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Question écrite concernant la diversité ethnique au sein du personnel et les plafonds de verre auxquels sont confrontées les personnes afrodescendantes au sein des administrations du logement.

de
Bertin Mampaka Mankamba
à
Nawal Ben Hamou, Secrétaire d'État à la Région de Bruxelles-Capitale en charge du Logement et de l'Égalité des Chances (question n°296)

 
Date de réception: 27/08/2020 Date de publication: 24/11/2020
Législature: 19/24 Session: 19/20 Date de réponse: 30/10/2020
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
28/09/2020 Recevable p.m.
30/10/2020 Annexe à la réponse p.m. Annexe
 
Question    L’ordonnance du 8 décembre 2016 modifiant l’ordonnance du 4 septembre 2008 visant à promouvoir la diversité et à lutter contre la discrimination dans la fonction publique régionale bruxelloise impose à toutes les institutions publiques bruxelloises de mettre en place une politique de gestion de la diversité, à travers la réalisation d’un plan d’action diversité. Celui-ci étant porté par un Manager de la diversité, lui-même assisté par une commission d’accompagnement.

C’est en respect de ce cadre juridique qu’a été déterminé le plan diversité 2020-2021 de la SLRB, adopté par le Conseil d’administration le 20 février de cette année.

Ce deuxième plan a donc été élaboré afin d'aborder des problèmes plus profonds tel que vous l’avez mentionné dans votre réponse à la question d’Emin Ozkara avant les vacances parlementaires, concernant les subsides régionaux octroyés pour l'engagement de chercheurs d’emploi issus de quartiers où le taux de chômage de la population est égal ou supérieur à la moyenne régionale.

L’une des principales thématiques abordées par le plan est donc la lutte contre le racisme.
En outre, 9 des 11 actions du plan concernent 5 groupes cibles prévus dans l’accord du 24 mars 2016 du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale sur l'adoption des objectifs Diversité 2016-2020, à savoir :

1. Les femmes avec comme objectif l’accession des femmes au cadre moyen et supérieur ;
2. Les personnes issues de la diversité (origine, infra-scolarité, etc.) avec comme objectif leur représentativité au sein des services publics ;
3. Les jeunes avec comme objectif la participation de la SLRB à la mise en œuvre de la garantie jeunes (-26 ans, - 30 ans).
4. Les personnes porteuses d’un handicap avec une politique axée sur ces derniers ;
5. Les personnes âgées avec un aménagement de fin de carrière (+ 50ans, + 60ans).

Mes questions concernent donc en particulier les actions qui ont pour groupe cible les personnes issues de la diversité (origine, infra-scolarité, etc.) et dont l’objectif est, tel que vous le mentionnez, de renforcer leur « représentativité » au sein des services publics, dont la SLRB.

Le principe de représentativité présuppose qu’une administration serait d’autant plus efficace dans son travail et son fonctionnement si elle s’apparente à la population qu’elle administre. En tout état de cause, l’objectif poursuivi a le mérite de démocratiser l’accès à la fonction publique et d’ouvrir les portes de cette dernière à des publics qui se trouvent être discriminés sur le marché de l’emploi.

En effet, à Bruxelles un phénomène malheureux que l’on nomme parfois « l’ethni-stratification du travail » a été mis en évidence dans les études sociologiques récentes. Le monitoring socio-économique 2017 de UNIA révèle qu’à Bruxelles, en 2014, alors que 5,1 % des personnes « d’origine belge » sont au chômage de courte durée, ce chiffre s’élève à 43% pour les bruxellois « d’origine maghrébine » et 33,6% pour les Afrodescendants.

Deux études récentes de la Fondations Roi Baudouin nous donne les chiffres au niveau national : 60 % des Afrodescendants, 40 % des Belgo-Marocains et 24,5 % des Belgo-Turcs ont un diplôme d’études supérieures. Pourtant, leur taux de chômage est quatre fois supérieur à celui des Belges qui ne sont pas d’origine étrangère.

L’intégration de la variable de l’origine ethnique dans les études scientifiques menées par des organismes publics ou d’intérêt public était assez récente et s’est faite à l’initiative de l’ancien Gouvernement, dans le cadre d’une étude scientifique ordonnée par Didier Gosuin, ancien Ministre de l’Economie et de l’Emploi, sur les profils et trajectoires des chercheurs et chercheuses d’emploi en Région de Bruxelles-Capitale. L’étude confirmait déjà les données récentes dévoilées par Unia et la Fondation Roi Baudouin, à savoir qu’entre 2013 et 2016 les chercheurs d’emploi d’origine étrangère étaient confrontés à une discrimination massive et structurelle sur le marché de l’emploi et en particulier les personnes d’origine maghrébine et subsaharienne.

Les administrations publiques doivent faire preuve d’une absolue exemplarité en matière de diversité, tel que prescrit par les différents dispositifs légaux. Les plans et labels diversité représentent donc les outils et instruments nécessaires pour parvenir aux objectifs fixés en la matière.

Madame la Secrétaire d’Etat mes questions sont donc les suivantes :

- La variable de l’origine ethnique a-t-elle été prise en considération pour déterminer les actions dont l’objectif est de renforcer la représentativité de la diversité au sein du personnel de la SLRB ? Cette même variable constituera-t-elle un outil permettant de mesurer l’efficience des actions qui auront été menées en vue d’atteindre cet objectif de représentativité ? Dans la négative, quels seront donc les outils utilisés ?

- Bien que les SISP, opérant en tant que sociétés de droit privé, ne soient pas légalement tenues de mettre en œuvre un plan diversité, elles pourraient entreprendre les démarches nécessaires en vue d’obtenir le label diversité, également octroyé pour les entreprises privées. Pouvez-vous me dire si à ce jour une des 16 SISP s’est inscrite dans un tel processus ou à l’intention de le faire ? Dans la négative quelles sont les actions que vous avez entreprises en tant que Secrétaire d’Etat au Logement et à l'Égalité des chances pour les inciter à s’engager dans un processus de promotion de la diversité au sein de leur personnel ?

- Pouvez-vous me transmettre les mêmes informations concernant le Fonds du Logement ?

Un très bel article du Vif, dont je félicite l’auteure, Laurence Van Ruymbeke, qui a mené une enquête d’investigation de fonds, est paru dans la presse ce 3 septembre. Je reprends ses mots:
“Un policier blanc de Kenosha, dans le Wisconsin, a tiré à sept reprises dans le dos de Jacob Blake, un père de famille noir âgé de 29 ans, alors qu'il s'apprêtait à se réinstaller au volant de sa voiture, ses trois fils assis sur la banquette arrière. L'homme n'est pas décédé. Mais selon toute vraisemblance, il restera paralysé. Ce nouvel incident intervient trois mois après la mort de George Floyd, cet autre Noir américain, mort d'étouffement alors qu'un policier blanc lui maintenait un genou appuyé sur le dos. L'indignation a fait le tour du monde, même si elle ne s'est pas manifestée de la même manière partout… Le racisme antinoir est patent aux Etats-Unis. Qu'en est-il en Belgique ? … Il n'a pas entièrement disparu, comme le confirment les coups de sonde opérés par Le Vif/L'Express dans différents lieux de pouvoir. En politique, dans les conseils d'administration des entreprises du Bel20, parmi les hauts gradés de l'armée, à la tête des grandes institutions culturelles, dans les médias, aux postes clés des administrations publiques, le constat est le suivant, les Afro-descendants sont rares, voire absents. “ Bien loin des 2,5% qu’on estime qu’ils représentent.

Unia nous apprend que 60% des Afro-descendants disposent d’un diplôme universitaire, 56% d’entre eux occupent un poste pour lequel ils sont surqualifiés. En tant que Ministre d'Égalité des chances, je suis certain que ces chiffres vous les connaissez et que vous n’y êtes pas insensible.

Plusieurs éléments sont évoqués par les spécialistes pour expliquer cette absence des Afro-descendants aux postes clés sur le marché de l’emploi.
Le principal étant qu’il y a au sein de notre société des discriminations raciales structurelles, que l'on peut comparer aux discriminations de genre. Je cite Patrick Charlier, Directeur chez Unia "Une société se construit sur la norme des majoritaires. En Belgique, ce sont les Blancs. Toutes les études de psychologie sociale montrent que chacun a des stéréotypes, entre autres sur la couleur de peau, qui peuvent se transformer en préjugés puis en discriminations. Ces jugements relèvent de la suspicion d’incompétences, la dévalorisation des diplômes obtenus par des personnes noires, les recruteurs ne prennent pas la mesure de l'ethno stratification du marché du travail. Ils n'ont donc aucune démarche volontariste pour aller chercher les travailleurs issus de la diversité là où ils sont.”

La question étant, peut-on le leur reprocher?

Si cela est vrai pour le secteur privé où les politiques de recrutement ne sont pas obligatoirement axées sur des principes tels que représentativité, la diversité ethnique, culturelle, sociale, … c’est moins vrai pour le secteur public où des politiques d'égalité des chances sont censées prendre à bras le corps ces phénomènes et montrer l’exemple en matière de diversité et de lutte contre les discriminations.

Au sein de cette commission, au fil des législatures, nous nous sommes depuis longtemps inquiétés des discriminations raciales qui allaient à l’encontre des personnes en quête d’un logement. Si progressivement nous avançons avec des solutions plus concrètes telle que le guichet anti discrimination, il semblerait qu’un aspect de la discrimination dans le secteur du logement, ne soit pas traité avec autant d’aplomb.

La diversité au sein des personnes cadres qui gèrent le logement public et privé en Région de Bruxelles Capitale existe-t-elle? Si tel n’est pas le cas, peut-on dès lors parler de discriminations envers les personnes Afro-descendantes, au sein même de la fonction publique, pour des raisons qui ne sont sans doute pas tout à fait identifiées.

Nous savons que les statistiques ethniques sont interdites en Belgique et que vous ne pourrez pas me donner de chiffres précis et officiels relatifs au taux d’employés Afro-descendants au sein des cadre des administrations qui sont sous votre tutelle. Toutefois, il n’y a pas quatre chemins afin d’établir un état des lieux de la situation. Je souhaiterais donc vous demander, sans tabou:

Qu’avez vous entrepris comme actions pour renforcer des politiques de recrutement qui combattent les préjugés raciaux au sein des administrations dans le secteur du logement?

Quels sont les objectifs fixés par votre Gouvernement, pour enrayer ce phénomène et détruire les plafonds de verre auxquels se cognent les personnes Afro-descendantes au sein des administrations dans le secteur du Logement?

Derrière ces discriminations incontestables, se cachent une violence sociale et économique à laquelle il me semble qu’aucun gouvernement ne sera apte à répondre si il ne commence pas à les combattre en son propre sein.
 
 
Réponse    Concernant la SLRB:

Le service du personnel de la SLRB ne dispose pas de données concernant l’origine de son personnel. La seule indication collectée concerne la nationalité, demandée lors de la fiche de renseignements que chaque nouveau/nouvelle employée.e doit compléter avant de signer son contrat à la SLRB.

La question de la diversité est largement prise en compte à la SLRB, et différentes actions sont menées au sein de notre institution pour garantir le renforcement de la représentativité de la diversité au sein du personnel :
- La procédure de recrutement de la SLRB s’appuie sur le dictionnaire des compétences de la Région de Bruxelles-capitale. De cette manière, la SLRB prépare les entretiens d'embauche de manière objective ;
- Des actions sont mises en place pour promouvoir la diversité. Depuis l’année passée (18 septembre 2019) une visite est proposée à la SLRB pour des jeunes de 16 à 18 ans issus de quartiers abritant des logements sociaux. L’objectif est de faire découvrir l’éventail de possibilités professionnelles
existantes . De plus, il s’agit de donner une vue sur « l’envers du décor » et de créer des rencontres entre les jeunes et les personnes qui construisent des logements sociaux, entre les employés de la SLRB et les locataires sociaux ;
- Une autre action au niveau positionnement externe est la représentation visible dans les réseaux de médias sociaux, Facebook, LinkedIn, Instagram, intranet, extranet,... de la SLRB. Elle s’efforce toujours de montrer une grande diversité sur ses campagnes de communication et publications (hommes-femmes ; juniors-seniors ; origine belge-origine européen-origine non-européen).
- Elle met actuellement en place une campagne axée sur les talents de chacun et chacune. Le but de cette campagne est de valoriser la diversité à travers les talents des habitants des quartiers résidentiels sociaux dans la Région de Bruxelles-Capitale ainsi que du personnel de la SLRB.

En ce qui concerne les SISP, veuillez trouver les réponses fournies à la question « est-ce que la variable origine ethnique a-t-elle été prise en considération pour déterminer les actions dont l’objectif est de renforcer la représentativité de la diversité au sein de votre SISP? », en annexe 1.

Pour votre parfaite information, il faut préciser que les SISP, en vertu de leur contrat de gestion ne sont tenues tenues de répondre aux questions que vous avez posées.


Concernant le Fonds du Logement :

Le Fonds du Logement ne rentre pas dans le champ d’application de l’ordonnance du 4 septembre 2008 visant à promouvoir la diversité et à lutter contre la discrimination dans la fonction publique régionale bruxelloise.

Néanmoins, il souscrit pleinement aux objectifs de diversité visant à ce que son personnel reflète la diversité d’origines de la population bruxelloise et des publics qui font appel à lui.

Cet objectif de diversité est atteint par l’ouverture du Fonds à la candidature de toute personne répondant à la description de fonction pour le poste à pourvoir. Les annonces de postes vacants sont systématiquement adressées à Actiris.