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Question écrite concernant les métiers en pénurie à Bruxelles et les formations proposées.

de
Jamal Ikazban
à
Bernard Clerfayt, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale chargé de l'Emploi et de la Formation professionnelle, de la Transition numérique, des Pouvoirs locaux et du Bien-Être animal (question n°1063)

 
Date de réception: 27/06/2022 Date de publication: 19/01/2024
Législature: 19/24 Session: 21/22 Date de réponse: 12/12/2022
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
04/11/2022 Recevable p.m.
 
Question    Les métiers en pénurie constituent un défi majeur en termes de politiques publiques, notamment en matière de formation.

En Wallonie, le Forem publie une nouvelle liste de 141 métiers en tension de recrutement1. Avec 52 fonctions critiques, pour lesquelles les employeurs éprouvent des difficultés de recrutement, et 89 métiers en pénurie de main-d’œuvre, caractérisés par un manque de candidats. Par ailleurs, une quinzaine de fonctions en pénurie en 2021 ne se retrouvent plus sur la liste (inspecteur de police, assistant commercial, conseiller en prévention,…) tandis que 31 nouveaux métiers y font leur apparition surtout dans le secteur de l’horeca, mais aussi comme analyste de crédit, moniteur d’auto-école ou encore nettoyeur industriel.

Bruxelles, n’est très certainement pas en reste non plus à ce niveau-là : des nombreux secteurs peinent à recruter du personnel (construction, horeca, etc.).

Parallèlement, la Région flamande réclame du personnel dans certains secteurs. Une solution se trouve peut-être dans l’accord de coopération signé l’an dernier par la Région bruxelloise et la Flandre visant à augmenter le nombre de Bruxellois travaillant en Flandre.

Face à la pénurie d’emploi à Bruxelles, Bruxelles-Formation a réorienté sa politique de formation en lien avec certains métiers en pénurie. Comme la formation au métier de « webdeveloper » en partenariat avec Molengeek qui s’adresse aux jeunes Bruxellois de 18-29 ans2. Certains de ces jeunes sont originaires des quartiers d’Anderlecht ou Molenbeek qui avaient historiquement du mal à intégrer le marché de l’emploi. Ce type de formation qui conjugue haut niveau de formation et débouchés professionnelles concrètes est une vraie avancée pour une partie des jeunes.

Par ailleurs, il y a de nombreux autres exemples de formation dans des métiers en pénurie comme avec Construcity.Brussels, qui a proposé des formations dans pas moins de 35 métiers de la construction. Plus récemment, des projets d’accès ou de remise à l’emploi tels que Phoenix.brussels, Rebond.brussels pour les nouveaux chercheurs d’emploi, de formations variées aux métiers en pénurie ou à la transition numérique ont tenté de venir en aide aux Bruxellois en peine d’emploi.

Progressivement, par des méthodes de gouvernance à l’échelle régionale en matière de politiques de formation et d’emploi, il est possible de redonner confiance à la jeunesse précaire - qui ne demande, du reste, qu’à travailler (même s’il y a encore des complications réelles de la part des administrations publiques à atteindre certains jeunes en difficulté).

Monsieur le Ministre, vous le savez, il y a urgence sociale. Il est primordial qu’un maximum de Bruxellois soit à l’emploi pour diminuer un maximum les situations de détresse sociales. C’est pourquoi je voudrais savoir :

  1. En 2022, quels sont les métiers en pénurie et en tension de recrutement à Bruxelles ? Pour quelles raisons ?

  2. Quelles solutions sont sur la table pour y remédier ?

  3. Par rapport à l’année dernière, quels sont les métiers qui ne sont plus en tension de recrutement ? Pour quelles raisons ?

  4. Combien de Bruxellois ont bénéficié de l’accord entre Bruxelles et la Flandre ? Pour quel type de job ?

  5. Combien de Bruxellois ont eu accès aux projets tels que Phoenix.brussels et Rebond.brussels ? Comment cela s’est-il concrétisé en termes de mise à l’emploi ?

  6. Quel a été l’impact de l’outil de relance par la formation au numérique Digitalcity ?

  7. Combien de candidats ont suivi les formations proposées par Construcity.brussels dans le secteur de la construction ? Combien ont décroché un emploi ?

1 https://www.rtbf.be/article/le-forem-met-a-jour-la-liste-des-metiers-en-penurie-quinze-nouvelles-fonctions-voici-les-etudes-qui-y-conduisent-11017192

2 https://www.bruxellesformation.brussels/catalogue-dorifor/digital-marketing-avec-molengeek-18-a-29-ans/)

 
 
Réponse    Je vous remercie pour votre question.


Comme le Forem, view.brussels l’Observatoire bruxellois de l’emploi et de la formation, dresse l’inventaire des fonctions critiques en Région bruxelloise, autrement dit les professions pour lesquelles les offres d’emploi sont difficiles à pourvoir. La liste des 113 fonctions critiques en 2021 a été publiée le 1er juillet 2022 et est disponible sur le site d’Actiris.


View.brussels n’observe pas de grands changements dans les métiers en pénurie ces deux dernières années. Certains intitulés ont changé mais cela pour des motifs méthodologiques.

Les tendances en la matière s’inscrivent plutôt sur du long terme, voir du très long terme.


La grande majorité des métiers en pénurie le sont de de longue date et sont les mêmes sur la scène internationale.


En Belgique, le taux d’emploi est, au premier trimestre 2022, de 71,9%. En Région bruxelloise, il atteint 65,7% en juin dernier contre 60,1% en janvier 2019. En Flandre, il est respectivement de 75,8% contre 74,1% et en Wallonie, de 62,7% contre 65,6%.




C’est bien à Bruxelles que l’augmentation est la plus importante et ce malgré une croissance démographique plus importante à Bruxelles que dans les deux autres Régions. Sans étonnement, le taux d'emploi le plus élevé est observé chez les personnes à niveau d’instruction élevé, le plus faible chez les personnes peu qualifiées. L'écart entre le taux d'emploi des personnes à niveau d’instruction faible (45,2%) et celui des personnes à niveau d’instruction élevé (85,2%) atteint 40 points de pourcentage.
C’est pourquoi, l’objectif principal reste de mener toujours plus de bruxellois vers l’emploi en misant sur la formation.

Le Gouvernement bruxellois a adopté en première lecture ce jeudi 8 décembre un avant-projet d’ordonnance donnant priorité à Actiris pour que le demandeur d’emploi inscrit auprès d’Actiris se voit proposer un bilan de compétences individualisé portant sur son expérience, ses qualifications, ses forces et faiblesses.
Ce bilan doit s’articuler autour de 3 grands axes :
- Compétences professionnelles permettant de vérifier l’adéquation de ses aptitudes professionnelles au regard du registre des titres, diplômes, brevets, certificats, etc., admis couramment sur le marché du travail ;
- Compétences linguistiques permettant d’évaluer ses connaissances linguistiques dans l’une des deux langues officielles de la Région bruxelloise et/ou en anglais et/ou dans tout autre langue utile au projet professionnel du chercheur d’emploi ;
- Compétences numériques permettant d’évaluer ses capacités d’utilisation des outils numériques.
Ce bilan global doit être systématisé dans l’accompagnement des chercheurs d’emploi inscrits auprès d’Actiris. Sur base des résultats du bilan de compétences, un plan d’actions individualisé sera élaboré avec le chercheur d’emploi pour lui permettre de se rapprocher des emplois à pourvoir et qui répondent à son aspiration professionnelle.

En parallèle, sur base des tables rondes sectorielles qui se sont déjà tenues, je suis en train d’affiner un plan d’actions régional.
Ces cinq tables rondes ont effectivement permis l’identification d’une série d’actions et de besoins
touchant tout autant à l’image des métiers, qu’aux difficultés rencontrées par les organismes de formation pour toucher leurs publics et pour les services de l’emploi de collaborer efficacement avec le secteur privé.

Ce plan structuré, en 4 lignes de force et dans une vision linéaire, apporte un ensemble de réponses concrètes aux problématiques rencontrées afin de renforcer l’orientation, l’incitation, la formation et le rapprochement des chercheurs d‘emplois vers les métiers en pénurie.

C’est un budget de 4 millions réparti sur 2022 et 2023 qui sera consacré à la mise en œuvre de ces actions par les PFE notamment.

Plus spécifiquement sur la mobilité interrégionale et notamment pour que plus de bruxellois occupent des emplois en région flamande, j’ai porté l’accord de coopération avec pour principal objectif de donner aux Bruxellois un meilleur accès à l'emploi, en augmentant leurs compétences d'une part, et en favorisant la mobilité interrégionale d'autre part. Si cela prend plus de temps que je ne le souhaiterai, le vdab et Actiris travaillent à sa mise en œuvre.
Selon l’analyse conjointe du marché de l’emploi réalisée par view.brussels et le vdab de juin 2022 :


Les chiffres montrent que le nombre de navetteurs bruxellois sortants a fortement augmenté (de +59,2% en 20 ans), passant de 48.000 en 2000 à 76.500 en 2020. Plus de deux tiers de la navette sortante se rend en Flandre en 2020, portant le nombre de Bruxellois travaillant en Flandre à 52.759.

La navette de Bruxelles augmente légèrement de 2018 à 2019 (+3,2%). La hausse est un peu plus prononcée pour la navette vers la région du Brabant oriental (+8,6%), la province du Brabant flamand (+6,0%), la Région flamande (+5,8%) et la région de Hal-Vilvorde (+5,6%). Un peu moins de la moitié des navetteurs bruxellois se déplace vers la Région flamande, dont 74% vers le Brabant flamand. 88% d’entre eux travaillent dans la région de Hal-Vilvorde.
Afin d'avoir une meilleure vision du nombre total de chercheurs d'emploi bruxellois inscrits chez Actiris qui trouvent un emploi en Flandre, ainsi que leur profil et le secteur d'emploi, un nouveau monitoring sera introduit par le VDAB et view.brussels. Les premiers chiffres seront disponibles à la fin de cette année.

D’après le monitoring des indicateurs conjoints VDAB-view.brussels, le taux de sortie vers l'emploi des participants qui ont terminé une formation professionnelle au VDAB en 2019 est de 74,2% (minimum 1 jour d'emploi) et de 65,0% (minimum 1 mois d'emploi).
En collaboration avec Actiris, le VDAB lancera également cette année un appel à projets vers des partenaires tiers pour de nouvelles formations professionnelles, accessibles aux Bruxellois et qui mènent à des professions bruxelloises et flamandes en demande.
En concertation avec le Ministre Brouns que je rencontrerai de nouveau prochainement, l'objectif est d'atteindre le nombre de 2 000 Bruxellois supplémentaires chaque année qui trouvent un emploi en Flandre. Un objectif atteignable puisqu’actuellement, c’est entre 1600 et 1800 Bruxellois qui chaque année vont travailler de l’autre côté de la frontière.
Concernant la prime « Phoenix.brussels », Actiris comptabilise au 15 aout 2022 quelques 2.574 bénéficiaires.
Concernant le programme « rebond.brussels », mis en place en 2020 en pleine crise COVID, et qui propose un accompagnement spécifique aux personnes ayant perdu leur emploi suite à une faillite.
Actiris a enregistré 241 participants aux séances d’information organisées sur le programme dont 126 participants au programme d’accompagnement proprement dit (qui s’étale sur 12 mois). Au 31 mai 2022, on comptabilisait 49 personnes accompagnées ayant retrouvé un emploi.
Clairement Rebond.brussels ne touche pas la cible escomptée initialement. Les mesures de protection du Fédéral ont porté leurs fruits. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Pour rappel, ce projet-pilote est coordonné de manière paritaire avec Brupartners.

Enfin concernant les Pôles Formation Emploi, modèle innovant qui a encore beaucoup de capacité de se déployer.

Même si la gestion d’une organisation multi-partenariale telle que les PFE reste complexe et entraine un changement de paradigme des acteurs et membres en présence. Ils sont des leviers centraux pour répondre aux besoins des Bruxellois et mener durablement de plus en plus de bruxellois vers l’emploi.

Les résultats de Digitalcity en matière de formation des chercheurs d’emploi, de validation des compétences, d’emploi et d’activités sectorielles sont encourageants. À contrario, les formations pour travailleurs mises en place doivent encore faire l’objet d’améliorations, notamment en termes de promotion et d’adaptation de l’offre.

Les dernières données disponibles portent sur l’année 2021 et livrent les résultats suivants :

- 2.122 chercheurs d’emploi distincts formés (1.702 par Bruxelles Formation, 420 par ses partenaires) pour 2.847 places de formation occupées (2.290 à Bruxelles Formation, 557 chez ses partenaires)
- 18 travailleurs formés (16 par Bruxelles Formation, 2 par ses partenaires)
- 201 stages et formations en entreprise
- 113 conventions d’immersion professionnelle (CIP)
- 24 screenings et validations des compétences



Après deux ans d’activité, Digitalcity.brussels a globalement gagné en expérience tant en termes de fonctionnement, que de services et de dynamique partenariale. Le développement de relations sectorielles nouvelles et l’entretien des collaborations existantes se poursuivent.


Concernant Construcity.brussels, ce sont :
, les résultats pour l’année 2021 sont les suivants :

- 826 chercheurs d’emploi distincts formés pour 1.031 places de formation occupées ;
- 163 travailleurs formés pour 191 places de formation occupées ;
- 101 stages et formations en entreprise ;
- 27 conventions d’immersion professionnelle (CIP) ;
- 49 screenings et validations des compétences.


Les dernières données disponibles relatives à la suite du parcours socio-professionnel des chercheurs d’emploi formés par Bruxelles Formation et ses partenaires remontent à la cohorte 2019, soit avant la création du Construcity.brussels. Concernant les chercheurs d’emploi ayant suivi une formation auprès de Bruxelles Formation et de ses partenaires dans le périmètre qui est aujourd’hui celui du PFE, le taux de sortie vers l’emploi est de 62,9% tous emplois confondus et de 55,7% pour les emplois de minimum un mois.

Ce qui pour moi est révélateur, nous devons investir dans des méthodologies d’évaluation et de mesure d’impacts plus performantes pour que nous puissions ajuster les offres publiques aux besoins réels sur le marché du travail. J’œuvre à cet effet mais c’est un changement important de paradigme qui prend également plus de temps que je ne le souhaiterai.