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Question écrite concernant le Centre de Distribution Urbaine

de
Véronique Lefrancq
à
Elke Van den Brandt, Ministre du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, chargée de la Mobilité, des Travaux publics et de la Sécurité routière (question n°1432)

 
Date de réception: 01/12/2022 Date de publication: 02/02/2023
Législature: 19/24 Session: 22/23 Date de réponse: 20/01/2023
 
Date Intitulé de l'acte de Référence page
16/12/2022 Recevable
 
Question   

La Région prévoit depuis de nombreuses années la création d’un Centre de Distribution Urbaine, comme indiqué dans le Plan Stratégique pour le Transport de Marchandises en Région de Bruxelles Capitale (approuvé en 2013) ou évoqué dans le Plan Régional de Développement Durable (2018). Ce centre a pour objectif de convier des marchandises par de nombreux transporteurs afin d’organiser des livraisons mutualisées.

J’aimerais dès lors vous poser les questions suivantes :

  • Où en la création du Centre de Distribution Urbaine ? Est-il toujours d’actualité ?

  • Quel est le calendrier de mise en œuvre de ce projet ?

  • Quels sont les objectifs visés (en termes de tonnage qui transite, de nombre d’entreprises et de marchandises livrées par vélo et camionnette) pour ce Centre ?

  • Enfin, quel est le budget alloué pour ce Centre ?

 

 

 

 

 
 
Réponse    Un Centre de Distribution Urbaine (CDU) est un entrepôt, situé à la périphérie d’une zone de desserte, où est effectuée une rupture de charge entre le transport à longue distance et le dernier kilomètre. Cette rupture de charge permet de passer le relais à un autre maillon de la chaine logistique et/ou d’adapter le type de véhicule utilisé. Le terme anglais de Urban Consolidation Centre met davantage en avant la notion de groupage (consolidation) qui renforce le gain écologique et qui permet de rentabiliser la rupture de charge. Ce modèle existe et est utilisé depuis très longtemps par les sociétés de transport privées qui optimisent naturellement leur logistique. C’est ce que font par exemple UPS au départ de son dépôt de Diegem, Delhaize à Zellik ou Colruyt au départ de Hal. Ainsi l’idée de centre de distribution urbaine ne fait qu’y ajouter la notion qu’il s’agit d’un équipement urbain qui peut être planifié par les autorités.

Bruxelles Mobilité a favorisé l’implantation d’un CDU en 2014 à Bruxelles au travers du projet européen LAMILO (Last Mile Logistics) et un subside de 200.000€. Celui-ci a permis d’attirer l’entreprise CityDepot, déjà active dans la distribution urbaine à Hasselt, pour opérer le CDU. Les performances ont fait l’objet d’un suivi approfondi, qui a permis de démontrer, à quantités de marchandises équivalentes, une réduction de 21% des kilomètres parcourus en ville, une division par deux du nombre de tournées et de véhicules de livraison, une réduction de 22% des émissions de Nox et de particules fines et de 13% du CO2.

Malheureusement, les volumes captés n’ont pas évolué aussi favorablement qu’espéré et les nombreux commerçants démarchés n’ont pas montré beaucoup d’intérêt dans les services proposés. En effet, il ressort que le concept de CDU avec services à valeur ajoutée pour les commerçants du centre-ville peine à trouver une viabilité économique. CityDepot, racheté par Bpost, a cessé sa collaboration avec ses clients non-rentables pour se concentrer sur la livraison du dernier kilomètre (et donc le groupage au sein d’un même tournée) de ses clients transporteurs prêts à payer le prix réel pour ce service. Heureusement, il semble que ce type de flux soit quand même en croissance. CityDepot continue bien ses activités à Bruxelles, après avoir été vendu.

L’expérience avec CityDepot a montré que, même si les flux attirés par le CDU sont fortement optimisés, ceux-ci ne représentent qu’une infime partie des flux de marchandises dans Bruxelles puisque :
- au plus optimiste, le CDU peut attirer 100 camions par jour ;
- chaque jour, quelque 16.000 camions et 26.000 camionnettes pénètrent dans la Région de Bruxelles Capitale.

Le transport de marchandises dans une ville est constitué d’une multitude de chaines logistiques différentes aux caractéristiques propres. Vouloir tout faire passer par un ou plusieurs CDU est illusoire puisque :
- certaines chaines logistiques sont déjà organisées de façon très performante : par exemple les colis express (DHL, TNT, UPS, etc.) ou l’approvisionnement des supermarchés (en camions complets) ;
- la plupart des chaines logistiques ne peuvent pas se mélanger : comment mettre dans un même véhicule du sable, des fleurs et des repas préparés par exemple ?
Même dans les filières théoriquement “groupables”, on note que les expériences réussies et dont c’est la seule activité sont très limitées.

En synthèse, le concept de CDU comme solution globale tel que défendu et poussé précédemment par les autorités est clairement en perte de vitesse tant à Bruxelles que dans les autres villes européennes où les faillites ont été nombreuses. Toutefois le projet LAMILO a confirmé l’intérêt des CDU pour la problématique du “groupage”. De ce fait, les CDU peuvent continuer à être défendus pour cette dernière fonction mais ils ne peuvent clairement pas à eux seuls répondre à l’ensemble des flux de la région, aussi bien en termes de volumes que de spécificités. En fait, un CDU est un type d’utilisation d’un entrepôt logistique parmi d’autres. Si les CDU ne sont pas la solution miracle pour la distribution urbaine, le besoin d’espaces logistiques modernes en zone urbaine n’en demeure pas moins important.
Pour ces raisons, le Plan Good Move ne prévoit pas de créer de nouveaux CDU mais d’assurer suffisamment d’espaces à la logistique en ville, que ce soit à l’échelle des quartiers pour la cyclologistique par exemple (action A5 de Good Move), ou à l’échelle de la Région par exemple avec des lieux comme le Centre TIR ou Schaerbeek Formation (action C12 de Good Move). Les leçons et les actions pertinentes ainsi tirées de la mise en œuvre du plan de Transport de Marchandises de 2013 ont ainsi été intégrées et incorporées dans Good Move.