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Question écrite concernant le harcèlement des personnes transgenres dans la rue

de
Bianca Debaets
à
Nawal Ben Hamou, Secrétaire d'État à la Région de Bruxelles-Capitale en charge du Logement et de l'Égalité des Chances (question n°774)

 
Date de réception: 03/12/2021 Date de publication: 28/01/2022
Législature: 19/24 Session: 21/22 Date de réponse: 21/01/2022
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
17/12/2021 Recevable Bureau élargi du Parlement
 
Question   

Selon une enquête de l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes, près de la moitié (45%) des personnes transgenres ont été la cible d’insultes dans la rue ou dans un autre lieu public au cours de l'année écoulée.

La première enquête nationale de l'Institut sur le sexisme, #Youtoo, montre que les insultes utilisées sont généralement sexistes et souvent très vulgaires. En outre, 53% des personnes transgenres interrogées indiquent avoir été récemment victimes de violences (verbales ou physiques) dans un lieu public. La majorité de ces victimes ne se rendent pas à la police par la suite. Elles ont peur, elles croient que cela ne mènera à rien ou ont une image négative de la police. Parfois, différentes considérations concernant l'auteur les dissuadent.

Blesser, humilier ou attaquer des personnes en raison de leur identité ou expression de genre est une forme de sexisme et de discrimination. Elle repose en effet sur une condamnation de la transgression de normes stéréotypées attachées au sexe biologique. Autre fait marquant : 11% des plaintes reçues par l'Institut en 2020 concernaient des personnes transgenres.

Je voudrais donc vous poser les questions suivantes :

  • Avez-vous pu prendre connaissance de cette enquête ?

  • Disposez-vous de chiffres spécifiques à Bruxelles sur cette question du harcèlement des personnes transgenres dans la rue ? Combien de plaintes ont-elles été déposées en 2020 ?

  • Comment vous attaquez-vous à cette problématique ? Dans quelle mesure constitue-t-elle une action prioritaire dans le cadre d'un des plans régionaux tels que le "Plan régional de sécurité" ou le "Plan de lutte contre les violences faites aux femmes" ?

  • Avez-vous décidé de lancer une campagne de sensibilisation sur cette problématique, notamment afin d’encourager les victimes à porter plainte ?

  • Comment collaborez-vous avec Bruxelles Prévention et sécurité et/ou les zones de police bruxelloises dans ce dossier ?

 

 
 
Réponse    J’ai l’honneur de vous adresser les éléments de réponse suivants :
 
L'enquête sur le sexisme de l'Institut « #Youtoo » confirme effectivement l’inquiétantesituation des personnes transgenres, ce qui ressortait également d'autres enquêtes.

Le nouveau plan d'inclusion bruxellois pour les personnes LGBTQIA+ 2022-2025, qui sera très prochainement approuvé en dernière lecture par le Gouvernement, s'est inspiré notamment de l'enquête à grande échelle réalisée par l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne (FRA) auprès de 140.000 répondants. Celle-ci a révélé des signaux alarmants similaires à l’enquête #Youtoo concernant la situation des personnes transgenres, et ce, indépendamment de leur pays et avec quelques différences régionales, mais peu marquées.

Le titre de ce rapport était par conséquent approprié : "Un long chemin à parcourir pour l'égalité". Cette enquête a été réalisée une première fois en 2014 et une seconde fois en 2019. L'une des conclusions que nous avons pu en tirer, est qu'une protection juridique est nécessaire, mais qu’elle ne suffit pas. Nous devons travailler en effet, sur l'acceptation sociale, l'inclusion, la perception et la lutte contre les stéréotypes. Il s'agit d'un travail de longue haleine qui requiert des mesures structurelles importantes et des campagnes récurrentes afin de provoquer un changement de mentalité.

C'est pourquoi, la thématique des personnes transgenres constitue un point d'attention de ce nouveau plan mais est aussi un des groupes prioritaires de la campagne Share the Color, qui sera à nouveau déployée en mai 2022, avec cette fois-ci, une approche différente.

En effet, à cet égard, l'accent portera sur la lutte contre les stéréotypes, la promotion de l'inclusion et la motivation des allié.es, élément crucial pour créer un changement social durable. Un deuxième objectif de la campagne est d'encourager la volonté de signaler les cas de violence et de discrimination, ainsi que le rôle de soutien que les allié.es peuvent jouer dans ce processus.

En ce qui concerne les chiffres spécifiques à Bruxelles relatifs aux signalements à la police, ils ne relèvent pas de la compétence de l'Egalité des Chances.

À ce sujet, l’enquête sur la criminalité de 2019 est intéressante. Il s’agit d’une enquête qualitative au niveau de la Région bruxelloise qui a une fois de plus révélé la situation problématique des personnes trans, avec comme valeur ajoutée, le fait de relever que l'intersectionnalité a un effet multiplicateur négatif, notamment en termes de signalements à la police et de seuils. C'est sur cette base que le projet pilote sur le signalement des incidents LGBTQIA+phobes a été lancé en collaboration avec RainbowHouse et BPS. Un premier rapport sur les résultats sera publié d'ici peu.

Concernant l’inclusion de cette thématique dans les plans déjà lancés en Région bruxelloise ainsi que votre question relative à la collaboration avec Bruxelles Prévention et Sécurité:

Dans
le Plan Global de Sécurité et de Prévention de la Région de Bruxelles-Capitale
2021-2024
, les LGBTQIA+ n'ont pas été repris comme un thème spécifique ou un groupe vulnérable, mais bon nombre d’actions sont prévues en collaboration avec BPS dans le cadre du prochain plan.

En effet,
en ce qui concerne les collaborations avec BPS et les zones de police bruxelloises relatives au harcèlement de rue : je souhaiterais mentionner la formation sur le harcèlement de rue pour les services de prévention et de sécurité régionaux et communaux, qui fait partie du Plan contre les violences faites aux femmes. Cette formation est organisée par Brusafe et l'ERAP ), en collaboration avec l'ASBL CEMEA et vise notamment à les informer sur le cadre juridique et l'importance de la problématique, mais aussi à leur apprendre comment réagir lorsqu'ils sont confrontés à une situation de harcèlement de rue.

En outre, dans le cadre du développement du plan LGBTQIA+, des actions supplémentaires sont envisagées pour poursuivre la formation de la première ligne de prévention.

Une deuxième collaboration intéressante avec BPS dans ce cadre, est le guide "Security by Design", dont BPS coordonne l'élaboration de la 2ème version. Cette nouvelle version comprendra un chapitre dédié au genre dans l'espace public, en portant une attention particulière sur le harcèlement sexuel. Actuellement, BPS est en train de le préparer, en collaboration avec equal.brussels. Ce guide sera un outil pratique qui pourra être utilisé pour prendre en compte le thème lors de la conception d'espaces publics.

En ce qui concerne le plan d'action bruxellois contre les violences faite aux femmes, la problématique du harcèlement de rue est présente dans plusieurs actions, mais sans qu'une attention particulière soit accordée aux personnes trans.

Enfin, outres ces actions, il convient également de mentionner qu'en 2021, j'ai soutenu le projet Yser de l'ASBL Alias. Ce projet est axé sur le groupe de femmes transgenres qui sont proportionnellement les plus confrontées à la violence de rue, à savoir les travailleuses du sexe. Dans ce cadre, un court documentaire et une enquête ont été réalisés en collaboration avec BPS.

En ce qui concerne à présent votre question relative à la collaboration avec la police, il existe depuis longtemps une bonne collaboration, également autour du Point de Contact mis en place dans la zone Bruxelles Ville - Ixelles.

Le futur plan comprendra bien entendu des actions des différents acteurs publics bruxellois afin d’assuyrerdavantage de soutien aux victimes d'actes LGBTQIA+phobes et de promouvoir un environnement urbain plus inclusif.

Par ailleurs, je voudrais également vous rappeler l'initiative visant à créer, au sein de chaque zone de police, une cellule spécialisée dans la violence familiale et sexuelle. Cette mesure est primordiale pour améliorer l'accueil des victimes de violences sexuelles dans notre région. Dans ce cadre, j'ai rencontré au cours de ces derniers mois, les chefs de corps bruxellois afin de discuter de cette action directement avec eux.

Comme vous le savez, les événements récents concernant les violences sexuelles dans la vie nocturne et #balancetonbar ont accéléré certaines initiatives. En conséquence, un plan d'action a été proposé par les différents Ministres et Secrétaires d’État bruxellois ainsi que par le Conseil de la Nuit. equal.brussels sera responsable des initiatives de sensibilisation et de campagnes : création d'une affiche/d'autocollants pour informer les gens sur les lignes d'assistance et mise en place d'une vaste campagne de sensibilisation.

En effet, une campagne à grande échelle est prévue pour novembre 2022, et sera financée en collaboration avec le Ministre-Président, au moyen des budgets d'equal.brussels et de Bruxelles Prévention et Sécurité.


Fin 2021, mon cabinet et equal.brussels ont organisé une première réunion avec les organisations présentes sur le terrain (dont UFIA, Plan International, Forum des Jeunes) afin d'inclure leurs priorités et expériences dans les préparatifs de cette campagne. Sur la base de ces préparatifs, il sera décidé de l'orientation de la campagne en termes de public cible, de message et de porteurs du message - et également de la possibilité et de la faisabilité de porter une attention particulière aux personnes trans.


L'aspect "information des victimes" y sera important et est également repris dans l'autre action du plan d'action élaboré en réponse à #balancetonbar mentionnée ci-dessus, à savoir la création et la distribution d'affiches/d'autocollants avec des informations à l'attention des victimes et témoins. Ils comporteront notamment les coordonnées des services d'assistance mais aussi des conseils sur la manière de réagir en tant que témoin.