les arbres et la végétation en général ;
- cette dernière a en effet subi fortement ce manque de pluie, d’autant que cela se repète depuis 3-4 ans. C’est un signe visible mais auquel on commence à s’habituer, l’herbe dans certains parcs a été brulée et les arbres montrent des signes de stress hydrique. Au niveau de l’arrossage, Bruxelles Environnement porte une attention particulière aux jeunes sujets (plantés il y a moins de 2 ans, voire 4 ans pour les plus massifs)
ainsi que pour les massifs de plantes annuelles ou vivaces et pour les corbeilles afin d’éviter les pertes. Une attention particulière a été portée, comme à l’habitude, aux arbres de collection ou aux aménagement des parcs classés. Certains nouveaux améngaments devront être refaits (nouvelle promenade le long de la Senne, Boulevard Paepsem).


3/

VIVAQUA dispose d’un outil de production très diversifié, composé de 26 sites de captage, situés pour la toute grande majorité en Wallonie.

Vivaqua capte tant l’eau de surface que l’eau souterraine et les captages souterrains sont adéquatement répartis en Wallonie et très diversifiés.

VIVAQUA dispose également de captages de réserve qui nous permettent une grande flexibilité pour l’approvisionnement.

Comme mentionné en réponse à la 1ère question, la pluviométrie importante de la fin de l’hiver 2019-2020 a permis une très bonne recharge des nappes phréatiques wallonnes (où sont situés les principaux captages de VIVAQUA).

A titre d’exemple, les captages du Condroz (principalement gravitaires sur les secteurs de Modave et de Spontin) ont vu leur production atteindre un niveau record ou proche du niveau record.

En 2019, près de 68 millions de m³ d’eau ont été fournis en Région bruxelloise.


4/

VIVAQUA surveille la situation au jour le jour et leurs experts réalisent des projections à court, moyen et long termes pour évaluer la capacité de l’appareil de production de continuer à répondre de façon structurelle aux besoins en eau.

VIVAQUA a élaboré un ‘Water Quantity Plan’ (WQP), dont la phase court terme (2020-2025) vient de se terminer, et qui montre une parfaite adéquation entre l’appareil de production et les fournitures envisagées et que l’avenir proche n’est pas source d’inquiétude pour l’approvisonnement de la Région de Bruxelles-Capitale en eau potable.

Cela étant, tant VIVAQUA que Bruxelles Environnement, rappellent autant que possible que l’eau est un bien précieux, que la ressource n’est pas inépuisable et qu’il faut dès lors la consommer de façon raisonnable.

Dans le cadre du plan ‘sécheresse’ qui figurera dans le futur Plan de gestion de l’eau 2022-2027, plusieurs actions sont en cours d’élaboration dans le but notamment :
- d’assurer une utilisation rationnelle de la ressource, en réduisant les volumes captés et en valorisant au mieux les eaux souterraines, (notamment lors des chantiers) dans l’idée de diminuer la demande en eau potable lorsque les usages ne requièrent pas une telle eau;
- de prioriser les usages en cas de risque de pénurie ;
- d’éviter le gaspillage de l’eau potable ;
- d’évaluer la possibilité de capter l’eau présente dans le sous-sol bruxellois à plus grande profondeur,… ;
- de prendre des mesures pour favoriser la recharge des nappes par infiltration d’eau de pluie à la source (moyennant une bonne qualité de l’eau et des sols pour éviter la migration de polluants vers les nappes – créer des zones d’infiltration en Forêt de Soignes par exemple).