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Question écrite concernant l'épicerie sociale les Capucines et l'aide alimentaire.

de
Sadik Köksal
à
Elke Van den Brandt et Alain Maron, membres du Collège réuni en charge de l'action sociale et de la santé (question n°514)

 
Date de réception: 25/10/2021 Date de publication: 28/01/2022
Législature: 19/24 Session: 21/22 Date de réponse: 22/12/2021
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
13/12/2021 Recevable p.m.
 
Question   

Depuis 2004, l’asbl les Capucines est une épicerie qui permet à des personnes en situation de précarité de s’approvisionner en produits alimentaires et non-alimentaires à moindre coût. Aux Capucines, on trouve tout ce qu’il y a en grande surface, mais en plus petite quantité. Le principal et premier partenaire du projet est Carrefour, qui donne certains invendus à l'asbl depuis 15 ans ou qui offre la possibilité à certaines associations de commander à moindre prix. 60 % des clients sont des personnes isolées ou des familles monoparentales. Aussi, 30 % sont au chômage, 30 % au CPAS, 15 % à la mutuelle, 15% sont pensionnés, 9 % travaillent, 5 % sont sans revenu. Nombreux sont les clients des Capucines qui avaient une vie “normale”, jusqu’à ce qu’un événement chamboule tout : une faillite, un licenciement, un accident de travail, une maladie grave. La directrice de l’asbl, Emilie Many, insiste sur ce point : “Ce n’est pas toujours la précarité telle qu’on l’imagine”. En plus du volet alimentaire, les Capucines offrent une expérience professionnelle et formative à plus de 20 personnes par an. Face a? l’urgence de la pre?carite? alimentaire et faute de moyens suffisants mis en œuvre, la de?termination des associations d’aide alimentaire a entrai?ne? une e?volution de la le?gislation et des pratiques facilitant les dons des invendus : obligation pour les moyennes et grandes surfaces de faire don des aliments pe?rime?s du jour au be?ne?fice des associations, alle?gement financier pour les magasins donateurs (re?cupe?ration de la TVA), interdiction de de?te?riorer la nourriture (fin de l’eau de javel de?verse?e dans les poubelles). Il n’est pas satisfaisant de venir en aide aux personnes pre?carise?es avec des invendus, mais aujourd’hui c’est la seule solution qui existe.

Aujourd’hui, des entreprises a? vocation lucrative se saisissent de l’opportunite? de cette nouvelle “solidarité” et profitent de la vague de l’antigaspillage : elles de?tournent ces invendus, jusque-la? entièrement destine?s a? l’aide alimentaire, afin de les revendre. C’est ce que fait Happy Hours Market, qui récupère les invendus pour les vendre, au de?triment de l’aide alimentaire. Comme indiqué dans la carte blanche rédigée à ce sujet par diverses associations de terrain, au début de la crise covid, Happy Hours Market n’a pas su vendre les invendus re?cupe?re?s, faute de clients et en a profite? pour organiser de nombreuses actions de communication car l’entreprise redistribuait alors l’entie?rete? de ses invendus a? des cpas, ho?pitaux, homes et associations d’aide aux plus pre?caires. Ses activite?s prenant de l’ampleur, l’entreprise est acclame?e par la presse et cite?e en exemple. Toutefois, a? la reprise de ses ventes, elle a arrêté la majorite? de ses livraisons aux associations. Celles-ci ont alors vite re?alise? qu’elles avaient servi d’appa?t. Si plus d’attention n’est pas porte?e a? ce qui est en train de se jouer actuellement et si les pouvoirs publics voient les entreprises prive?es a? but lucratif comme des partenaires de l’aide sociale pluto?t que de soutenir structurellement les actions de terrain, les de?rives continueront jusqu’a? la marchandisation totale de l’aide alimentaire. Ce mode?le n’est pas une solution. L’aide alimentaire se fait par les associations de terrain qui n’ont pas pour objectif de s’enrichir et qui doivent être soutenues de façon pérenne et structurelle.

Pour DéFi, garantir un accès en quantité suffisante à une nourriture saine et équilibrée, c’est lutter contre l'invisibilité sociale.

Au vu de ces éléments, voici mes questions :

  1. Concernant l’appel à projets portant sur la création ou le renforcement de l’aide alimentaire à l'attention du secteur associatif, est-ce que les 500 000 euros ont déjà été alloués aux associations ? Quelles actions concrètes vont être menées via ledit projet ?

  2. Avez-vous des chiffres précis pour cette fin d’année sur les bénéficiaires de l’aide alimentaire à Bruxelles ?

  3. Dans quelle mesure la Cocom soutient l’asbl les Capucines ? Quels liens entretenez-vous avec cette association et les autres associations actives dans l’aide alimentaire ? Est-ce que vous les rencontrez régulièrement pour entendre les doléances du terrain ?

  4. Quels nouveaux efforts ont été entrepris ces derniers mois par la Région bruxelloise afin de faciliter la récupération des invendus de la chaîne agro-alimentaire ?

 
 
Réponse    L'appel à projets a été sur l’aide alimentaire et le droit à l’alimentation à raison de 500.000 euros lancé le 23/02/2021. Le nombre total de projets soumis à la Commission communautaire commune était de 38, dont 13 ont été retenus.


Voici un aperçu des 13 projets retenus:

Alias : Aide alimentaire pour les travailleur.se.s du sexe/prostitué.e.s en Région de Bruxelles-Capitale
Ce projet veut répondre en collaboration avec le réseau de partenaires publics et associatifs, aux besoins les plus urgents des personnes prostitué.e.s/travailleurs du sexe masculins et trans*. Dans le cadre de permanences d’accueil, l’activité consiste à mettre à disposition des chèques (tickets S) pour une aide alimentaire et des kits avec des produits d’hygiène de première nécessité pour des prostitués/travailleurs du sexe masculins ou trans* en Région de Bruxelles-Capitale, touchés par la crise de la Covid.
L’objectif est l’accès à l’alimentation et rendre les bénéficiaires autonomes dans leur choix alimentaire. Cette demande est introduite en collaboration avec les partenaires Espace P et Utsopi.
Les travailleurs sociaux établissent une liste (reprenant généralement des pseudonymes) de personnes dans le besoin sur base d’échanges individuels qu’ils ont avec les bénéficiaires.
Ces personnes sont prévenues par mail, sms, téléphone, Whatsapp… au moment de la distribution de chèques.

Utsopi : Aide alimentaire pour les travailleur.se.s du sexe en RBC
UTSOPI est une ASBL à destination des travailleur.euses du sexe. Depuis le début de la crise, les demandes émanant des personnes travaillant dans le secteur a explosé.
Ce projet se concentre autour de deux actions spécifiques liées à l’aide alimentaire et au droit à l’alimentation : la mise en place et distribution de tickets alimentaires et kit hygiènes et l’intégration de nouvelles personnes au sein d’Utsopi comme membre actif.ves.

La Porte Verte : Préparation et distribution de repas gratuits au bénéfice des plus précarisés
La Porte verte est un centre social polyvalent. Il s'agit de la poursuite du projet lancé en avril 2020. Durant le confinement, confection et de distribution de repas gratuits en partenariat avec plusieurs associations de terrain et principalement le restaurant social "Les Uns les Autres" à Molenbeek-Saint-Jean. Ce projet a été développé dans le cadre du Centre d'Aide Alimentaire (distribution de colis alimentaires sur base notamment de récupération d'invendus) et du Restaurant social Snijboontje qui ne pouvait plus accueillir sur place ses bénéficiaires suite aux restrictions gouvernementales liées à la crise sanitaire du covid-19 (au 31/12/2020 5000 repas avaient été distribués gratuitement. Actuellement, 75 repas/jour).



Cultureghem : Dreamkitchen - The extra table
Le projet "Dreamkitchen", situé sur le site des abattoirs, vise à la création d'un maximum de repas sains (+- 1000 personnes en bénéficient chaque semaine) basés sur des fruits et légumes invendus et récupérés le dimanche sur les marchés. Les gens cuisinent et mangent ensemble (pour le moment, avec le covid, à emporter).
Le projet "The extra table" vise à embaucher un "chef" supplémentaire pour que celui-ci puisse encadrer et gérer au mieux la cuisine.


Centre Lorca : Foodgees
Le Centre Lorca est un centre socio-culturel non agréé mais financé en initiative par la Cocof pour ses activités culturelles (danse, théâtre, musique).
Concernant l'aide alimentaire, le Centre mène diverses actions: production de repas à destination des personnes sans-papiers , cours de cuisine et sensibilisation à la cuisine durable en partenariat avec l’association Rencontre des Continents, participation au réseau « Cuisine de quartiers » par l’accueil de groupes locaux
La demande actuelle vise un triple objectif : augmenter les capacités de production de repas (400 repas le vendredi et 400 le dimanche à la Casa Malis) ; améliorer les capacités de gestion, de transformation et de stockage de nourriture à destination de la production de repas ; ouvrir les installations à d’autres opérateurs de l’aide alimentaire.

Fédération des Services Sociaux bicommunautaires : Foodtruck - Ralliement des fourchettes
Il s'agit de soutenir la mise en place d’un projet pilote, le premier FoodTruck Solidaire (FTS) en région bruxelloise. Ce projet est coordonné par le Ralliement des Fourchettes, association de fait regroupant 7 ASBL.
Administrativement, le financement sera géré par la Fédération des Services Sociaux mais l’opérationnalisation du projet et son pilotage se feront par les restaurants du Ralliement des Fourchettes. Dans un deuxième temps, une ASBL spécifique sera créée, notamment pour reprendre et pérenniser ce projet.
Ce foodtruck sera installé dans 3 lieux différents et 3 jours/semaine avec une régularité dans les lieux répartis. Par exemple, du lundi au vendredi : lundi, mercredi et vendredi et ce, pour une durée de 3 mois. Le Foodtruck bougera donc 4x/an et sera installé dans 12 endroits différents de la région bruxelloise sur une période d’un an. Seront prioritairement visés notamment les lieux publics tels que les CPAS et d’autres lieux identifiés comme ayant des besoins et selon les partenariats établis au préalable avec des organisations locales.


Share Food : Lancement deuxième frigo
L'organisation redistribue des invendus à un public précarisé via un système de frigo solidaire. Une trentaine de bénévoles récupèrent les invendus auprès des partenaires (Exki, Chez Paul, No Javel,…) pour les entreposer dans un local équipé situé à St-Gilles.
Ces aliments sont redistribués du mardi au samedi entre 10h et midi.
Pour accroître l'activité (un local est disponible à Forest par exemple) nécessité d'un travailleur capable de coordonner le développement de l'ASBL.
Le budget demandé ici permet d'employer cette personne à mi-temps qui serait en charge de l'ouverture à Forest.


Kids and Family : Gans Solid'Actions
Les jeunes de l'ASBL ont commencé à distribuer, dès mars 2020, des colis alimentaires aux personnes précarisées de la commune (invendus des supermarchés voisins, banque alimentaire,...) Ce sont aujourd'hui 150 jeunes qui s'investissent les mercredi et les samedi à la distribution de ces 175 colis.
Le financement permet de pérenniser cette activité et d'élargir les moments de distribution ==> objectif de 3 jours ouvrables chaque semaine (de 13h à 18h30).


Cap Brabantia : Le panier solidaire
A travers un premier accueil, une analyse de sa situation, une orientation ou un accompagnement, le Centre d’Aide aux Personnes (4 antennes) aide l’usager, dans sa globalité, en lui assurant une assistance et un suivi.
Ici, il s'agit de mise à disposition de chèques alimentaires permettant aux bénéficiaires les plus précarisés d'acheter les produits de leur choix.

A place to live: A place to share
A Place to live asbl est une organisation de volontaires, située à Bruxelles, qui s'engage depuis 1999 pour les mères, les enfants et les jeunes socialement vulnérables. Souhaite lancer un projet en aide alimentaire sur 4 axes:
Distribution de colis alimentaire (produit frais) via 3 volontaires (faisant partie du public-cible) ==> création et distribution des colis
Collecte de produits frais auprès des commerçants locaux (à nouveau les volontaires/bénéficiaires participeront)
Atelier de cuisine : permettre aux participants d'échanger sur les pratiques de conservation (lacto-fermentation, confiture,...), faire appel à des professionnels concernant le 0 déchet,...
Culture d'un petit potager à des fins éducatives et de consommation.


Les Gastrosophes : La Conserverie circulaire et solidaire
Depuis 2017, Les Gastrosophes récupèrent les invendus alimentaires dans les magasins bio, auprès de grossistes ou directement chez les maraîchers bruxellois. Il récupère plus de 250kg d’invendus bio par semaine. Pour 80%, ces invendus sont utilisés directement pour des services de catering, notamment pour le Samusocial; 15% sont redistribués gratuitement, notamment aux bénévoles et les 5% restants sont compostés en raison de leur dégradation. C'est donc près de 20% des denrées récupérées qui ne sont pas transformées en vue d'une consommation directe, soit 2,4 tonnes par an.
Le projet de conserverie permettrait de sensibiliser le public à la saisonnalité, à la consommation locale, et surtout, conserver ces 2,4 tonnes afin de ne plus les gaspiller...
Avril-Juin 2021 : accroissement de la capacité électrique dans le laboratoire (qui accueille la conserverie) + certification ; achat et installation du matériel spécifique (séchage, fumaison, conserves,...)
Mai-août 2021 : Recrutement d’une personne en charge de la coordination du pôle conserverie




Wijkhuis Chambéry : Chambéry Chal’Heureux
Au-départ "restaurant social", l'ASBL s'est adaptée à la crise actuelle en livrant à domicile 50 repas/jour. Une fois la reprise des activités "classiques" effectuées, l'ASBL souhaite poursuivre cette activité.
Le budget permettrait une extension des heures d'ouverture aux samedis (prévue à partir de juin 2021) et la livraison simultanée des repas à domicile, même si le restaurant rouvre ses portes. Afin de réaliser ces projets, besoin d'un soutien financier supplémentaire pour couvrir les coûts des bénévoles, l'achat de nourriture et d'emballages écologiques pour les livraisons de repas.

Centre d'Accueil Social Abbé Froidure : Bons d'achat accompagnés
Aide, via un bon d'achat accompagné d'une valeur de 150 euros, à 4 familles précarisées/semaine (chaque famille n'a droit qu'une fois à l'aide) C’est une Porte d'entrée vers l'ASBL et un accompagnement.

Par rapport aux chiffres précis sur le nombre de bénéficiaires de l’aide alimentaire sur cette fin d’année nous ne pouvons malheureusement pas vous donner des chiffres. Cependant nous savons que nous avons octroyé un soutien spécifique à raison de 500.000 euros Cocom et 500.000 euros Cocof ainsi qu’un soutien à raison de 30 Millions au CPAS. Nous savons qu’une grande partie des aides complémentaires ont été distribués sous forme de ticket S au sein des 19 CPAS.
Sur base du bilan des appels reçus par le numéro vert entre février et mai 2021 nous pouvons aussi faire quelques constats:
- Les demandes d'aide alimentaire ont diminué entre février et mai 2021. On est passé d'un appel sur trois à un appel sur six.
- Les appels concernant l'aide alimentaire concernent l'ensemble des tranches d'âge, avec une surreprésentation des familles monoparentales et des personnes isolées.
- Beaucoup d'étudiants font appel à l'aide alimentaire, même si on constate une diminution depuis avril.




Spécifiquement par rapport au soutien octroyé à l’asbl les Capucines : l'asbl a reçu une subvention de 10 000 euros jusqu'en 2019 inclus dans le cadre de son activité d'épicerie sociale.
Sur la base d'une analyse de la situation financière en 2020, il a été décidé de ne plus accorder de subvention. L'ASBL dispose de revenus suffisants pour poursuivre son activité sans avoir besoin d’une subvention supplémentaire. En effet, dans un rapport de l’administration, un certain nombre de questions ont également été soulevées quant à l'application correcte des règles comptables au niveau de l’asbl.
En 2021, aucune demande de subvention n'a été introduite.

Nous rencontrons régulièrement la Concertation alimentaire de la Fédération des Services Sociaux qui nous informe de l’état du secteur, des différents acteurs ainsi que de leur demande.

Quand à votre question sur les efforts de la Région bruxelloise afin de faciliter la récupération des invendus de la chaîne agro-alimentaire il est important de communiquer que dans le passé, l’administration régionale de Bruxelles Environnement a couvert la thématique de la récupération d’invendus dans le cadre de la Stratégie Good Food. Ainsi, cette dernière stratégie, par le biais de subside, a soutenu la mise en place du réseau logistique LOCO.