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Question écrite concernant l'insertion sociale des jeunes en errance.

de
Farida Tahar
à
Elke Van den Brandt et Alain Maron, membres du Collège réuni en charge de l'action sociale et de la santé (question n°315)

 
Date de réception: 25/01/2021 Date de publication: 11/03/2021
Législature: 19/24 Session: 20/21 Date de réponse: 04/02/2021
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
25/01/2021 Recevable p.m.
 
Question    « En Belgique francophone, on estime que plusieurs milliers de jeunes sont sans-abri ou à risque de le devenir. » C’est le constat que nous pouvons lire sur le site du Forum - Bruxelles contre les inégalités1, dans le cadre de la campagne «#incasables ».

Un nombre interpellant ! « Ils ont entre 16 et 25 ans. Tous ont un point commun : la vie ne leur a pas fait de cadeau. » D’aucuns les surnomment même « les incasables » tant la société ne parvient pas/plus à les « caser ».

Les causes de l’errance relèvent de plusieurs facteurs : contexte familial complexe, événements traumatiques graves dans l’enfance, difficultés scolaires, pathologies diverses, rejet institutionnel... etc.

Ces jeunes se retrouvent progressivement, par leur parcours de vie, en dehors d’un système dans lequel ils ne s’identifient plus et qui, de surcroît, ne les reconnaît plus. Dès lors, ils errent, faute d’avoir un lieu de vie stable et se retrouvent en marge de la société. Faute de repères, cette dangereuse situation s’apparente alors à un terrain glissant vers la vie en rue avec tous les risques que cela implique (recours au vol et/ou à la prostitution, consommation de stupéfiants, etc.).

Fort heureusement le secteur associatif s’est emparé du sujet et constitue, une fois de plus, un allié important pour le monde politique. Comme en témoigne la campagne du hashtag #incasables, du Forum – Bruxelles contre les inégalités, que j'évoquais à l'instant, et qui permet de sensibiliser à la réalité des jeunes en errance.

Des jeunes étaient d’ailleurs venus présenter cette thématique il y a quelques semaines, dans le cadre des jeudis de l’hémicycle organisés par l'assemblée de la COCOF. Ils avaient partagé des témoignages poignants à cette occasion et interpellé les mandataires politiques dans la foulée.

Pour pallier cette problématique, les acteurs de terrain dégagent plusieurs pistes de solutions, comme la coopération efficace entre institutions, levier indispensable pour conserver la mémoire des parcours et personnaliser davantage les réponses proposées à ces jeunes, ou encore la réduction des exclusions croissantes et la complexité d’accès aux allocations sociales et de santé.

Plus largement, le secteur pointe du doigt une augmentation des différentes mesures portant atteinte aux droits fondamentaux des individus : restrictions pour bénéficier des allocations d’insertion des jeunes ou des allocations de garantie de revenus des travailleurs à temps partiel, statut de cohabitant, etc.

Compte tenu des missions importantes qu'exerce la COCOM en matière d'insertion sociale et de lutte contre le sans-abrisme, je souhaiterais vous poser les questions suivantes :

- Des mesures spécifiques pour ce public-cible sont-elles actuellement à l’étude ? Le cas échéant, avez-vous pris des contacts avec le secteur associatif pour dégager des pistes de solutions qui tiennent compte des réalités de terrain ?

- Qu’en est-il des pratiques d’harmonisation au sein des services « jeunesse » des CPAS bruxellois ?

- Une coordination est-elle en cours avec d’autres ministres, éventuellement dans d’autres assemblées ? Je pense notamment à la Secrétaire d’État en charge du logement.

- Dans le budget réservé à la lutte contre le sans-abrisme, quelle est l’enveloppe consacrée aux actions préventives de l’errance des jeunes ?


1 https://www.cbcs.be/Campagne-Jeunes-en-errance-lesincasables
« Jeunes en errance », un projet piloté par Le Forum – Bruxelles contre les inégalités ; le Service de santé mentale Le Méridien ; les services non-mandatés de l’Aide à la Jeunesse Le Cemo, SOS Jeunes - Quartier Libre et Abaka ; l’asbl L’Ilot ; la Ligue Bruxelloise Francophone pour la Santé Mentale. Avec le soutien du Délégué général aux droits de l’enfant.
Autre source : http://www.le-forum.org/news/84/7/Sortir-les-jeunes-de-la-rue-
 
 
Réponse    Je vous renvoie au compte rendu de la séance du Parlement francophone bruxellois du 13 octobre dernier portant spécifiquement sur ce thème.

Lors de cette séance, Madame Trachte et moi-même avons exposé l’ensemble des actions entreprises pour rencontrer la problématique des « jeunes en errance ». Nous y avions exposé que les pistes de réponses aux questions qu’elle soulève doivent être recherchées à la croisée des chemins de nombreux secteurs et opérateurs (aide à la jeunesse, Services jeunesse des CPAS, plannings familiaux, services sociaux de première ligne, écoles, opérateurs de l’aide aux personnes sans abri, santé mentale, …).

Pour le surplus, voici quelques éléments de réponse à vos questions :


En matière de coordination des différents acteurs concernés par ces jeunes et mineurs « en errance », comme le prévoit l’accord du gouvernement, j’ai demandé au Délégué Général aux droits de l’enfant et son homologue néerlandophone de rassembler l’ensemble des cabinets et administrations concernés par cette problématique.

Deux rencontres ont eu lieu, dont la première en juin 2020. Y ont été conviés les cabinets des ministres Glatigny, Trachte, Maron, Beke, Dalle, Vanden Brandt ainsi que les représentants des administrations compétentes (FWB, COCOM, COCOF, VGC, VG).

A l’issue de cette réunion, il a été décidé de s’engager vers la création d’un dispositif d’accueil de jour « bas seuil » et de favoriser la mise en place sur le territoire bruxellois d’une coalition « A Way Home ».

Le Forum - Bruxelles contre les inégalités qui explore cette thématique depuis plusieurs années a été subventionné afin de veiller à l’opérationnalisation de ces deux dimensions et une nouvelle asbl a été créée spécifiquement pour cela : l’asbl Macadam.

Sur les crédits 2020, une subvention a été accordée au dispositif sur l’enveloppe destinée aux projets innovants en matière de lutte contre le sans abrisme (90.000 €) et sur l’enveloppe santé mentale dans le cadre de l’appel à projets « lieux de lien » (66.667 €). Ces budgets seront renforcés en 2021.


Les acteurs à la base du projet sont issus des secteurs de l’aide à la jeunesse, de la santé mentale du secteur du sans abrisme et de la lutte contre la pauvreté.

Le réseau doit clairement être élargi à d’autres acteurs (assuétudes, action sociale, sexualité, santé, …). Diverses rencontres avec des fédérations et les membres de ces fédérations ont déjà eu lieu (Fedito, Ligue Bruxelloise Francophone pour la santé mentale et Fédération des Centres de Planning Familial, Fédération AMA). Le travail se poursuivra dans le cadre de la coalition A Way Home.


Concernant l’harmonisation des pratiques des services « jeunesse » des CPAS bruxellois : la thématique des jeunes en errance est une des thématiques à développer sur l'année 2021 et 2022 par le groupe de travail organisé via le CAAJ Conseil d'arrondissement de l'aide à la jeunesse de Bruxelles. Ce groupe de travail réunit 14 CPAS bruxellois ainsi que des services d'aide au milieu ouvert (AMO) afin d'améliorer l'articulation de ces deux types de services sur la région. Inévitablement, la question de l’harmonisation des pratiques des différents services jeunesse des CPAS sera abordée dans ce cadre. 


Enfin, la collaboration avec Madame Ben Hamou est très constructive. Dans le cadre du Plan de Relance et du Plan d’urgence logement, une attention particulière sera portée aux jeunes en errance parmi les personnes pour lesquelles des solutions de relogement seront mises en œuvre (500 personnes et familles en 2021).