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Question écrite concernant les conditions de travail des travailleuses employées dans les salons de manucure bruxellois

de
Soetkin Hoessen
à
Bernard Clerfayt, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de l'Emploi et de la Formation professionnelle, de la Transition numérique, des Pouvoirs locaux et du Bien-Être animal (question n°1197)

 
Date de réception: 21/06/2023 Date de publication: 27/07/2023
Législature: 19/24 Session: 22/23 Date de réponse: 18/07/2023
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
23/06/2023 Recevable Bureau élargi du Parlement
 
Question    Les salons de manucure de la galerie du Centre ont dû fermer temporairement à plusieurs reprises en raison des émanations dangereuses des produits pour les ongles, qui provoquent des irritations des yeux et des voies respiratoires. À chaque fois, on découvre les mauvaises conditions de travail des travailleuses employées dans ces salons de manucure: non seulement elles travaillent toute la journée dans ces émanations, mais il est aussi souvent question d’exploitation et de violation des droits humains de ces travailleuses vietnamiennes, qui séjournent la plupart du temps illégalement dans notre pays. Ces salons de manucure sont soupçonnés de faire partie d'un réseau de trafiquants d’êtres humains, où Bruxelles constitue une escale vers le Royaume-Uni. Les Vietnamiennes sont contraintes de travailler ici pour rembourser le coût de leur voyage aux trafiquants. Les contrôles sont principalement effectués par la cellule Ecosoc de l'ONSS bruxellois, mais l'inspection régionale de l'emploi a également la possibilité d'intervenir dans le cadre de ses compétences.
  • Les compétences de l'inspection régionale de l'emploi sont relativement limitées, mais est-elle déjà intervenue dans certains cas ou a-t-elle effectué des contrôles dans des salons de manucure?

  • Dans l'affirmative, à combien de reprises?

  • Quelles suites ont-elles été données à ces dossiers?

  • L'inspection régionale du travail collabore-t-elle avec l'ONSS ou la police afin de lutter contre les abus et l'exploitation?

 
 
Réponse    Je vous remercie pour votre question.

1.L’Inspection régionale de l'Emploi suit de très près la problématique des ongleries. Au cours de la période précédant 2022, l’Inspection régionale de l'Emploi a participé activement aux actions organisées dans le cadre de la cellule d'arrondissement de Bruxelles. Vu la problématique des ongleries vietnamiennes à Bruxelles, il a été décidé d'intensifier les contrôles, l’Inspection régionale de l'Emploi prenant la direction de l'organisation de ces contrôles, sous la tutelle de l'Auditorat du Travail.

Bien que l’Inspection régionale de l'Emploi ait effectivement des pouvoirs limités, elle peut verbaliser les employeurs pour les infractions les plus graves au Code pénal social, notamment l'emploi de travailleurs qui ne sont pas autorisés à séjourner dans le pays pendant plus de trois mois. L’Inspection régionale de l'Emploi, par le biais de l’ordonnance relative à la surveillance des réglementations en matière d'emploi qui relèvent de la compétence de la Région de Bruxelles-Capitale, a exactement les mêmes pouvoirs que les services fédéraux d'inspection sociale (Code pénal social). En outre, l’Inspection régionale de l'Emploi dispose d'une expertise particulière dans ce domaine, assure le monitoring du secteur et connaît la réalité régionale comme personne, et partage son expertise pour mener des actions de contrôle intégrées.


2.Entre juillet 2022 et aujourd'hui, l’Inspection régionale de l'Emploi a organisé sept actions de contrôle de ce type (le 02/07/2022, le 20/08/2022, le 01/10/2022, le 22/10/2022, le 12/11/2023, le 04/02/2023 et le 22/03/2023). Ces contrôles ont eu lieu en collaboration avec les zones de police locale de Bruxelles-Capitale - Ixelles, Ouest, Midi et Montgomery.


Ces contrôles comprennent notamment la cartographie du problème, comme l'établissement d'une liste des ongleries de la Région de Bruxelles-Capitale, la prise de contact avec les zones de police et la mise en place d'équipes de contrôle multidisciplinaires composées de différents partenaires, tels que l'ONSS (ECOSOC), le SPF Santé publique (sécurité des produits), le MINFIN (identification des infractions fiscales) et le SPF Economie (vente de produits et de services sans indication de prix). L'objectif est que chaque instance impliquée puisse identifier et verbaliser elle-même les infractions.

Les infractions au droit social, telles que l'emploi illégal, l'exploitation économique, le non-respect des déclarations DIMONA et les infractions à l'emploi à temps partiel, sont clôturées après audition de toutes les parties prenantes possibles (employés et employeurs) et transférées à l'Auditorat du Travail de Bruxelles. Un magistrat de référence y a été désigné pour analyser ces procès-verbaux d'infraction et décider s'il y a lieu ou non d'engager des poursuites pénales ou d'infliger des amendes administratives de la Région ou du niveau fédéral.

3.Suite à ces contrôles, l'exploitation de 11 ongleries a été mise sous scellés judiciaires par ordre de l'Auditorat du Travail et des conditions ont été imposées par l'Auditorat du Travail de Bruxelles.

Au total, 20 employeurs ont déjà été verbalisés par l’Inspection régionale de l'Emploi pour lesquels un PV d'infraction pour emploi illégal a été établi et remis à l'Auditorat du Travail de Bruxelles.

Deux enquêtes sont encore en cours à l’Inspection régionale de l'Emploi.

Comme indiqué précédemment, il appartient à l'Auditorat du Travail de Bruxelles d'évaluer ces procès-verbaux d'infraction et de décider s'il y a lieu ou non d'engager des poursuites pénales. Si l'Auditorat du Travail décide de ne pas engager de poursuites pénales, nos dossiers seront transférés à nos services de poursuites administratives.


4.L’Inspection régionale de l'Emploi travaille en étroite collaboration avec l'ONSS (Office national de Sécurité sociale) et la police pour lutter contre les abus et l'exploitation. L’Inspection régionale de l'Emploi dirige ces contrôles et coopère avec les services d'inspection fédéraux de l'ONSS, notamment la cellule spécialisée dans la traite des êtres humains appelée ECO-SOC.

Tous les contrôles dans ce secteur sont organisés conjointement avec ce partenaire clé. Les infractions d'emploi illégal incluent automatiquement les infractions à la sécurité sociale, telles que l'absence de déclarations DIMONA pour ces travailleurs. Ces dernières infractions relèvent de la compétence des collègues fédéraux.

En outre, dans le cadre de ces actions, l’Inspection régionale de l'Emploi a ouvert deux enquêtes concernant la traite des êtres humains lorsque les conditions de travail portaient atteinte à la dignité humaine. Toutefois, ces enquêtes n'ont pas abouti car les victimes potentielles ont refusé de coopérer ou leurs déclarations étaient en contradiction avec les données factuelles. Pour le prouver, une étroite collaboration a été mise en place avec la police judiciaire fédérale de Bruxelles, qui a participé aux auditions et à l'analyse, par exemple, des téléphones portables.

Par ailleurs, les inspecteurs de l’Inspection régionale de l'Emploi ont suivi une formation à l'École régionale d'Administration publique (ERAP) afin qu'ils soient en mesure de détecter les indicateurs d'exploitation économique. Le cas échéant, des dossiers d'enquête sont ouverts et des dossiers pénaux sont transmis à l'Auditorat du Travail de Bruxelles. L'Auditorat du Travail peut alors demander des actes d'instruction complémentaires et réquisitionner certains services pour l'assister dans ce type d'instruction.