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Question écrite concernant le placement de 1000 panneaux photovoltaïques sur les terrains de la société IPM par Enerinvest

de
Caroline De Bock
à
Alain Maron, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de la Transition climatique, de l'Environnement, de l'Énergie et de la Démocratie participative (question n°479)

 
Date de réception: 14/09/2020 Date de publication: 29/10/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 14/10/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
16/09/2020 Recevable p.m.
 
Question    Le 30 juin dernier, nous apprenions par la presse1 que 1000 panneaux photovoltaïques étaient installés sur les terrains de la société IPM, permettant de fournir ⅓ de l’électricité nécessaire à la production de l’entreprise. Dans l’article de La Libre Belgique, Alexandre Pirson, fondateur de la société Enerinvest (qui finance et possède les panneaux), affirme que le coût de l’installation est estimé à 300 000€, et que l’énergie produite sera de 270 000 kWh.

Sur le site internet d’Enerinvest
2, il est indiqué que cette entreprise :
- finance 100% de l’installation des panneaux photovoltaïques pour des entreprises tierces;
- permet à ces entreprises tierces de bénéficier gratuitement pendant 25 ans de la production d’énergie;
- cède aux entreprises tierces les installations photovoltaïques après 10 ans pour 1€ symbolique;
- se finance via les certificats verts.

Chaque entreprise reçoit des certificats verts déterminant le maximum d’émissions de gaz à effet de serre pour cette entreprise. Lorsqu’une entreprise veut émettre plus de gaz à effet de serre que prévu elle doit trouver des certificats en les rachetant à d’autres entreprises qui n’en auraient pas besoin. Mais cette bourse aux permis de polluer est également alimentée par la Région, via Brugel, qui donne des certificats verts supplémentaires aux entreprises qui produisent de l’énergie renouvelable. C’est ainsi que Enerinvest, en installant des panneaux, reçoit des certificats qui sont ensuite revendus à d’autres entreprises : Enerinvest se finances les entreprises qui achètent ces certificats peuvent polluer.

La société IPM qui met son espace à disposition pour les panneaux solaires est détenue par la famille le Hodey, dont la fortune est supérieure à 41 millions d’euros
3. Elle pourra bénéficier gratuitement pendant 25 ans d’une réduction d’⅓ de sa consommation totale d’électricité et pourra, dans 10 ans, racheter à 1€ symbolique les panneaux installés par Enerinvest.

Dans ce cadre, nous nous interrogeons sur le soutien du gouvernement à ce genre de projets climatiquement nuls et permettant l’enrichissement d’actionnaires, le ministre Maron posant devant les caméras à côté des acteurs d’Enerinvest et d’IPM lors de la cérémonie d’inauguration.

Dans ce cadre, voici les questions que nous vous posons :

- Quelles actions le gouvernement a-t-il mises en places pour accompagner ce projet ?

- La Région a-t-elle dû financer une partie de ce projet ? Si oui, lequel et à quel montant ? Quel investissement humain de la part de nos administrations publiques ?

- Combien de certificats verts Brugel a-t-il octroyé à la société Enerinvest suite à ce projet ? A quel montant en euros cela correspond-t-il ? Combien de tonnes de CO2 pourront être produites grâce aux certificats qui ont été donnés ? Sur 25 ans, à combien estime-t-on la diminution de la facture énergétique pour la société IPM ?

- Au total, combien de certificats sont donnés, pour quelle valeur et combien de tonnes de CO2 ? Y a-t-il des prévisions ou objectifs pour l’ensemble de la législature ?


1 https://www.lalibre.be/economie/entreprises-startup/le-groupe-ipm-la-libre-dh-paris-match-installe-1-000-panneaux-solaires-sur-le-site-de-son-imprimerie-a-anderlecht-5efb6a7f7b50a66a59dbd71c?fbclid=IwAR3VYfrGEFyzPGjWOIrS7cgluF_WtYpJXzIkcJuk58kGzWFir3JMO0wevKU
2
https://www.enerinvest.be/
3 https://derijkstebelgen.be/vermogende/familie-le-hodey
 
 
Réponse    1)
Le Gouvernement n’a mis en place aucune action spécifique pour accompagner et soutenir ce projet.
En tant que Ministre de l’Energie, j’ai assisté à l’inauguration pour saluer l’initiative. C’est en effet la première installation au sol sur le territoire bruxellois, qui permet de valoriser l’espace non utilisé dans une zone commerciale. Etant donné la limite du potentiel des toitures à Bruxelles, il est utile d’optimiser les autres surfaces disponibles, au sol, sur les façades, etc. et cette installation en est un bon exemple.
Bien que la priorité soit donnée aux placements de panneaux photovoltaïques sur les toitures, dans le cas présenté la surface disponible en toiture était limitée alors que la friche était inutilisée. Par ailleurs il s’agit d’une structure légère pensée pour pouvoir être facilement démontable et déplaçable si un projet venait à émerger sur le site.

2)
Le projet n’a bénéficié d’aucune aide publique. Il bénéficie du mécanisme des certificats verts, mécanisme régional de soutien à l’installation de panneaux photovoltaïques, accessible à tous (particuliers, secteur public et privé). Je vous invite à relire la réponse fournie à votre précédente question parlementaire écrite à ce sujet (question n°450).

La demande de certification en vue d’obtenir des certificats verts, comme toute demande, est gérée par Brugel, le régulateur bruxellois de l’énergie.

3)
Votre question soulève une confusion entre le système d'échange de quotas d'émission de l'Union Européenne (SEQE ou ETS en anglais) et le système bruxellois des certificats verts. Ces deux systèmes sont pourtant des fondamentaux de la politique énergétique et climatique.

Le système ETS est un marché permettant d’échanger des quotas de CO
2, et vise à inciter les industries les plus polluantes à réduire leurs émissions. En Région de Bruxelles-Capitale, seules deux entreprises sont soumises au système ETS : Audi et Electrabel. La société IPM n’y est donc pas soumise. Le site internet de la Commission européenne fournit des explications très simples et didactiques sur ce système. Je vous invite à le consulter.

Vous comprendrez aisément, je l’espère, qu’il n’y a absolument aucun lien entre ce système et le mécanisme des certificats verts : installer des panneaux photovoltaïques (et, donc, percevoir des certificats verts) n’octroie évidemment aucun « droit de polluer ».

C’est tout le contraire : comme vous le savez, la Région de Bruxelles-Capitale entend diminuer des émissions de gaz à effet de serre de 40% d’ici 2030. Pour ce faire, elle mise en partie sur le déploiement d’énergie renouvelable et entend pousser sa production d’énergie renouvelable à 470 GWh d’ici 2030. L’énergie photovoltaïque constituera une part importante de cette production renouvelable.

En ce qui concerne votre demande sur le nombre de certificats verts (CV) octroyés à ce projet, les certificats verts sont alloués selon la production effective d’électricité verte, et ce sur une durée de 10 ans. Le nombre de CV qui seront octroyés à Enerinvest n’est donc pas encore connu. En supposant que la production annuelle sera bien de 270.000kWh (270 MWh), comme annoncé par Enerinvest et en appliquant le taux d’octroi actuellement en vigueur (2,4 CV/MWh), nous pouvons estimer que 648 certificats verts seront cédés annuellement à la société Enerinvest. Le prix des certificats verts fluctue par ailleurs dans le temps.



Concernant l’impact sur la facture énergétique de la société IPM, je n’ai pas d’information à vous fournir. Vu les incertitudes sur leur consommation globale, le taux d’autoconsommation de l’électricité produite et le coût moyen de l’électricité, il est difficile d’estimer précisément les économies générées. Par ailleurs l’installation a bénéficié d’un tiers financement, un arrangement financier entre les deux parties a été trouvé pour rendre possible l’installation.


La Région bruxelloise s’est dotée d’objectifs ambitieux en matière de production d’énergie à partir de sources renouvelables, tant pour l’année 2020 que pour toute la période 2021-2030. Les cobénéfices environnementaux (réduction des émissions de gaz à effet de serre et de polluants) et de santé publique, mais aussi économiques (création d’emplois) et sociaux (réduction de la facture) ne sont pas discutables.


Par ailleurs, la Région est tenue par des obligations de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Si les objectifs ne sont pas atteints, la Région devra soit acquérir des statistiques renouvelables, soit s’exposer à des amendes ou sanctions, que ce soit au niveau belge ou au niveau de l’Union européenne.


Enfin, outre la production d’énergie renouvelable, ce type de projet permet l’évitement annuel de l’ordre de 59 tonnes de CO
2 équivalent. Le gain en termes d’émissions de gaz à effet de serre est donc réel, et nous sommes loin d’un projet climatiquement neutre.

4)
En 2019, 620 000 CV ont été vendus par Brugel (contre 577 000 CV en 2018) pour un montant total de 57,9 millions d’euros.

En 2018, la production photovoltaïque s’élevait à 62.651 MWh. Cela représente un total de 13.595,267 tonnes de CO
2 évitées.

Enfin, dans la contribution bruxelloise au Plan National Energie Climat, les projections de production d’électricité photovoltaïque ont été réalisées, qui constituent donc l’objectif
minimal de la Région d’ici 2030 :

Electricité photovoltaïque

GWh

2021

99,76

2022

105,38

2023

111,31

2024

117,58

2025

124,2

2026

139,9

2027

150,3

2028

161,17

2029

172,59

2030

184,68